Que dit la Bible de l’enfer?

Cela dépend si on entend par « enfer » (qui n’est pas un mot d’origine hébraïque ou grecque, donc il n’est pas étymologiquement biblique) un temps ou un lieu de tourments, sanction de l’injustice, ou bien le « séjour des morts » (Sheol en hébreu, Hades en grec) là où les morts attendent la résurrection (l’ « enfer » en ce sens, comme en français, pouvant dans la Bible avoir un sens métaphorique pour désigner les souffrances de la vie présente, voir par exemple Job 38,14).

Quand il s’agit d’un temps ou un lieu de tourments, après la première mort, lié à l’injustice de chacun, l’ « enfer » (nommé « géhenne » en Matthieu 5, 22.29.30 ; 10,28 ; 18,9; 23, 15.33 ; Marc 9,43.45.47 ; Luc 12, 5 ; Jacques 3, 6) est associé à des souffrances causées par le feu (au « séjours des morts » d’après Luc 16, 23-24). Mais s’agit-il de souffrances éternelles qui suivront le jugement du Christ (voir Matthieu 25,46 où il semble y avoir éternité de la vie pour certains comme du châtiment pour d’autres, ce qui n’est pas le cas en Romains 2, 7-8), temporaires en vue d’une purification (1Corinthiens 3,13) ou d’une destruction (c’est la position dite annihilationiste, justifiable en particulier par Apocalypse 20, 13-21, 8) ?

Pour résumer, l’ « enfer » est décrit ou bien comme un temps d’attente pour les morts, ou bien comme un temps et un lieu de souffrance (« pleurs et grincement de dents » en Matthieu 13,42) par le feu. Il sanctionne l’injustice, et est la conséquence logique d’une vie loin de Dieu qui nous appelle à la vie en plénitude.

Je ne me permettrais pas de trancher si les souffrances en question sont éternelles ou passagères.

Quelle différence y a-t-il entre le baptême par immersion et le baptême  »sec » ? [Elisabeth]

[Note de l’éditeur : il semble que l’appellation « baptême sec » ne soit pas tout à fait claire pour nous. Notre répondant a écrit ici avec l’option que « baptême sec » puisse vouloir dire baptême par aspersion, le baptême effectivement sec (dans un désert par exemple), et la présentation d’enfants.]

Je n’ai pas connaissance d’un baptême « sec » ! À moins de se trouver dans un lieu manquant totalement d’eau, auquel cas le baptême peut être administré par un autre moyen (sable, etc.). Cas peu fréquent puisque le baptême n’est pas « magique », n’a donc pas besoin d’être administré dans l’urgence…

Il y a plusieurs manières d’administrer le baptême, sans que le sens en soit changé. Notamment par immersion totale du baptisé, ou bien par aspersion d’eau, ce mode-ci étant simplement plus commode que l’autre, et développé à partir du moment où l’on a commencé à baptiser les enfants en bas âge des fidèles. Il est important alors que le baptisé, en fonction de son âge, ait le sentiment d’une noyade, puisque c’est le sens du baptême en tant que geste : noyé dans la mort avec le Christ, et retiré de la noyade par sa résurrection. (Romains 6 / 4)

Dans certaines Églises (dont les Églises réformées dans l’EPUdF), une remise en cause du baptême des petits enfants dans les années 1950 a entraîné la remise à l’honneur d’une « présentation » à Dieu et à l’Église (à la fois bénédiction et prière) des petits enfants dont le baptême était reporté à l’âge adulte, les parents prenant l’engagement de témoigner de l’Évangile auprès de l’enfant. Ce n’est donc pas un « baptême sec », mais tout à fait autre chose. Le baptême reste le baptême, quel que soit l’âge du baptisé : c’est l’engagement de Dieu envers lui en Jésus-Christ, appelant une réponse de foi de la part du baptisé. Le « rôle » central n’y est pas tenu par le baptisé, même adulte, mais par le Saint-Esprit.

Dans mon souvenir d’enfance, mon grand-père nous faisait le culte du dimanche matin. La qualité de ce culte était-elle affectée du fait qu’il n’était titulaire d’aucune ordination ? [Laurent]

Bien sûr que non. C’est bien la grande tradition protestante que le premier lieu de la spiritualité chrétienne communautaire soit la famille. C’est là qu’on fait l’expérience de la lecture régulière de la Bible, qu’on apprend à la connaître et à l’aimer, à y entendre une parole de Dieu pour aujourd’hui.

