Tous ceux qui prendront l’épée périront par l’épée. Matt 26:52 Qui est le « tous » ? [David]

Il faut replacer cette parole dans son contexte. Jésus s’adresse à un disciple qui veut s’opposer par la force à l’arrestation de son maître en frappant un des gardes avec son épée. D’après l’évangile selon Jean, il s’agit de Pierre (toujours impulsif !). Le ‘tous » désignerait ceux pour qui la violence est le seul remède à la violence, et la force la seule réponse possible à la force, ou à toute forme d’atteinte à l’être humain ou à la justice. On peut donc comprendre: la violence finit par se retourner contre celui ou celle qui y a recours. On peut voir dans cette parole un écho à l’avertissement de Dieu en Genèse ch.9 v.6 : « qui verse le sang de l’homme, par l’homme verra son sang versé ». Le Sermon sur la Montagne indique d’autres voies actives pour la résolution des conflits et la lutte contre le mal : voir Matthieu ch.5, v.38 à 41.

Jésus insiste, dans le récit de Matthieu, sur le fait que sa non-résistance est volontaire, librement assumée. C’est la volonté du Père qu’il subisse sa passion jusqu’à la mort sur la croix. Il refuse donc tout secours, que ce soit de son entourage ou même du Père et de ses « légions d’anges » (Matthieu ch.26, v.53). C’est ainsi que l’amour de Dieu sera victorieux.

Pas facile à mettre en pratique, que ce soit à l’échelle individuelle ou à celle des relations entre les peuples…

Certaines recherches indiquent que les films/jeux violents peuvent désensibiliser les gens. Les chrétiens devraient-ils éviter ou même préconiser la censure ? [Maurice]

Voilà ce que dit Jésus demande au Père en ce qui concerne leur relation à la société qui les environne. Ainsi : « Je ne fais pas la demande que tu les retires du monde, mais que tu les gardes du mal. Ils ne sont pas du monde, comme moi, je ne suis pas du monde. Sanctifie-les par la vérité ! ta Parole est [la] vérité. » Jean 17/15-17.
Ainsi, le chrétien ne doit pas fuir le monde, les jeux et films qui s’y trouvent, mais y vivre selon Dieu qui renouvelle l’intelligence (Romains 12/2). A nous, donc de demander à Dieu de nous éclairer sur l’attitude que nous devons avoir face aux différents supports qui nous sont donnés. Je crois que nous pouvons commencer par nous interroger sur nos motivations. Si je joue à un jeu violent pour le sentiment de puissance que cela me donne, je peux probablement en conclure que cette activité n’est pas à la gloire de Dieu. Si je regarde un film violent pour comprendre la société dans laquelle je vis et la souffrance de mes contemporains afin de pouvoir leur annoncer l’Évangile, les choses se posent en des termes différents. Notre sensibilité particulière est aussi à prendre en compte : suis-je un nouveau chrétien, capable de me laisser entraîner par les valeurs que les supports transmettent ? Ou suis-je un chrétien affermi capable du recul nécessaire ?

Dieu est amour (1 Jean 4: 8). Est-ce un attribut de Dieu ou son essence ? Comment pouvons-nous concilier cela avec l’ordre violent de Dieu dans l’Ancien Testament ? [Jacques]

Je ne pense pas que l’on puisse qualifier uniquement de violent l’ordre de Dieu dans l’Ancien Testament, même si indéniablement il peut l’être et sur ce sujet qui à lui seul mérite un développement je vous invite à lire un article très éclairant d’une de mes consœurs ici : https://regardsprotestants.com/bible-theologie/le-dieu-de-lancien-testament-est-il-violent/

Pour répondre  votre question, elle note que la violence de Dieu peut aussi être comprise comme une pédagogie vis à vis de son peuple à un moment de l’histoire biblique, et dans les catégories de l’histoire qui a porté la rédaction de ces textes. Mais est-ce qu’un parent qui se précipiterait pour gronder son enfant qui approche sa main de la flamme ne l’aimerait pas ? En tout cas le Nouveau Testament dans son ensemble affirme que Dieu est amour, et qu’il s’agit bien là de son essence. Je vous invite en particulier à aller (re)lire la 1ere épître de Jean (en entier, et par exemple 1 Jean 4, 8).

La Bible légitime-t-elle la légitime défense ? [Nico]

« Celui qui veut sauver sa vie la perdra » (Marc 8,35)

« Si quelqu’un te frappe sur la joue droite, tends-lui aussi la gauche » (Matthieu 5,39).

