Pourquoi Jésus oublie le « croissez et multipliez » ordonné aux humains à la base ? [Sam]

Il est vrai que lorsque Jésus aborde la question du mariage et du couple, par exemple en Marc ch.10, vv.6ss, il ne parle pas des enfants mais cite le ch.2 de la Genèse, qui donne comme sens et but à l’union de l’homme et de la femme de devenir « une seule chair », littéralement, comme un seul être. Par l’amour où chacun ne s’appartient plus, mais se donne à l’autre.

Je ne pense pas que Jésus oublie le mandat de fécondité donné par Dieu au ch.1 de la Genèse, que vous citez, Sam. Mais il répond à une question des pharisiens sur le divorce, qui, dans le Judaïsme, était toléré pour des motifs parfois très futiles. Jésus connaît le texte du Deutéronome permettant à l’homme de répudier sa femme, mais il insiste sur le fait que ce n’est pas le projet de Dieu, que c’est une concession à la dureté de nos coeurs, autrement dit à notre manque d’amour.  Bref, ce n’est pas la question des enfants qui est au coeur de ce débat où Jésus est impliqué. Ce n’est pas le sujet.

Quant au mandat de « remplir la terre » que le Créateur a donné aux hommes, il peut être considéré comme bien rempli, puisque nous avons dépassé le cap des 8 milliards d’êtres humains sur terre ! Et même un couple qui n’a pas la joie de mettre des enfants au monde est un couple à part entière, dont l’amour peut engendrer d’autres fruits.

Comment puis-je être sûr d’être sauvé ? [Alain]

Sous un angle chrétien protestant, la réponse à cette question ne peut se trouver que du côté de la foi. Car la foi est la seule réalité de ce monde qui peut nous assurer du salut que Dieu offre en Jésus-Christ : « La foi, c’est la réalité de ce qu’on espère, l’assurance de choses qu’on ne voit pas » (Hébreux 11, 1). Le salut, précisément, nous est donné en espérance, et on ne le voit pas.

A ce sujet, le catéchisme de Heidelberg (1562) demande à sa question 21 : « Qu’est-ce qu’une vraie foi ? ». Je cite deux éléments de réponses qui peuvent nous éclairer, cher Alain : d’abord la foi est une connaissance de la vérité, une connaissance du Christ Sauveur qui ne se limite pas à une action de notre intelligence, mais qui est validée par l’adhésion de tout notre être. Autrement dit, elle est « confessée » explicitement.

Mais cette connaissance court le risque de se muer en orgueil ou en certitude mortifère, qui consisterait à se rendre maître du salut, à prétendre savoir qui est sauvé, et qui ne l’est pas. Pensons à la surprise des « bénis de mon Père » au ch. 25 de l’évangile de Matthieu : elle nous rappelle que seul Dieu est maître du salut, et que celui-ci ne vient que par pure grâce. Même un cœur limpide ne saurait s’en emparer !

C’est pourquoi (2ème élément de réponse) la seule assurance que nous avons vient de l’action du Saint Esprit en nous. Il nous conduit dans la repentance et nous ouvre au pardon divin. Ses dons et ses fruits témoignent de la présence de Dieu dans notre vie, et ce sont de bons indices pour nous, tout comme l’amour que nous mettons en pratique. Mais le premier des signes qui nous sont donnés du salut est sans doute celui d’un cœur reconnaissant de se savoir aimé et justifié par Dieu dans la personne de Jésus.

Comment expliquer simplement à mon fils ce qu’est la trinité ? [Boris]

Cher Boris, pour parler de la Trinité, que ce soit à des jeunes ou à des moins jeunes, je dirais que la simplicité a d’abord besoin d’humilité. Nous parlons de Dieu, dont nous n’aurons jamais fini de découvrir « la profondeur de la richesse, de la sagesse et de la connaissance » (Romains 11, 33). Et nous restons dans l’attente de ce jour où nous connaîtrons Dieu comme nous sommes connus de Lui ! (1Corinthiens 13, 12)

Parler de la Trinité revient à considérer un seul Dieu mais en trois « personnes » différentes. Si Dieu était une donnée mathématique, on écrirait donc l’équation suivante : 1+1+1 = 1. D’ailleurs, comme les mathématiques, la Trinité relève d’une certaine abstraction. C’est une idée, un concept.

