En Mt 5-1-10 la plupart des traductions commencent chaque verset par : ‘Heureux’ ou ‘Bienheureux’ sauf une- celle de Chouraqui- qui dit ‘en marche’. Comment expliquer cette importante différence ? [Jean]

La « faute » à la traduction grecque de la Bible ! Au troisième siècle avant Jésus-Christ, des rabbins réunis à Alexandrie ont réalisé une traduction de la Bible hébraïque (notre Ancien Testament) en grec, qui était à l’époque la langue la plus parlée dans le bassin méditerranéen. Cela a donné la traduction de la Bible des Septantes (ou 70) car selon la tradition, il y aurait eu environ 70 rabbins pour faire ce travail. C’est sur cette traduction que les auteurs du Nouveau Testament se sont souvent appuyés, même si Jésus parlait certainement plutôt l’araméen (hébreu populaire) que le grec. De nombreux traducteurs de la Bible en langue française ont ensuite fait de même.

Ceci fait que, par exemple, le psaume 1 commence en hébreu par le mot « ashrei » que Chouraqui traduit donc par « en marche », alors que la traduction grecque utilise le mot « makarios » qui se traduit par « heureux ». Même si Jésus a sans doute employé le mot proche de l’hébreu (donc « en marche »), quand les évangélistes ont mis le texte par écrit en grec, ils ont tout de suite le mot « heureux » comme dans la Bible grecque, car c’est comme cela qu’on le traduisait à l’époque.

C’est vrai que « en marche » a une connotation très dynamique et active (un certain président de la république l’a bien compris…) qui traduit la démarche pour être heureux, alors que « Heureux » ou « Bienheureux » semble davantage décrire un état de fait déjà obtenu. On peut trouver quand même un point commun entre ces deux expressions en les considérant avant tout comme des bénédictions, des encouragements (c’est comme ça que les bibles anglaises disent : « Blessed » « bénis »).

Vous connaîtrez la vérité et la vérité vous affranchira ; qu’est-ce que cette vérité et où est-elle ? [Daniel]

Le mot de vérité (ἀλήθεια « alèthéia » en grec) est très présent dans tout l’évangile selon saint Jean. J’ai -rapidement- compté 24 occurrences de ce mot, dans cette forme là. En voici deux autres en plus de Jean 8, 32 que vous citez:

« Et le Verbe s’est fait chair et il a habité parmi nous et nous avons vu sa gloire, cette gloire que, Fils unique plein de grâce et de vérité, il tient du Père. » (Jean 1, 14)

« Pilate dit [à Jésus] alors : « Tu es donc roi ? » Jésus lui répondit : « C’est toi qui dis que je suis roi. Je suis né et je suis venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité. Quiconque est de la vérité écoute ma voix. » Pilate lui dit : « Qu’est-ce que la vérité ? » » (Jean 18, 37-38)

Je remarque, en lisant Jean 1, 14, que la vérité est partie intégrante du Fils: il s’agit d’un attribut qu’il reçoit de Dieu le père. En lisant Jean 8, 32, je découvre que l’effet produit par cet attribut sur ma vie: me rendre libre. Enfin, en lisant Jean 18, 37, je reçois l’appartenance à la vérité comme une cause et/ou conséquence de mon attention à la Voix de Jésus (Fils et Verbe de Dieu).

Je ne pourrai aller plus loin dans l’explication sur ce qu’est la vérité, par contre je peux dire qu’elle est bien définie (il y a « la » vérité ») et liée à ma relation à Jésus … qui veut, chaque jour, me révéler la face de notre commun père !

Si Jésus n’était pas mort crucifié, mais simplement d’un infarctus, le message biblique perdrait-il son sens ? [Jean-François]

Avec des « si »… Si les humains n’étaient pas depuis toujours, collectivement et individuellement, tous, séparés de Dieu, y aurait-il eu besoin que nous soyons rachetés de ça (c’est-à-dire du péché, qui nous tire tous toujours vers le bas) et restaurés dans la communion avec Dieu (ce dont nous sommes incapables par nous-mêmes) ? Or c’est la mort de Jésus, rejeté par la Loi juive et ses thuriféraires, crucifié par les païens, c’est elle qui nous permet d’être ainsi justifiés et sauvés. Le Nouveau Testament nous dit qu’ « il fallait » que Jésus meure ainsi. Ce n’est pas croire au destin, mais reconnaître que, si ça ne s’était pas passé, nous serions toujours dans nos fautes, coupés de Dieu et de la vraie vie, sans espérance.