Ces textes pourraient suffire à bannir toute notion de « légitime défense »… Mais les choses sont sans doute plus compliquées. La Bible dit aussi que tout Homme est créé à l’image de Dieu, donc que la vie est sacrée, et d’aimer son prochain comme soi-même, ce qui implique, me semble-t-il, de se protéger soi-même, et de protéger son prochain (notamment sa famille).

Augustin, donc la tradition de l’Eglise, a résolu cette tension en distinguant les nécessités de la vie réelle et civile (où le mal doit être sanctionné et dont il faut se protéger), et l’attitude spirituelle de miséricorde.

Pour ce qui est des Ecritures elles-mêmes, il me semble qu’il est important de souligner ce que la théologie moderne oublie souvent : la continuité entre les deux testaments. Jésus n’a pas aboli la Loi de Moise (Matthieu 5,17-18) et, comme les juifs l’ont toujours fait, il l’éclaire, l’actualise, l’interprète en fonction des circonstances.

D’après la Loi de Dieu, révélée à Moise (avec les grands principes des 10 paroles, puis ses applications contextuelles), toute vie est sacrée (Ex20,13)… la propriété privée, qui permet la vie, doit être respectée (Exode 20, 15 ;17 ; voir une application en Exode 22,1). Jésus n’a jamais prétendu aller contre ces grands principes.

Qu’en est-il alors des textes qui invitent à relativiser sa propre vie ? Ils sont liés à la cause de l’Evangile… Ainsi un chrétien peut être conduit à accepter le martyr pour sa foi, mais « perdre sa vie » à cause du Christ, ce n’est pas perdre sa vie pour laisser dominer quelqu’un qui se comporte en ennemi de la justice et du Christ. D’ailleurs, « il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis » (Jean 15,13).

Que dire du sermon sur la montagne, où on trouve la parole « Mais moi je vous dis de ne pas résister au méchant. Si quelqu’un te gifle sur la joue droite, tends-lui aussi l’autre » (Matthieu 5,39) ? Jésus s’adresse ici à ses disciples devant une foule d’Israelites qui pleurent, à cause de longs siècles de désobéissance collective à Dieu, l’injustice et la misère qui sévissent dans le pays. Les velléités de révoltes sont nombreuses, et les réponses du pouvoir romain aux insurrections sont sanglantes. Les Israélites ont pourtant en tête les promesses de bonheur faites par Dieu avant leur entrée en Terre promise s’ils lui obéissent (Deutéronome 28,1). Or Jésus est le Messie qui vient restaurer et libérer Israël afin qu’il bénisse toutes les nations. Dans le cadre du renouvellement de l’alliance de Dieu avec son peuple (Matthieu 5, 3-11), Jésus invite probablement (5,41 renvoie assez clairement à une forme de persécution du pouvoir romain) à ne pas résister violemment au pouvoir. Si tel est le cas, cette position de Jésus de non-résistance à un pouvoir oppresseur se retrouve chez Paul en Romains 12,17-13,10, où Paul invite à ne pas résister à un pouvoir romain très menaçant, mais à compter sur l’intervention divine (voir Deutéronome 32, 35).

Ainsi, de manière générale, il me semble que la Bible légitime la « légitime défense », mais sa position est toute différente face à un pouvoir injuste.

 

Jésus se servit d’un fouet pour chasser les marchands du temple. Que dois-je comprendre dans ce geste (un peu violent)- une légitimation de la violence pour combattre le mal ? [Michel]

Jésus pose cet acte en temps que Fils de Dieu. Il est le messager de Malachie 3/1-5, celui qui juge pour purifier ce qui n’est pas juste dans notre relation à Dieu. N’étant pas Dieu, n’étant pas de ceux qui jugent mais plutôt de ceux qui sont jugés, nous ne pouvons pas employer ce passage pour justifier notre violence.
Ce texte, qui nous dit qui est Jésus, nous dit aussi qui nous pouvons être en lui : des humains qui adorent en Esprit et en vérité (Jean 4/20-21, annoncé en Zacharie 14/20-21).

Il y a une trentaine d’années- j’ai très très sévèrement rossé un voyou qui attaquait physiquement ma Mignonne. Quel est le point de vue du Seigneur face à mon attitude ? [Michel]

Le Seigneur ne fait pas partie de l’équipe des répondants à 1001questions.fr ! Mais ses membres lui demandent son aide dans la prière et par la méditation de sa Parole pour vous répondre de la façon la plus juste et utile qui soit possible.

