Est-il juste et biblique de faire la distinction suivante : A l’Etat la mission d’assurer la stabilité et la prospérité de la nation ; à l’Eglise celle de s’occuper seule des migrants ? [Philippe]

Dans la perspective biblique, l’autorité de l’Etat lui est déléguée par Dieu pour assurer le bien-être de tous, la justice, bref garantir à chacun liberté et protection éventuelle des plus faibles contre les plus forts, violents, exploiteurs, et autres oppresseurs. Lire par exemple Romains ch.13… Parmi les faibles et les opprimés aujourd’hui, il y a aussi ceux et celles qui, obligés de fuir dictatures, persécutions ou misères se voient déboutés du droit d’asile pour des raisons souvent électoralistes, notamment dans notre pays qui vient de durcir ses conditions d’accueil. Il est clair que les chrétiens (Eglises, associations) ne suffiront pas à la tâche pour suppléer à cette défaillance de l’Etat à assurer la justice, et heureusement que bien des non-croyants viennent en aide à ces gens en détresse sur la simple base d’un devoir d’humanité !

Nous devons donc respecter les personnes investies d’autorité (gouvernement, élus, magistrats, forces de l’ordre, etc), prier pour elles, mais aussi ne pas hésiter à les interpeller, voire à leur résister (pacifiquement bien sûr) quant elles dérogent au mandat qui est le leur. D’autre part, je voudrais lever une ambiguïté dans la formulation de votre question : en quoi la stabilité et la prospérité d’une nation seraient-elles menacées par une politique généreuse d’accueil et d’intégration ? Ceux qui bravent mille dangers et endurent mille épreuves pour parvenir en Europe constituent une élite profitable aux pays d’accueil. C’est ce que Louis XIV a oublié en révoquant l’Edit de Nantes, en 1685 : des centaines de milliers de protestants sont allés enrichir la Suisse, l’Allemagne, les Pays-Bas, etc. de leur savoir-faire et de leur dynamisme.

Je viens de lire dans la Bible que Jésus, ayant rendu l’âme, est allé trois jours en… enfer ! avant de ressusciter. Mais pourquoi donc ? Pourquoi Lui ? [Michel]

Ce dont témoignent les Ecritures c’est que Christ est réellement mort et ressuscité au bout de trois jours. Où était-il ? Vraisemblablement dans l’hadès en grec (Actes 2,27), c’est-à-dire au séjour des morts, dans les profondeurs de la terre (Matthieu 12,40, Ephésiens 4,9). Le credo (symbole des apôtres) affirme qu’il est « descendu aux enfers », c’est-à-dire effectivement au séjour des morts, à ne pas confondre avec ce que l’on entend habituellement par « enfer » au singulier, qui est la destination des Hommes après le jugement (le « lac de feu » en Apocalypse de 20,14, «  la géhenne » en Matthieu 25, 41). Malheureusement, les traductions de Bible ne rendent pas toujours compte des différences entre « les enfers » et « l’enfer ». Christ serait donc descendu jusqu’à ce lieu où les morts sont en attente de ce jugement qui déterminera leur destination éternelle. Pourquoi cela ? 1Pierre est à ce sujet assez énigmatique… on trouve l’idée selon laquelle Jésus après sa mort aurait prêché  « à des esprits en prison » (3,19), « aux morts » (4,6). Mais le sens de ce passage est très controversé (prédication à des anges déchus ? Aux Hommes qui ont été condamnés au moment du déluge ?…). Mais ce qui est me semble-t-il important c’est que, là où il est placé dans le credo, l’affirmation selon laquelle Jésus est descendu aux enfers rappelle la réalité de sa souffrance et de sa mort. Si Christ a subi de telles souffrances, de telles épreuves, une mort si réelle jusqu’à faire l’expérience du séjour des morts, et qu’il en a été libéré par la résurrection, alors ceux qui sont en union avec Lui peuvent être assurés de pouvoir expérimenter la même libération des souffrances, des épreuves et de la mort. Mort qui, dans la Bible, désigne bien plus que la mort physique, mais tout ce qui au fond nous sépare de notre Créateur et de la vie à laquelle Il nous appelle. Christ a accompli cette œuvre salvatrice, acte d’amour (Romains 8, 39) car tel était le plan de Dieu (Galates 4, 4-7).

y a-t-il une différence entre les justes dont Jésus-Christ parle en Mathieu et ceux qui ont cru en Lui (chrétiens- élus) ? [Jean-Claude]