Le culte « paroissial », c’est autre chose. De tout temps les protestants luthéro-réformés ont considéré qu’il fallait une formation universitaire à leurs pasteurs (d’où d’ailleurs la robe noire, robe d’universitaire et non habit liturgique). Cette formation, certes, ne suffit pas, mais est nécessaire ; aujourd’hui c’est en France un master pro (bac + 5). Il faut aussi que l’Église (pour nous, l’EPUdF) reconnaisse que la personne considérée sera humainement, psychologiquement, spirituellement, capable d’exercer le ministère pastoral dans une Église locale concrète.

« L’ordination – reconnaissance de ministère » signifie alors l’action de grâce et la prière pour le nouveau ministre. Elle permet sa reconnaissance non seulement dans l’Église locale où il exercera ce ministère, mais dans toute l’Union à laquelle celle-ci appartient, et dans toutes les autres Églises avec lesquelles elle est en relation. Ainsi, si un père de famille (pour parler comme autrefois) est pasteur de son foyer, si un prédicateur dit laïc peut exercer ce ministère occasionnellement et être reconnu localement, voire régionalement, un pasteur « ordonné – reconnu » l’est universellement.

On pourrait aussi, à propos de « qualité », s’interroger sur le sens de la prédication (c’est elle qui fait que c’est un culte) pour ceux qui l’entendent : actualisation, compréhension, témoignage personnel, etc. C’est une des fonctions de la formation universitaire comme des stages professionnels que de se poser la question, afin que ce soit bien la parole de Dieu qui retentisse, le Christ lui-même qui soit communiqué aux auditeurs.

Pourquoi, chez les protestants de l’EPUdF, n’y a-t-il pas Sainte Cène toutes les semaines (Jean 6 / 51-58) ? [Muriel]

Les traditions protestantes (c’est-à-dire les différentes interprétations de la Parole de Dieu reçue à travers la Bible) ne sont pas unanimes. Chez les luthériens et les calvinistes, le Christ se rend réellement présent dans la sainte cène pour ceux qui communient avec foi. Pour certains (notamment les luthériens) cela implique la célébration de la cène à chaque culte (tout au moins si c’est un pasteur ordonné qui préside). Pour d’autres, l’importance de cette célébration suppose qu’on en use moins souvent afin de ne pas la banaliser. Par ailleurs, il y a dans ces traditions des fidèles de sensibilité soit évangélique, soit libérale, pour qui la cène est simplement une commémoration, une image de ce que le chrétien est nourri spirituellement.

L’Église protestante unie de France est une Église unie, comme son nom l’indique : elle rassemble des sensibilités différentes autour d’affirmations communes (notamment contenues dans la « Concorde » dite de Leuenberg, entre Églises luthériennes, réformées et méthodistes d’Europe). Historiquement, les Églises réformées en Suisse et en France ne célébraient la cène que trois ou quatre fois l’an, contre l’avis de Calvin. C’est petit à petit que cette célébration est devenue plus fréquente, au moins une fois par mois depuis le milieu du XXe siècle, souvent plus aujourd’hui.

Il faut remarquer que nulle part la Bible n’indique une périodicité. S’il est clair que la sainte cène est toujours une célébration communautaire (jamais individuelle), rien ne dit qu’elle doive être hebdomadaire, voire quotidienne. Pourtant, ce qui est dit du culte chrétien dans le Nouveau Testament semble supposer que la cène y était célébrée chaque fois… Le texte que vous mentionnez ne dit rien là-dessus, il dit le sens de ce que représente la cène. On pourrait citer aussi des extraits des chapitres 10 et 11 de la première épître aux Corinthiens, sans parler des récits de la cène dans les évangiles synoptiques.

Au niveau purement doctrinal, qu’est-ce qui distingue les Attestants des évangéliques ? [Sylvie]

Les Attestants sont tout d’abord des membres de l’Eglise protestante unie de France.
Ils sont donc soit issus de la branche luthérienne, soit de la branche réformée.
L’EPUdF est très diverse théologiquement.
Le monde évangélique aussi.
Les Attestants aussi.