Il est clair que la Parole de Dieu rejette la violence, et que celle-ci n’est pas un remède efficace à la violence. Mais vous avez été confronté à une situation de danger, d’urgence, face à laquelle vous ne pouviez rester passif, et que vous avez gérée comme vous avez pu. Souvent on regrette (même longtemps après !) d’avoir agi de façon disproportionnée, sous le coup d’une émotion forte, telle que la colère, face à une agression (qui touche en plus, comme dans le cas que vous évoquez, quelqu’un de très cher). Nous pouvons demander à Dieu de nous aider à en rester maîtres, à trouver l’attitude qui permettra d’éviter que tout dégénère. Et lui demander pardon quand nous n’y arrivons pas, conscients que nous ne sommes pas des anges et que le chemin est long pour guérir de nos pulsions. Quant au voyou, peut-être a-t-il tiré aussi un enseignement de cette altercation ?

Du fait de la dureté de la vie- est-ce qu’un chrétien peut pratiquer un art martial ou activité liée à l’auto-défense ? [Stefan]

La pratique d’un art martial ne rend pas la vie moins dure (sinon, il faudrait aller tous vivre en Chine ou au Japon, car vu les arts martiaux qu’ils pratique, la vie devrait y être très facile!) Si l’on se fait agresser, il ne me semble pas contraire à l’Évangile de tenter de se défendre, que l’on fasse des arts martiaux ou pas. La non-violence évangélique ne signifie pas que le chrétien soit une limace. Mais il faut toujours chercher à régler ses problèmes avant tout par des moyens n’impliquant pas la mise en cause de l’intégrité physique des personnes, ne serait-ce que parce qu’en agissant ainsi, nous donnerons déjà un témoignage de l’espérance qui nous habite en tant que chrétien.

La Bible est-elle plus violente que le Coran ? [Anna]

La Bible plus violente que le Coran ? Voici une proposition de non-réponse en deux trajectoires :

1. D’abord ces deux livres sont des objets avec des textes. Ils peuvent raconter des histoires violentes et comporter des textes qui appellent à la violence.
Mais c’est surtout la lecture qu’on en fait et l’usage pour lesquels on s’en sert qui peut être violent.

2. La Bible comporte pas mal de récits violents, parce que la vie est violente. Elle comporte aussi des paroles dures où des humains appellent à la violence, et des passages où l’on peut voir que Dieu se comporte d’une façon que nous pouvons considérer comme violente vue d’aujourd’hui. Mais la Bible, contrairement au Coran comporte une mise en ordre radicale, avec un premier et un nouveau testaments. Le Nouveau, avec les évangiles à son commencement, nous offre par la parole de Jésus un changement radical, qui consiste en particulier par le refus total de la violence. Ce qu’on entend derrière le « Aimez-vos ennemis » de Jésus en Matthieu 5,44, l’affirmation de l’apôtre Paul « Non, ce n’est pas contre des êtres humains que nous devons lutter. Mais c’est contre des forces très puissantes qui ont autorité et pouvoir. Nous devons lutter contre les puissances qui dirigent le monde de la nuit, contre les esprits mauvais qui habitent entre le ciel et la terre. » en Ephésiens 6,12. La mort de Jésus sur la croix se veut « dernier sacrifice » comme le décrit l’épître aux Hébreux, afin que justement les violences s’arrêtent.

Les paroles de Jésus en Mt 10:34-36 ne sont-elles pas contradictoires à son message d’amour réciproque ? Pourquoi tant de violence de la part de Jésus dans ce passage ? [Alex]

Matthieu 10:34-36 dit ceci : « Ne croyez pas que je sois venu apporter la paix sur la terre ; je ne suis pas venu apporter la paix, mais l’épée. Car je suis venu mettre la division entre l’homme et son père, entre la fille et sa mère, entre la belle-fille et sa belle-mère ; et l’homme aura pour ennemis les gens de sa maison. »

Je crois que c’est un principe de lucidité de la part de Jésus. Son message est scandaleux, et fou. Qui peut accepter qu’il sauve des pécheurs sur la seule base de leur acceptation de la grâce de Dieu et leur repentance. C’est choquant pour ceux qui essayent d’avoir une vie juste.
Le fait que son message fasse scandale va créer de l’opposition, comme dans la parabole du fils prodigue où l’aîné est vraiment dans l’incompréhension par rapport au cadet dont il trouve que le retour est un peu « facile ».

De toute façon, la paix que Jésus nous donne, il ne nous la donne pas comme le monde nous la donne (Jean 14:27). Et donc, étonnamment, c’est à cause de cet amour immense qu’il donne et qui est inacceptable qu’il y aura du rejet, jusqu’à… le faire crucifier comme s’il était un criminel !