Évidemment, ça n’a rien à voir avec un infarctus, un accident de la route ou une mort de vieillesse ! Ça n’a même rien à voir avec les tortures et les exécutions qui se passent tous les jours dans le monde. C’est une vie donnée une fois pour toutes, pour moi, et qui fait pont entre Dieu et moi pour toujours. Aucune autre mort que celle de Jésus sur une croix ce jour-là ne réalise une telle chose. Je ne le comprends pas, mais je sais que je suis au bénéfice de ce « sacrifice » que je n’ai pas accompli !

C’est quoi la sagesse du serpent ? En effet quand Jésus envoye ses disciples (Matt 10,16), il leur recommande d’être « sage comme le serpent et doux comme la colombe ». [Mark]

Quand Jésus nous demande d’être sages comme les serpents, il faut bien comprendre à quoi il fait référence. Il ne nous demande évidemment pas d’imiter les serpents. Le mot grec, traduisant celui que Jésus emploie vraisemblablement en araméen, veut dire : intelligent, sage, plein de bon sens, sensé, prudent, avisé.

Depuis Genèse 3,1 on sait que « le serpent est le plus rusé de tous les animaux des champs ». Il y a un jeu de mot dans l’hébreu original (proche de l’araméen que parlait Jésus). Car ce mot veut dire deux choses très différentes : rusé, et…nu ! Le serpent était le plus nu de tous les animaux des champs et le plus rusé. Et l’humain qui va vouloir imiter le serpent se retrouve très… nu, et très rusé, puisqu’il a goûté à l’arbre de La-connaissance-de-ce-qui-est-bien-et-ce-qui-est-mal.

Donc on ne sait pas très bien quel mot Jésus a employé puisque seule la retranscription grecque de ses paroles nous est parvenue en Matthieu 10,16. Mais ce qui est clair, c’est que Jésus nous appelle certes à la simplicité et à la douceur, à tendre l’autre joue, à assumer que nous ne sommes pas forts par nous mêmes ; mais en même temps, il nous appelle à être intelligents, rusés mais pas pour faire chuter, sages mais pas pour être orgueilleux, intelligents mais pas pour nous croire tout-puissants, prudents mais pas craintifs.

Dans Jean 8, il est dit que Jésus n’est pas tombé dans leur piège ; il écrivait avec ses doigts dans le sable. Qu’écrivait-il ? [Mark]

On pourrait se poser d’abord la question : si j’étais dans la foule des accusateurs de la femme adultère, qu’est-ce que Jésus écrirait alors avec ses doigts sur le sable, que moi, je n’aurais pas besoin de lire pour le savoir ?

Jésus écrit deux fois (le verbe utilisé la première fois suggère une écriture multiple, le verbe utilisé la seconde suggère qu’il raye – en tout cas on peut le comprendre ainsi). Par ailleurs, le seul à écrire avec le doigt, dans la Bible, c’est Dieu écrivant les Dix commandements sur les tables de pierre. Jésus-Dieu rappellerait-il alors les Dix commandements ? Et s’il efface, qu’efface-t-il ?

