Avant toute chose, il faut avoir à l’esprit que dans la Bible le mot apocalypse ne signifie pas du tout « atrocités et catastrophes » mais « dévoilement » et qu’il désigne avant tout un genre littéraire qui est celui du dernier livre de la Bible (qui porte son nom) mais pas uniquement (on trouve des apocalypse dans les évangiles et dans le nouveau testament). Pour simplifier, je dirais que c’est un peu la science fiction de la littérature biblique ! Des images très impressionnantes sont employées, mais pas qu’inquiétantes, pour nous dévoiler en fait le mystère de la présence de Dieu au cœur du monde, y compris dans les temps difficiles (mais pas que !). En ce sens, le livre de l’Apocalypse ne décrit pas l’avenir mais le présent de tout croyant aux prises dès maintenant avec l’incompréhension, l’injustice mais aussi l’espérance et la présence de Dieu. A votre question sur les jours meilleurs, ce livre répond au chap 1 par « heureux celui qui lit » et au 22 par « que celui qui a soif reçoive de l’eau vivre gratuitement » : le mystère de Dieu qui se révèle est passé, à venir et aussi présence. Il s’agit de ne se laisser ni désorienter par le mal ni abuser par des images trompeuses, mais de lire, vivre, et croire.
« Laisse les morts enterrer leurs morts- et toi- va annoncer le Royaume de Dieu ». Comment interpréter et comprendre cette parole quelque peu radicale et dérangeante de Jésus ? [Alex]
« Laisse les morts enterrer leurs morts- et toi- va annoncer le Royaume de Dieu ». Comment interpréter et comprendre cette parole quelque peu radicale et dérangeante de Jésus ? [Alex]
… En allant lire le contexte de cette affirmation (Mat 8,22 – Luc 9,60) qui est associée à une réflexion sur « ce que cela signifie que d’être disciple de Jésus ». Jésus pousse les foules qui se pressent à sa suite dans leurs retranchements et nous aide à entendre que le suivre n’est pas affaire de bonne volonté mais de choix radical entre la vie et la mort, et que choisir la vie impose des ruptures. On retrouve exactement cette radicalité lorsqu’il demande à ses disciples de tout quitter pour le suivre. En fait suivre le Christ ne se présente pas dans les évangiles comme une matière à option mais comme un fondement, un choix initial qui oriente ensuite tous les autres. Oui, c’est une parole radicale. Et une façon de nous rappeler que nous sommes tous appelés à dire un vrai OUI à l’appel à la vie qui nous est lancé; pas un « peut-être » « pourquoi pas » « on verra plus tard »…
Puisque les Écritures se suffisent à elles-mêmes (inerrance et infaillibilité) pourquoi avons-nous toujours besoin de sources extérieures pour interpréter et actualiser ? [Christophe]
Bonjour Christophe.
Le mot « inerrance » désigne la conviction selon laquelle l’Écriture sainte ne comporte pas d’erreur dans sa lettre. Quant à l’infaillibilité, il s’agit d’un terme utilisé dans l’Église catholique pour exprimer la conviction selon laquelle il est donné l’Église, en tant qu’institution, et particulièrement au groupe des clercs, avec le pape en tête, de ne pas faire d’erreur doctrinale quand ils s’expriment.
En tant que protestant, je ne peux donc me prononcer que sur le premier mot.
Que je sois persuadé de l’inerrance de l’Écriture ou pas (cette conviction est discutée dans le protestantisme), je ne crois pas que cela signifie que la Bible soit facile à interpréter et à actualiser ! Il est toujours utile de lire les commentaires des théologiens (quand ils arrivent à être moins compliqués que le texte qu’ils commentent !) ou de participer à un groupe d’étude biblique, pour mieux comprendre ce que le texte veut dire. Pour ma part, je crois avant tout que c’est la Parole de Dieu, c’est-à-dire ce que le texte biblique, sous l’action du Saint Esprit, vient me dire dans ma vie personnelle, qui est inerrante. Donc, avant même de lire un commentaire ou de discuter avec d’autres, j’ai besoin de prier, pour demander à Dieu qu’il vienne, par son Saint Esprit, m’aider à recevoir ce qu’Il veut me dire par le texte que je vais lire.
Au regard des textes bibliques, quelle est la différence fondamentale entre l’âme et l’esprit ? [Nath]
La différence entre âme et esprit dans la Bible. Question très complexe et avec plein de conséquences pratiques.