Je crois qu’il s’agit des mêmes ! Jésus,dans l’Evangile selon Matthieu, attend de ses disciples qu’ils pratiquent la justice, c’est à dire vivent en conformité avec la volonté de Dieu. C’est exigeant. Parfois on a essayé de contourner cette exigence en expliquant,par exemple, que ceux qui seront reconnus justes à la fin des temps, qui auront visité, nourri  ou habillé les « plus petits des frères » de Jésus (voir Matthieu 25,31-46) seront les non-chrétiens qui auront fait bon accueil aux envoyés du Christ, donc aux croyants. Mais ces interprétations sont fragiles, et se heurtent à la mise en garde du Seigneur : « si votre justice ne surpasse pas celle des pharisiens, vous n’entrerez pas dans le Royaume » (Mt 5,20) et à bien d’autres paroles semblables. Croire en Jésus, se convertir, c’est changer de vie ! C’est impossible à vues humaines, il est vrai. Mais le Seigneur nous promet son aide. Il ne s’agit pas de mériter, d’acheter notre Salut, bien entendu. Mais il s’agit de manifester que nous appartenons désormais au Seigneur.

Je suis chrétien et j’aime Dieu. Dois-je arrêter d’écouter les musiques du monde ou je dois écouter avec modération ? [Mike]

Certains tirent de la description du culte de l’Ancien Testament que la musique a été créée par Dieu pour l’adoration du vrai Dieu. Les musiques du monde seraient donc forcément attachées à des idoles. Personnellement, et parce qu’aucun commandement ni aucun passage ne traite directement du sujet, je considère que la musique est un moyen d’expression. Elle peut être employée pour louer Dieu , pour promouvoir des idoles, pour faire du bien, pour faire du mal ou encore pour exprimer, simplement, ce qui est en l’humain qui en joue. C’est ainsi à nous d’exercer notre discernement, et d’écouter la musique que nous rencontrons avec des oreilles chrétiennes. Nous pouvons discerner et repousser ce qui nous invite à mal croire ou à mal agir. Nous pouvons être édifiés par des auteurs non chrétiens qui expriment les difficultés d’une humanité qui a besoin de Dieu. Nous pouvons, enfin, user de la musique contemporaine pour comprendre nos contemporains, et rendre ainsi plus pertinent notre témoignage. Il reste important de connaître nos limites et de ne pas écouter ce qui pourrait nous entraîner ou entraîner d’autres loin de Dieu. Ainsi, si avant d’être chrétien, j’avais des comportements violents liés à quelques chansons de rap, il vaudrait peut-être mieux éviter ce genre de musique. De la même manière, si je suis dans un milieu chrétien qui a une conception étroite de la musique, il vaut mieux pour moi m’abstenir de choquer mes frères et soeurs. Le chapitre 14 de l’épître aux Romains éclaire probablement la question de la musique, quand elle parle de la viande, qui était alors sacrifiée aux idoles. Rien n’est impur en soi, les chrétiens peuvent donc en consommer, si cela ne les entraîne pas loin de Dieu.

Pourquoi Jésus dit-il à la femme adultère : « Je ne te condamne pas- va- ne pèche plus » alors que notre condition fait que nous sommes toujours pécheurs ? Ça peut être angoissant… [Manu]

Cela serait angoissant si Jésus avait dit à la femme adultère : ne sois plus pécheur, parce qu’alors, cela n’aurait pas été possible avant la fin des temps.Jésus dit plutôt à cette femme « ne pèche plus ». Il désigne ainsi le péché qui vient d’être dévoilé et pardonné : son adultère. En dévoilant le péché, en donnant le pardon, Jésus donne à la femme la liberté de ne pas commettre de nouvel adultère. Cette femme continuera certainement, comme nous tous de commettre des péchés mais si elle laisse Dieu agir elle pourra vivre le pardon en Christ et voir son comportement changé par le Saint-Esprit. Ainsi, Luther disait que nous étions à la fois pécheurs et saints. Pécheurs parce que notre humanité nous contraint à commettre des péchés. Saints parce que notre relation à Jésus nous ouvre au pardon qui nous libère et nous permet d’être changés.
2 Corinthiens 3 « Or, le Seigneur c’est l’Esprit; et là où est l’Esprit du Seigneur, là est la liberté. Nous tous qui, le visage découvert, contemplons comme dans un miroir la gloire du Seigneur, nous sommes transformés en la même image, de gloire en gloire, comme par le Seigneur, l’Esprit. »

D’où vient le baptême par aspersion ? Pourquoi certaines Eglises le refusent ? Que dit l’Ecriture sainte là-dessus ? [Kym]

Le verbe « baptiser » signifie « plonger ». Jésus et les premiers chrétiens ont indéniablement été baptisés par immersion. C’est ce geste d’être plongé puis ressorti de l’eau qui donne tout son sens au baptême. Ainsi, le moment où le baptisé est sous l’eau dit la mort au péché. Le moment où il en est sorti dit la vie nouvelle donnée en Christ et alors reçue par le candidat. Ainsi, Colossiens 2/12 : « ayant été ensevelis avec lui par le baptême, vous êtes aussi ressuscités en lui et avec lui, par la foi en la puissance de Dieu, qui l’a ressuscité des morts. » Romains 6/3-4 « Ignorez-vous que nous tous qui avons été baptisés en Jésus-Christ, c’est en sa mort que nous avons été baptisés? Nous avons donc été ensevelis avec lui par le baptême en sa mort, afin que, comme Christ est ressuscité des morts par la gloire du Père, de même nous aussi nous marchions en nouveauté de vie. »