Différences

Il y a par exemple parmi les Attestants des gens qui se reconnaissent dans l’expression charismatique, et d’autres pas du tout. Il y en a qui sont très dans une grande orthodoxie théologique et d’autres moins. Les Attestants sont donc très divers et plusieurs ne se sentiraient pas du tout bien si on les appelait évangéliques (au sens des evangelicals nord-américains). A d’autres cela ne poserait pas de problèmes.

Points communs

Les Attestants sont confessants, c’est-à-dire qu’ils considèrent qu’on ne peut pas pousser le libéralisme théologique trop loin et qu’il y a des fondamentaux de la foi qui ne sont pas négociables : Jésus comme Fils de Dieu, la Trinité, l’impératif de la repentance, l’adhésion par la foi pour concevoir la plénitude de la grâce première, autorité des Ecritures bibliques pour la foi et la vie… etc.

Espérance

Mais les Attestants sont surtout heureux d’être dans l’Eglise porteuse des deux racines principales de la Réforme (luthérienne et calvinienne), dont ils ne voient pas pourquoi ils auraient à l’abandonner (comme on le leur a proposé) pour rejoindre d’autres Eglises, sachant que la foi des Attestants ressemble à ce qui a toujours été la foi de cette Eglise jusqu’à la fin du XXème siècle.

Un pasteur m’a expliqué que Jésus n’a pas ressuscité physiquement- mais qu’il est ressuscité spirituellement (dans nos cœurs). Votre avis ? [Tony]

Quand j’accompagne des familles pour des obsèques, je vois souvent les Pompes Funèbres faire de leur mieux pour consoler les endeuillés avec des formules du genre : « il est encore là, vivant, dans vos cœurs et dans vos souvenirs… ». Mais il y a bien une différence entre la mémoire que j’ai de ma grand-mère et la résurrection de Jésus-Christ ! Les chrétiens ne commémorent pas simplement un mec génial en essayant de prolonger quelques unes de ces idées, ils croient que Jésus de Nazareth est sorti du tombeau pour régner et ouvrir les portes d’un Royaume réel. La vérité historique et physique de cet événement est le gage d’une relation avec un Dieu vivant, car sinon la foi ne serait que phantasme, autosuggestion et idéologie (même pleine de bons sentiments et efficace pour consoler).

Du point de vue des auteurs bibliques, il est non seulement clair qu’ils ont compris la résurrection comme historique et physique, mais en plus, ils ont jugé nécessaire de donner des éléments pour interdire une compréhension uniquement symbolique de leurs récits. Matthieu rapporte carrément une polémique anti-chrétienne qui dit que les chrétiens ont volé le corps de Jésus dans le tombeau (Matthieu 28, 11-15). Jean rapporte la rencontre de Jésus avec Thomas où il lui offre la possibilité de le toucher physiquement (Jean 20, 24-29). Paul argumente contre des conceptions de certains chrétiens de la communauté de Corinthe qui pensent qu’il est possible d’être chrétien sans croire la résurrection de Jésus (1 Corinthiens 15).

A ce niveau là, la réduction symbolique de la résurrection de Jésus n’est pas une interprétation possible des textes bibliques. Le Nouveau Testament évoque clairement une compréhension historique et physique de la résurrection. Cette résurrection a évidemment beaucoup de force symbolique et spirituelle, mais celui qui veut s’en tenir à une résurrection symbolique ou spirituelle « dans son cœur » doit être conscient qu’il remet en cause le témoignage des apôtres et des textes bibliques. Ce n’est tout simplement plus la Bonne Nouvelle « par laquelle vous êtes sauvés » (1 Co 15, 2).

La Genèse indique qu’Elohim créa le soleil, la lune et les étoiles au quatrième jour. Comment y eut-il donc trois jours avant la création du soleil (il y eut un soir et un matin) ? [Fphoto]

Le premier chapitre de la Genèse et de toute la Bible est un texte très riche, plein de significations. Des milliers de pages de commentaires ont été écrits à son propos par les croyants, juifs ou chrétiens, depuis que ce texte est lu et médité.