D’abord parce que la Bible est écrite sur 1300 ans et que donc les représentations de ce qu’est l’humain ont énormément varié entre temps. Donc il n’y a pas une seul anthropologie biblique mais plusieurs ! Certains textes sont manifestement plutôt bipartites : ils considèrent que l’homme est corps et souffle (âme et/ou esprit en un seul bloc), et d’autres tripartites (corps, âme, esprit).
Ensuite les termes d’âme et esprit sont plus tirés des représentations gréco-romaines que de la représentation sémitique et hébraïque. En hébreu il y a de nombreux mots pour décrire le souffle, la vitalité, l’âme, l’esprit, tous ces éléments immatériels de l’humain. Et on ne peut pas trancher pour plusieurs si ce serait plutôt âme ou plutôt esprit quand on le traduit en grec.
Après ça, en français, c’est très compliqué parce que :
– dans l’imaginaire post-chrétien les gens pensent que l’âme c’est un truc religieux (et donc spirituel…) alors que l’âme en latin c’est l’anima, donc ce qui est plutôt biologique, intellectuel, affectif, émotionnel. Donc l’inverse. L’anima grecque est la psychè (et donc le psychisme). La « cure d’âme » (curo-anima) a pour parfait synonyme la « psychothérapie » (psychè-therapeuw).
– quand on parle d’esprit, on pense souvent à l’intelligence (faire un mot d’esprit). Mais ça c’est l’esprit qui vient du mot grec noos (la raison, la pensée), tandis qu’il y a un autre mot pour dire esprit dans le Nouveau Testament qui est le mot pneuma (souffle spirituel posé par Dieu dans l’Adam).
Donc le français rajoute un niveau de complexité.
Pour ma part, je pense que la strate de représentation qui avait cours à l’époque de Jésus est celle qui doit intéresser particulièrement un chrétien, car elle est à la charnière entre nos deux racines : sémitique (hébraïque) et héllénistique (grecque). Et que la théologie chrétienne, très influencée par celle de l’apôtre Paul, est une tentative de faire coïncider les incompressibles de ces deux mondes de pensée.
Enfin, c’est surtout une préoccupation pastorale qui me préoccupe. Choisir le tripartisme (corps, âme, esprit), c’est reconnaître qu’il y a des phénomènes psychiques qui sont très différents de phénomènes spirituels, et réciproquement. Que ces deux zones influent l’une sur l’autre mais qu’elles sont distinctes et que les confondre n’aide pas du tout dans la thérapeutique chrétienne qui cherche la guérison au nom de Jésus. C’est donc un principe de théologie pratique qui me fait choisir, dans un panel large de possibles à l’intérieur du corpus biblique, une de ces représentations de l’humain (de l’époque paulinienne), parce qu’elle est performative, elle est opératoire pour la libération de nos frères et sœurs.
« Que le Dieu de paix vous sanctifie lui-même tout entiers, et que tout votre être, l’esprit, l’âme et le corps, soit conservé irrépréhensible, lors de l’avènement de notre Seigneur Jésus-Christ ! » – 1Thessaloniciens 5,23
Pourquoi continuons-nous à célébrer des fêtes chrétiennes (et/ou juives) ? Ca fait un peu célébration saisonnière et païenne- non ? [GiB]
Clairement, les fêtes religieuses peuvent honorer Dieu ou les idoles selon l’esprit qui nous pousse à les célébrer ! Mais dans le doute, abstenons-nous de juger hâtivement…
Les fêtes juives sont bibliques, instituées dans l’Ancien Testament elles ont pour but de glorifier Dieu en se remémorant son action dans l’histoire d’Israël (exemple dans le livre de l’Exode 12, 24-27). Elles n’ont pas un sens seulement social ou « festif », elles servent à communiquer la présence de Dieu avec son peuple et à transmettre l’enseignement de la foi aux générations successives.
Les fêtes chrétiennes ne sont pas instituées bibliquement mais commémorent aussi l’action de Dieu en prenant pour thème des moments importants de la vie de Jésus racontés dans les évangiles (Naissance du Christ , Mort et Résurrection, Ascension…) ou de l’action de l’Esprit (Pentecôte).
L’hypocrisie religieuse et le conservatisme rituel sont clairement des gros problèmes dans le christianisme contemporain. Mais jeter ces occasions pédagogiques d’enseigner l’action de Dieu est-il plus pertinent que d’essayer de leur redonner leur connexion authentique ? Honnêtement, je pense qu’il n’y a pas de réponse univoque… Ni ces fêtes, ni leur dénaturation n’est obligatoire.