Le texte ne dit pas ce que Jésus écrivait. Mais ce qu’il dit convainc de péché tous ceux qui sont là : tous sont adultères par rapport à Dieu, infidèles à ses commandements, infidèles à son amour, comme déjà Osée et les prophètes l’avaient prêché. La Loi n’est pas caduque : elle condamne toujours les pécheurs, que ce soit la femme de ce récit, ou ses accusateurs, ou moi qui lis ce texte. Mais Jésus, lui, est au-dessus de la Loi de Dieu : lui ne condamne pas la femme, il la libère (« va ») et la place sur un chemin où le péché ne dominera plus sur elle (« ne pèche plus »). Si les accusateurs n’étaient pas partis, mais s’étaient humiliés devant Dieu, ils auraient aussi pu entendre pour eux ce salut gratuit. Et moi, est-ce que je l’entends pour moi ? Ou bien vais-je (comme eux) accuser Jésus dès la page tournée ?…

J’ai du mal à accueillir l’autorité de Christ sur Mammon- car trop de logiques et de comportements découlent de ses logiques. Comment lutter contre cela ? [Manu]

Vous posez bien la question : il s’agit effectivement d’une question d’autorité. Confesser que Jésus-Christ est le Seigneur, c’est faire en sorte que le Christ ait autorité sur notre vie, dans toutes ses dimensions.
Il est vrai que Mammon est présent dans bien des compartiments de notre société. Et comme dit en Matthieu 6,24 : « Nul ne peut servir deux maîtres. Car, ou il haïra l’un, et aimera l’autre; ou il s’attachera à l’un, et méprisera l’autre. »
Alors pour accueillir l’autorité du Christ sur toute notre vie et donc pour en chasser Mammon, un chemin nous est offert. Il nous est proposé de confesser Jésus comme seul Seigneur et de demander pardon à Dieu pour avoir donné, consciemment ou pas, autorité à un autre seigneur que Lui. C’est ce qu’on appelle la repentance : se retourner vers Dieu. Et Il entend la confession et pardonne.
Un conseil : Mammon est une puissance, qui comme vous le mentionnez, s’insinue partout. Alors il est utile de rentrer en soi-même et de chercher les lieux où il a pris autorité et dans la prière de repentance de demander pardon à partir de ces éléments précis. Et pour faire ce travail de discernement Dieu nous envoie une aide : l’Esprit saint.

J’avais compris que chaque chrétien qui recevait la Parole de Jésus en son cœur et le reconnaissait comme sauveur- était « baptisé » et rempli du Saint-Esprit. J’aimerais votre éclairage sur ce sujet. [Laure]

Les expériences spirituelles sont nombreuses et diverses. Le texte biblique nous permet de mieux comprendre celles que nous vivons.

Dans la Bible, à la fin de l’évangile selon saint Matthieu, Jésus nous commande de faire de toutes les nations des disciples, en baptisant et en enseignant tout ce qu’il nous a prescrit. Le baptême est donc une mission confiée par Christ à ceux qui l’entourent.

Nous pouvons donc rencontrer Christ (entendre sa voix et dialoguer avec lui), proclamer sa Seigneurie, ressentir la puissance de l’Esprit Saint… sans avoir reçu le baptême !

Mais pour parler de baptême, il est nécessaire de passer par celle dont c’est la responsabilité: la communauté des croyants, l’Eglise ! Cela vous permettra, chère Laure, de vous former avec d’autres sœurs et frères, d’entendre comment Christ leur parle à eux aussi…et de découvrir d’autres aspects de la foi (notamment votre mort et votre résurrection !)

Je suis divorcé remarié et désirerais comme mon épouse communier ! Croyants tous deux ; on m’ a dit que je ne pouvais pas communier ? [Michel]

Je ne puis répondre que pour ce qui concerne l’Église protestante unie : bien sûr que vous pouvez participer l’un et l’autre à la sainte cène, dès lors que vous y entendez l’invitation du Seigneur Jésus.

La communion au corps et au sang du Christ n’est pas faite pour d’hypothétiques « justes », mais pour les pécheurs que nous sommes, et qui reconnaissent avoir besoin de ce que Jésus-Christ a fait pour eux en donnant sa propre vie. C’est-à-dire en ayant donné sa vie sur la croix. Mais aussi en la donnant à chacun de ceux qui communient avec foi, en les remplissant de sa présence et les faisant bénéficier de son alliance.