Lorsqu’on regarde (je dis bien : regarde, comme un tableau) comment le texte raconte la parole créatrice de Dieu, on peut voir deux images : le temps et l’espace, avec chacun son sommet, son but : respectivement le shabbat et l’être humain.

L’image « temporelle » structure l’ensemble des 7 jours, elle est donc au début (la lumière), au milieu (les astres qui donnent le calendrier), à la fin (le shabbat). L’image « spatiale » occupe les 4 autres jours (4 comme les directions de l’espace !) : l’inanimé les 2e et 3e, l’animé les 5e et 6e, avec l’être humain en dernier, pour dominer et user de ce qui peuple ces 4 jours. Il est l’image, le représentant de Dieu sur terre. Dieu, lui, est en-dehors du temps et de l’espace (qu’il a créés), il est le maître de l’Histoire.

Dans ce tableau qui dit une parole très puissante sur ce que nous sommes (les maîtres de l’espace, mais seulement par délégation) et ce que nous ne sommes pas (les maîtres du temps), ce qui vient en premier, c’est donc la lumière, sur laquelle nous n’avons aucune prise. Elle est comme la condition de possibilité de tout le reste, c’est elle qui fonde le jour (« jour un » et non premier), elle provient directement de la parole du Créateur, et non pas d’une de ses créatures comme soleil ou lune. Les juifs disent que cette lumière, c’est la Torah. Les chrétiens disent que c’est le Christ, à la différence que lui n’est pas créé, mais engendré. Ces lectures proviennent entre autres de Proverbes 8 / 22-31 et de Jean 1 / 1-18.

La lumière et la chronologie qui viennent des astres vont fonctionner dans le monde créé, tandis que la lumière du « jour un » (comme Dieu est un) éclaire l’acte créateur lui-même. Ainsi, celui qui vit dans ce monde-ci et qui vit sous la Loi profite de la lumière du soleil et travaille six jours avant de se reposer. Tandis que celui qui vit en Christ dans le Royaume vit de la lumière originelle et se repose en Dieu avant d’accomplir quoi que ce soit. En lui, ne sommes-nous pas une nouvelle création ? (2 Cor. 5 / 17 ; Galates 6 / 15)

Dans la Genèse, Dieu a dit : « L’homme quittera son père et sa mère… » Pourquoi par la suite Dieu a-t-il permis aux prophètes ou aux rois d’avoir plusieurs épouses ? [Curtis]

Dans les deux premiers chapitres de la Genèse, c’est le projet de Dieu pour l’être humain, homme et femme, qui est évoqué, c’est de leur vocation qu’il s’agit, ce à quoi Dieu les appelle (nous appelle). Mais ce que nous sommes aujourd’hui, c’est le chapitre 3 qui le montre : des êtres coupés de Dieu, prétendant décider par nous-mêmes de ce qui est bon ou mauvais. C’est-à-dire aussi des êtres de pouvoir et non pas d’amour comme Dieu l’avait voulu (et le veut toujours). La manière dont les humains, à travers toutes leurs différences culturelles, vivent la sexualité et la conjugalité, y compris monogame, ne fait que refléter cette réalité d’une manière ou d’une autre.

Ce que toute la Bible montre, c’est que Dieu ne se satisfait pas du péché, mais qu’il fait avec. C’est le sens-même de l’incarnation du Fils de Dieu. C’est le sens-même de la mort de Jésus. En attendant que cette victoire soit pleinement consommée, Dieu prend – et utilise – les gens tels qu’ils sont.

Dans l’histoire de David et de la femme d’Urie (2 Samuel 11 et 12), ce n’est pas sa polygamie qui est reprochée à David, mais son adultère, le fait d’avoir d’une part considéré une femme comme quelque chose qu’on peut s’approprier, et d’autre part d’avoir éliminé l’obstacle en faisant tuer le mari ! Et lorsque Dieu envoie Osée se marier avec une prostituée (Osée 1 / 2), puis avec une femme adultère (3 / 1), c’est pour un geste prophétique, une parole de condamnation incarnée dans la vie du prophète lui-même : il suffit de lire le livre pour le comprendre. Le prophète n’est qu’un porte-parole de Dieu, non seulement par sa bouche ou sa plume, mais par toute sa vie.