Ce que je conseille à chacun, c’est de prier Dieu, d’écouter selon son contexte si fêter peut être une occasion d’édification personnelle ou une occasion d’évangélisation et agir en conséquence, sans jugement et sans mépris. De toute façon, ces fêtes n’ont de sens que si on accepte que Dieu parle et agisse encore aujourd’hui !
Pauvreté- obéissance- chasteté- sont les 3 voeux exigés des moines pour être conformes au Christ. Jésus- vrai homme- fut-il parfaitement chaste? Qu’est-ce exactement que la chasteté selon l’Evangile ? [Jean L.]
Cher Jean, vous avez bien raison, ces trois vœux font partie des règles classiques observées par les moines et les moniales.
Je ne suis pas un spécialiste de ce type de vocation, mais je ne pense pas que l’objectif poursuivi par ces engagements soit d’être conforme au Christ. L’objectif est plutôt que l’individu se soumette à une règle qui le dépasse et par laquelle la communauté monacale affirme qu’ainsi lui et ses frères (ou sœurs !) s’épanouira. Les Réformateurs — et Martin Luther en tête — se sont justement insurgés contre cette pratique des vœux monastiques estimant qu’ils ne se fondent pas sur la Parole de Dieu; bien plus ils la combattent (je vous encourage à lire le petit texte de Luther « Jugement sur les vœux monastiques de 1521 »)
En ce qui concerne la chasteté, je crois qu’il est nécessaire de ne pas la confondre avec l’abstinence. Être chaste c’est être fidèle, sobre, paisible et joyeux quant à notre sexualité, dans l’état qui est le notre. Pour faire simple: on peut être chaste en couple (notamment par la fidélité et l’attention portées à l’autre, en ne le soumettant pas à soi-même) ou en étant célibataire (notamment en étant paisible et non agité quant à sa sexualité).
Cher Jean, puisque vous me demandez un texte biblique, outre les classiques concernant le mariage, je vous recommande tout particulièrement ces deux-là, quitte à être un peu long :
« A cause des risques d’inconduite sexuelle, que chacun ait sa femme, que chacune ait son mari. Que la mari rende à se femme ce qu’il lui doit; de même la femme à son mari […] Ne vous privez pas l’un de l’autre, sinon pour un temps et d’un commun accord, afin de vous consacrer à la prière; puis reprenez votre vie conjugale, de peur que le Satan vous mette à l’épreuve, parce que vous ne sauriez pas vous maîtriser […] [Quant à ceux qui ne sont pas mariés et aux veuves] s’ils ne peuvent se maîtriser, qu’ils se marient; car il vaut mieux se marier que de brûler » 1 Corinthiens 7, 2-3.5.9
« Il viendra un temps où ils [les gens égoïstes, amis de l’argent, fanfarons, orgueilleux, blasphémateurs, rebelles envers leurs parents, ingrats, sacrilèges, insensibles, implacables, médisants, sans maîtrise de soi, cruels, ennemis du bien, traîtres, emportés, aveuglés par l’orgueil, amis du plaisir plus que de Dieu] ne supporteront plus l’enseignement sain; mais au gré de leurs propres désirs, avec une démangeaison d’entendre, ils se donneront maîtres pour maîtres […] Mais toi, sois sobre en tout » 2 Timothée 4, 3-5
Soyez sobre, soyez béni, cher Jean.
Pourquoi Pâques a-t-il pris un S en passant de juif à chrétien ? [Suzy]
Il n’y a pas d’explication certaine. La Pâques chrétienne, la mort et la résurrection du Christ, a bien lieu à l’occasion de la Pâque (d’un mot hébreu signifiant « passage ») juive, et en accomplit pleinement le sens et la portée pour les chrétiens (1Corinthiens 5,7) en libérant l’Homme de la puissance du péché (voir par exemple Romains 6). Il n’y a donc pas de raison de les orthographier différemment. Mais, au Moyen-Age, on constate que le terme est utilisé, en latin, indifféremment au singulier et au pluriel pour désigner les deux fêtes. On rencontre aussi au XVe siècle l’expression « faire ses pâques » pour désigner des pratiques ayant cours à l’occasion de la fête chrétienne. Sans doute que, progressivement, la différence d’usage et d’orthographe a permis de distinguer, en latin puis en Français, les deux fêtes.