C’est parce que la Bible parle uniquement d’un baptême d’immersion que certaines Eglises considèrent que le baptême par aspersion n’est pas valable. Les Eglises qui le pratiquent, en revanche, considèrent que ce type de baptême est une forme valable de baptême. Cette reconnaissance  est ancienne puisqu’il en est question dans la Didachè, texte d’instruction rédigé pour les chrétiens de la fin du premier siècle qui parle d’aspersion possible en cas de problème « technique » concernant la possibilité d’immerger le baptisé : VI/1-2 « 1. Quant au baptême, baptisez ainsi : après avoir proclamé tout ce qui précède, baptisez au nom du Père, du Fils et du Saint Esprit dans de l’eau vive (courante). 2. – Mais, si tu n’as pas d’eau vive, baptise dans une autre eau; si tu ne peux pas (baptiser) dans l’eau froide, que ce soit dans l’eau chaude. Si tu n’as ni l’une ni l’autre (en quantité suffisante), verse trois fois de l’eau sur la tête au nom du Père, du Fils et du Saint Esprit. »

 

Que dit la Bible d’une affirmation comme celle-ci : « On peut faire du mal autour de soi sans faire d’erreur » ? [Michel]

Voici ce que Paul affirme, dans la lettre aux Romains 7/18-25 : « Oui, je le sais, le bien n’habite pas en moi, je veux dire en moi qui suis faible. Pour moi, vouloir le bien, c’est possible, mais faire le bien, c’est impossible. En effet, le bien que je veux, je ne le fais pas, et le mal que je ne veux pas, je le fais. Si je fais ce que je ne veux pas, ce n’est pas moi qui agis, mais c’est le péché qui habite en moi. Ainsi, je découvre cette loi : quand je veux faire le bien, c’est le mal qui se présente à moi. Au fond de moi-même, la loi de Dieu me plaît. Mais je trouve dans mon corps une autre loi, elle lutte contre la loi avec laquelle mon intelligence est d’accord. Cette loi me fait prisonnier de la loi du péché qui est en moi. Me voilà bien malheureux ! Qui va me libérer de ce corps qui me conduit vers la mort Remercions Dieu par Jésus-Christ notre Seigneur ! »

Nous ne pouvons pas faire le bien erreur ou pas. Ainsi, bien attentionnés ou non, nous sommes indéniablement pécheurs. L’expérience ne nous dit pas autre chose. Ainsi, alors que je désire bien faire et ne me trompe pas sur ce qui est bon, je n’arrive pas toujours à le faire. Prenons un exemple : j’ai raison de croire que je ne dois pas mentir. Certaines circonstances m’y pousseront pourtant. Je peux aussi penser qu’une chose est bonne et l’accomplir alors qu’elle ne l’est pas, parce que je suis incapable de mesurer parfaitement la portée de mes actes. Ainsi, je vais donner des stylos pour des écoliers pauvres d’un pays lointain et penser que je fais bien. En réalité, à cause de mon don, les stylos locaux cesseront de se vendre et je participerai à la misère de ceux dont c’était le travail.
Déprimant ? Non, car nous avons un Sauveur ! Le texte continue (Romains 8/1-2) : « Il n’y a donc maintenant plus aucune condamnation pour ceux qui sont en Jésus-Christ. En effet, la loi de l’Esprit de la vie en Jésus-Christ t’a libéré de la loi du péché et de la mort ».

Il ne s’agit donc pas aujourd’hui de ne pas faire d’erreur, mais de nous laisser reprendre, pardonner et conduire par Dieu !

Que penser de l’évangile inclusif- dont le film « come sunday »- se veut le porte-parole ? [Martialis]

Jésus a annoncé la proximité du royaume à tout le monde : les femmes, les hommes, les riches, les pauvres, les faibles, les puissants, les malades, les pécheurs, etc… Pas besoin de qualificatif au mot évangile pour dire que tous les hommes sont concernés par la rédemption en Christ ! La Bonne Nouvelle est à annoncer à tous et c’est l’impératif catégorique et fondateur de l’Église puisque la réception de cette Bonne Nouvelle est nécessaire au salut.