Cette idée traduit cependant fidèlement la manière dont Dieu se révèle dans l’Ecriture. Elle témoigne de l’histoire du salut qui se déploie dans les textes. La clé de cette révélation est le Christ, le Fils qui révèle Dieu comme Père (Jean 14, 9) et qui annonce l’envoi de l’Esprit Saint aux apôtres (Actes 1, 8).

Le point essentiel, qui a été souvent débattu et combattu, est de considérer chacune des trois personnes comme étant pleinement Dieu : Dieu le Père, Dieu le Fils, Dieu le Saint Esprit, et de ne diminuer l’importance d’aucune des trois : ne pas réduire le Père à une idée, le Fils à un homme (seulement), et l’Esprit à n’importe quelle inspiration.

L’équation de La Trinité, loin d’obéir à une stricte logique, nous fait connaître Dieu comme le « Vivant ». Elle nous montre la vie divine, à travers les relations entre le Père, le Fils, et l’Esprit. Le baptême de Jésus en est peut-être le témoignage le plus parlant (Marc 1, 9-11). Cette vie est une communion, elle se réalise dans l’amour de ces trois personnes, avec en son centre le mystère de la croix. Dans ce sens, elle est un modèle pour nos propres relations. Et c’est aussi une richesse pour nous de pouvoir nous adresser plus spécialement à l’une ou l’autre dans notre prière.

Qui est Azazel dans le livre du Lévitique ? Est-ce un ange déchu ou une figure métaphorique ? [Auguste]

Azazel n’apparaît que dans le livre du Lévitique 16, 8-25, sans que l’on ait d’informations précises sur son identité. Il y a, en gros deux interprétation principales de ce nom :

-c’est un démon à part entière, ce que confirment des textes écrits un ou deux siècles avant notre ère (livre d’Hénoch, ou l’Apocalypse d’Abraham) qui finissent par l’identifier carrément à Satan.

-le mot Azazel désigne l’acte même de l’envoi du bouc dans le désert. C’est le bouc « pour éloigner » le péché. C’est comme ça que l’ont compris la traduction grecque de la Bible, et la traduction latine, qui parle d’un « bouc émissaire ».

Tout ça pour dire que je crois qu’il faut rester très prudent par rapport à ce que l’on peut dire des démons, mais aussi des anges, sur la base du texte biblique. L’origines des noms, les rôles et la hiérarchie des ces puissances ne sont pas décrites de façon exhaustive dans la Bible. Par contre, nous comprenons clairement que Jésus est venu pour assumer pour nous le rôle de ce bouc émissaire, car c’est lui qui porte les péchés du monde, ceux de chacun de nous encore aujourd’hui, si nous mettons notre foi en lui.

Y-a-t-il au moins une famille équilibrée dans la Bible ? [Ida]

C’est vrai. On pense aux frères ennemis Caïn et Abel (Genèse 4), à la rivalité de Jacob et d’Esaü largement orchestrée par leur mère, Rebecca (Genèse 27), où même à l’esprit de famille contesté par Jésus : la question est légitime !

Fondamentalement, on peut même se demander si famille doit rimer avec équilibre, puisqu’une vie de famille, c’est un changement perpétuel.

D’ailleurs dans la Bible les familles se présentent d’abord comme des histoires racontées. Dans ce sens, elles ne sont pas des modèles, mais le terreau naturel, humain pour l’annonce de l’amour de Dieu et de sa parole de salut. La famille relève d’un donné, du « créé ». Elle se révèle donc ambivalente.

La Torah s’intéresse quand même de près aux relations familiales. Elle prononce des interdits sexuels (Lévitique 20), des recommandations cultuelles familiales, comme le Sabbat.  L’exemple le plus remarquable est le 5ème commandement : « Honore ton père et ta mère » (Exode 20, 12). Ces règles énoncent des équilibres essentiels.