Doit-on prendre la sainte Cène tous les dimanches ? [ixix]
Dans le livre des actes qui raconte les pratiques des premiers chrétiens, il est fait mention de réunions quotidiennes pour la communauté de Jérusalem, avec la fraction du pain au domicile (Ac 2, 42-47). Plus tard dans ce même livre, on comprend que la pratique d’autres communautés est de se réunir le dimanche, c’est-à-dire le premier jour après le sabbat, pour notamment « rompre le pain » (Ac 20, 7). Ailleurs dans le Nouveau Testament, on comprend à partir des réprimandes de l’apôtre Paul aux chrétiens de Corinthe que le partage du « repas du Seigneur » fait partie intégrante des réunions de cette communauté aussi (1 Co 20-21).
De ces éléments bibliques là, on doit clairement tirer que c’est une juste pratique de « rompre la pain » ensemble tous les dimanches. Pour autant, si le commandement de Jésus est de partager la coupe et le pain en sa mémoire (Luc 22, 14-20), il n’y a d’abord aucune obligation de sa part liée à la fréquence, deuxièmement aucune obligation concernant la forme « rituelle » que doit prendre ce repas. Jésus a institué ce partage au cours d’un dîner de Pâques avec ses disciples et pas au milieu d’une réunion de prière… Il y a énormément d’éléments culturels dans nos Églises qui nous font souvent penser à tort que « c’est comme ça la manière normale de pratiquer »… certains prennent le repas au début de la réunion, d’autres à la fin, beaucoup le font en dehors d’un « vrai repas », d’autres considèrent que le repas communautaire après le culte fera fonction…
Pour conclure, ne mettons pas de « devoirs » là où le Seigneur a laissé la liberté et concentrons-nous sur l’enseignement de Jésus et le sens de ce repas avant toute réflexion (légitime) sur la forme qu’il doit prendre dans notre assemblée.
Une influence spirituelle négative extérieure est elle réellement à l’œuvre ? Le mal n’est-il pas uniquement dû à la faiblesse humaine ? [Guillaume]
Que le mal existe, c’est notre expérience.
Que le Mal existe, c’est notre croyance, à savoir que le mal est plus qu’accidentel, il est une question philosophique, quelque chose de l’ordre de l’être ; « c’est là ».
Que le Malin existe, c’est la foi biblique à laquelle nous adhérons quand nous sommes chrétiens. Il n’est pas que le mal expérimenté, le Mal philosophique, il est le Malin actif, en rébellion contre Dieu.
Il y a des centaines de versets bibliques pour étayer cette pensée. En voici quelques uns.
1Jean 5:19 – Nous savons que nous sommes de Dieu, et que le monde entier est sous la puissance du Malin.
Matthieu 6:13 – Ne nous soumets pas à la tentation, mais délivre-nous du Malin.
Jean 12:31 – Maintenant a lieu le jugement de ce monde ; maintenant le Prince de ce monde sera jeté dehors.
2Corinthiens 4:4 – Le ‘dieu’ de ce siècle a aveuglé l’intelligence des incrédules, afin qu’ils ne voient pas briller la splendeur de l’Evangile de la gloire de Christ, qui est l’image de Dieu.
Ephésiens 2:2 – Le prince de la puissance de l’air, c’est l’esprit qui agit maintenant dans les fils de la rébellion.
Apocalypse 12:9 – Et il fut précipité, le grand dragon, le serpent ancien, appelé le diable et Satan, celui qui séduit toute la terre, il fut précipité sur la terre, et ses anges furent précipités avec lui.
Un chrétien peut il acheter des produits dits « Hallal » ? [Michèle]
« Ce n’est pas ce qui entre dans la bouche qui souille l’homme ; mais ce qui sort de la bouche, c’est ce qui souille l’homme » Matthieu 15, 11. Donc à priori un chrétien peut consommer un produit hallal (licite, permis).
Votre question porte sur l’achat de ces produits. Il faut savoir qu’en France et dans d’autres pays il y a une taxe supplémentaire ajoutée par des institutions, organisations ou entreprises sur les produits hallals vendus, certifiant qui le sont.
Lorsqu’on achète un tel produit on finance une entreprise privée, liée à la religion musulmane.
La question n’est pas est-ce qu’on peut (est-ce qu’on a le droit), mais est-ce utile lorsqu’on est chrétien de le faire ?
Lorsqu’on mélange religion et argent ou foi et argent, comme le rappelle également Jésus, à propos de servir Dieu et l’argent : on « haïra l’un, et aimera l’autre ; ou [on] s’attachera à l’un, et méprisera l’autre. » Matthieu 6, 24.
Alors oui, on peut en acheter, mais ce n’est pas utile.