Mais pourquoi alors l’adjectif « inclusif » est-il utilisé pour qualifier un mouvement particulier en ce qui concerne l’annonce de l’Évangile ? Dans certains milieux, le mot « inclusif » est utilisé particulièrement en ce qui concerne les personnes qui se reconnaissent « LGBTQ » (Lesbiennes, gays, bi, transgenres et queer). Parfois l’inclusion est une revendication étendue à d’autres « communautés » considérées marginalisées. Parfois, c’est une nouvelle manière de parler du « salut universel » (doctrine étrangère au Nouveau Testament qui enseigne le salut de tous les hommes indépendamment de la foi de ceux-ci).

Ce qu’il y a de bon à retenir de toutes ces revendications actuelles, c’est que nous avons toujours des points aveugles qui peuvent nous amener à stigmatiser (parfois inconsciemment) des personnes dont les questions ou les sensibilités nous sont étrangères. Il est bien vrai que l’apôtre Pierre a mis du temps à comprendre comment accueillir les grecs par exemple… Paul a exprimé maintes fois qu’il était sensible à l’environnement de ses interlocuteurs pour leur annoncer l’Evangile dans leur propre contexte. L’évangélisation et la pastorale ne peuvent pas être déconnectées du don d’empathie pour les hommes et les femmes ! En revanche, il faut se prémunir contre la confusion engendrée par les revendications des mouvements contemporains émotionnels qui culpabilisent les chrétiens. Bibliquement, il est clair que tous les hommes sont aimés de Dieu, mais nombre de leurs pensées, de leurs comportements et de leurs choix de vie témoignent d’une sorte de  rébellion à l’égard du créateur. Ce sont des chemins de mort et c’est de ça que Dieu veut les arracher ! Jésus a aussi enseigné que le chemin du salut était étroit et qu’il y aurait des pleurs et des grincements de dents. Il est la seule voix, l’unique vérité, le salut n’est qu’en Lui.

Que penser de Taizé et de son évolution ? Comment un protestant peut-il (ne pas) s’y retrouver ? [Gilles]

Taizé est tout d’abord une communauté de frères qui voulaient vivre leur foi chrétienne dans le cadre de l’expérience monastique. Ces frères d’origines protestante et catholique entendaient se centrer sur Christ tout en revisitant un profond héritage de l’Église (le choix de la Bourgogne et la proximité de Cluny n’est pas un hasard!). Le choix œcuménique de la communauté est aussi né des espoirs de la génération Vatican II d’un christianisme centré sur Christ et non sur des églises au sens dénominationnel. Par la suite, ce lieu est devenu un repère international pour des jeunes en recherche spirituelle. La vie simple et rustique, le rythme cultuel et la grande bienveillance des frères ont favorisé l’incroyable croissance de ce mouvement.

Comme pour tous les mouvements, il faut garder autant d’esprit critique que de capacités à reconnaître ce qui est bon. Aujourd’hui encore, de nombreux jeunes font à Taizé leur première rencontre avec la prière ou la lecture personnelle de la Bible. C’est un lieu ecclésial où beaucoup sont impressionnés par la possibilité d’une vie fraternelle, dépouillée, rythmée par la méditation de l’Écriture, la prière et la louange.

D’un autre côté, l’ambition oecuménique de la communauté souffre des mêmes piétinements que le mouvement né de Vatican II. On peut y trouver le risque de privilégier l’unité des institutions ecclésiales à l’ambition jadis prophétique de l’unité en Christ. Si l’unité recherchée apparaissait comme trop « humaine », il faudrait nécessairement être aussi vigilant face aux risques de confusion et de religiosité. Par ailleurs, il est certain que cette expérience ne convient pas à certains tempéraments ou besoins spirituels des chrétiens.

Personne n’est obligé de «s’y retrouver » à Taizé. Pas non plus la peine de maudire ce lieu. Il suffit de garder son discernement.

Est-ce vrai que tous les théologiens pensent que Noël est mythique ? [Frédéric]

Non.

Mais plusieurs pensent, et pas sans raison, que le récit composé dans les Evangiles peut, à défaut d’être mythique, avoir des éléments d’un discours mythologique. C’est-à-dire que le récit, quand bien même il serait basé sur des faits réels, est « enveloppé » par le rédacteur spécialement pour l’occasion. C’est un grand classique de l’Histoire. Voyez comment on raconte même des événements récents en brodant sérieusement pour faire l’apologie de telle ou telle idée… Et puis, il est vrai que Noël n’est raconté que dans 50% des Evangiles avec le récit de la Nativité. Jean choisit un récit plus philosophique et spirituel sur la Parole créatrice. Quant à Marc, il ne parle que du baptême de Jésus (à trente ans !) comme récit de démarrage. Matthieu nous parle des rois (riches) et Luc des bergers (pauvres) et des anges.

Tout ça pour dire que Jésus est certainement né dans une étable à Bethléem, mais que pour le reste, il ne faut pas s’attendre à ce que ce qui est raconté soit parfaitement exact scientifiquement.
Qu’importe en fait !