Ainsi Dieu n’a-t-il pas « permis » la polygamie, mais d’une part les hommes ne lui ont pas demandé son avis (y compris les croyants, même Abraham !), et d’autre part cette infidélité à la vocation du couple selon Genèse 2 lui a-t-elle servi à dire à son peuple sa propre infidélité, pour l’appeler à s’en repentir pour revenir à Dieu.

Enfin, dans le Nouveau Testament, il n’y a pas plus de condamnation de la polygamie que dans l’Ancien, même si tout ce qui est dit dans toute la Bible sur la conjugalité implique la monogamie (c’est d’ailleurs celle-ci qui s’imposera finalement dans les sociétés travaillées par la Bible). Il est seulement demandé aux pasteurs ou évêques, et aux anciens ou diacres, d’être « maris d’une seule femme » (1 Timothée 3 / 2. 12 ; Tite 1 / 6).

La Sainte Cène- sa signification : qui peut la prendre- à quelle fréquence- pourquoi est-elle si importante ? [Isabelle]

« Faites cela en mémoire de moi » dit Jésus lorsqu’il a remercié Dieu pour le pain et le vin lors du repas pascal précédant son arrestation.
L’apôtre Paul explique que chaque fois que nous prenons la Cène ainsi nous annonçons la mort du Seigneur jusqu’à ce qu’il vienne (1 Corinthiens 11)

La Cène est importante car elle est porteuse de cette parole pour moi et pour la communauté avec laquelle je la partage. Elle vient inscrire en chacun de nous, au plus profond de notre être, la réalité de notre salut. C’est pourquoi ô combien il est important de mettre sa foi en ces paroles.
Dans son Petit Catéchisme, à la question « Qui reçoit dignement ce sacrement? » le Réformateur Martin Luther dira « Jeûner et se préparer corporellement est assurément une bonne discipline extérieure; mais celui-là est vraiment digne et bien préparé, qui ajoute foi à ces paroles: Donné et répandu pour vous en rémission des péchés. Celui qui ne croit pas à ces paroles ou qui doute est indigne et non préparé. Car ces mots: « Pour vous » exigent absolument des cœurs croyants« .

Pour la fréquence cela dépend de nombreux facteurs chère Isabelle: la règle de votre communauté et votre propre soif de ce sacrement, en étant, me semble-t-il les deux principaux.

Je vous laisse également regarder nos autres réponses sur cette question de la Cène: ici et .

Et la souffrance- la maladie- la mort d’enfants ? [Dom]

Je n’ai pas de réponse toute faite à cette question, Dom. Je n’en ai jamais entendue de satisfaisante, à titre personnel. Je ne sais pas si vous êtes vous-même confronté(e) à cette déchirure (c’est comme cela que j’en parlerais, plutôt que comme une question). Ce qui est certain, c’est que ma foi n’est pas une réponse à cela.

J’ai rencontré le Dieu vivant, en expérimentant son amour insondable, sa tendresse infinie et sa miséricorde sans borne. Je l’ai fait dans les limites de mon expérience personnelle, pas au bout d’une réflexion philosophique abstraite portant sur le problème que l’on énonce souvent par : « Si Dieu existe, pourquoi le mal ? » Pour moi, Dieu n’est pas un concept philosophique qui trouverait sa place dans le système d’explication du monde que je pourrais utiliser en cas de problèmes ou de souffrances, pour trouver la solution. Ma foi en Dieu n’est pas une explication à un problème, elle est le fruit d’une rencontre, que j’ai faite dans la prière et la lecture de la Bible, dans un chemin semé de moments de repentances personnelles. Dès lors, les déchirures comme celles de la mort d’un enfant ou la souffrance dans la maladie demeurent, avec leur brûlure. Mais, en tirant expérience de l’attitude des amis de Job, quand je rencontre une personne qui subit une déchirure pareille, je crois que le mieux n’est pas de lui parler de Dieu, mais de lui assurer de ma présence fraternelle, silencieuse peut-être, afin qu’elle puisse expérimenter, si telle est la volonté du Seigneur, cette rencontre avec l’Amour sans borne. Qu’elle puisse dire au bout du compte à Dieu : « Mon oreille avait entendu parler de toi, mais maintenant mon œil t’a vu. » (Job 42.5)