On a souvent interprété le mot « indignement » par rapport à la morale, à l’observance des commandements (p.ex. celui de l’indissolubilité du mariage). C’est un contresens. Le texte de la première épître aux Corinthiens 11 / 23-29, où figure ce mot, précise, après le rappel de l’institution de ce repas, qu’y participer implique d’y reconnaître le corps du Christ (tant sa présence dans le sacrement que dans l’Église ainsi constituée), et que tous sont donc invités à y manger ! Voilà ce qui nous « qualifie » pour communier : reconnaître Jésus et vouloir recevoir son pardon et sa grâce en participant à la cène.

Comment comprendre cette parole de Jésus à ses disciples en Jean 20,23 : « Ceux à qui vous pardonnerez les péchés- ils leur seront pardonnés ; et ceux à qui vous les retiendrez- ils leur seront retenus » ? [Kristina]

Jésus s’était présenté comme le Maître du Pardon lors d’une polémique avec les religieux de son époque, à l’occasion de la guérison d’un paralytique (Marc 2,5-9). Par là il signifiait au minimum que Dieu lui avait délégué le pouvoir de pardonner les péchés, ou mieux encore, qu’il était Dieu lui-même.

Dans le cas du verset de Jean que vous citez il est probable que l’option de la délégation soit parlante. En effet, Jésus peut faire ce que Dieu peut faire. Il n’y a plus besoin d’attendre la fête annuelle de Kippour pour pouvoir être pardonné de ses péchés, mais on peut tout simplement venir à Jésus pour cela.
Il semble donc que dans un deuxième temps, Jésus délègue lui-même ce ministère aux disciples eux-mêmes. Nous pouvons, disciples du Christ, nous faire les porte-paroles d’un pardon qui effectivement vient de Dieu seul, mais qui par la délégation de Jésus, nous a aussi été transmise.

C’est ce qui fait de nous des agents de réconciliation, comme l’explique bien le chapitre 5 de la deuxième épître aux Corinthiens.
Bonne nouvelle !

Est-ce qu’il est permis de prendre deux femmes ? [Jean-René]

Si la question est « est-ce qu’il est permis ? », la réponse est « non » ! Mais si la question est « qu’est-ce que c’est, l’amour conjugal ? », alors on peut aller un peu plus loin…

Car aussi bien l’Ancien Testament (Genèse 2 / 18. 23-24) que le Nouveau (Matthieu 19 / 3-10 ; 1 Corinthiens 7 / 2-5 ; Éphésiens 5 / 21…) soulignent que l’union selon Dieu d’un homme et d’une femme font d’eux un seul être, chacun appartenant à l’autre et soumis à l’autre. Il n’est donc aucunement question de « prendre femme », mais de se reconnaître comme voués l’un à l’autre, ce qui implique clairement la durée, le pardon mutuel et la fidélité, et donc la monogamie. Car comment appartenir (c’est-à-dire à 100 %) à deux personnes différentes ?! Et qu’en penseraient les femmes en question (car cette question est une question d’homme, or « Dieu a créé l’être humain à son image, mâle et femelle », dit la Bible) ?

La polygamie, tout comme l’adultère, appartiennent à une autre conception de la sexualité, dans laquelle celle-ci ne fonde pas un nouvel être, mais se contente d’être une fonction vitale qu’il s’agit d’assouvir pour son propre plaisir (sexuel ou social). La Bible montre que telle était la réalité, que ce soit à l’époque des Patriarches ou pour les rois d’Israël, mais aussi (peut-être marginalement) à l’époque de Jésus. Ce qui ne le légitime en rien !

Enfin, je dois dire que la question de ce qui est permis ou défendu est dépassée dans le christianisme. Puisque je ne puis être justifié par l’observance de quelque commandement que ce soit, mais par la seule grâce de Dieu manifestée dans la mort et la résurrection de Jésus-Christ et saisie dans la foi, alors c’est l’œuvre de l’Esprit que de conformer ma vie à la volonté bonne de Dieu, malgré et à travers les résistances du « vieil homme » en moi. L’apôtre Paul a écrit à ce sujet de belles choses sur « tout est permis, mais… » (1 Corinthiens 6 / 12 ; 10 / 23)