Dans le Nouveau Testament, la famille apparaît surtout comme le lieu où la foi est vécue et transmise. Parfois cela bouscule, voire bouleverse les relations. Nous avons quand même au moins deux exemples positifs : la famille de Jésus, malgré les propos sévères de celui-ci sur sa « mère » et ses « frères », l’a suivi dans le discipulat, et a fait partie de la première Eglise ; et Timothée, qui a reçu la foi en famille, de sa grand-mère et de sa mère (2Timothée 1, 5). Quant à Paul, il s’est efforcé dans ses lettres de promouvoir des relations les plus équilibrées possibles dans les familles des chrétiens (1Corinthiens 7), pour que Dieu y soit honoré malgré la complexité des situations. Un défi qui reste d’actualité pour nous !

Pourquoi les protestants sont si silencieux dans les médias ? [Viviane]

Viviane, je n’ai pas de réponse précise à votre question. Je crois d’abord qu’il n’est pas possible de parler des protestants comme d’un tout homogène ou uniforme. Néanmoins je vous propose deux hypothèses face à votre interrogation :

  • Peut-être est-ce parce que le monde et ses médias prennent les protestants pour quantité négligeable et n’attendent rien d’eux et de leurs manières de témoigner de l’Évangile ? Après tout ils sont une minorité religieuse au sein du christianisme, lui-même minoritaire en France.
  • Peut-être est-ce encore parce que les protestants n’ont plus rien à dire ? Leur parole se confondant trop avec celle du monde, les médias préfèrent alors soit relayer la parole de ceux qui sont plus performants dans leurs discours soit mettre en pratique le principe basique que l’original vaut mieux que la copie.

Quoi qu’il en soit, l’Évangile a toujours heurté le monde, il suffit de voir comment Jésus n’a pas été accueilli dans le monde. Les récits autour de la nativité le montrent clairement : La Parole était dans le monde et le monde est venu à l’existence par elle, et pourtant le monde ne l’a pas reconnue (Jean 1,10 NFC). De même les récits de la mort du Christ prouvent qu’il était bien seul et rejeté par le monde.
Alors je crois que plus que de savoir s’il faudrait que l’on entende les protestants dans les médias, il est intéressant de savoir si le monde voit que des vies sont transformées par l’Évangile, à commencer par la vie des protestants eux-mêmes. Et si la réponse est non au premier questionnement, cela ne me semble pas grave, mais si c’est au second, c’est très inquiétant !

Les chrétiens peuvent-ils faire la guerre ? [Jean]

La question du rapport du chrétien à la guerre doit être mise en relation avec l’histoire de l’Eglise, et les compréhensions divergentes du 6e commandement (« tu ne tueras point »). Lors des trois premiers siècles du christianisme, la vocation militaire au service d’un empereur païen était largement vu comme incompatible avec la foi chrétienne, sous peine d’excommunication (c’était l’époque des soldats martyrs, tel que saint Georges). Avec la conversion de Constantin et la théorie de la guerre juste d’Augustin, l’acceptation de la vocation militaire se généralisa chez les chrétiens, même si l’Eglise tenta d’endiguer la violence endémique du Moyen-âge en régulant la guerre (la paix et la trêve de Dieu, mais aussi le code chevaleresque). Les croisades marquent un tournant dans le sens que la guerre pouvait non seulement être juste (répondre à une menace légitime, et se conformer à un code de la guerre), mais aussi sainte (voulue par Dieu). Ces croisades se généralisèrent au Moyen-âge tardif, non seulement contre les infidèles (musulmans), mais aussi les païens (tribus baltes), les schismatiques (chrétiens orthodoxes) et les hérétiques (cathares, hussites). Les guerres de religion qui suivirent la Réforme furent particulièrement brutales, et marquèrent durablement les esprits. Si certains en furent désenchantés par la foi chrétienne (déistes, rationalistes), d’autres chrétiens commencèrent à développer une doctrine pacifiste (en particulier les Mennonites et les Quakers). Les deux convictions (guerre juste et pacifisme) ont co-existé depuis. Si les boucheries de 14-18 ont fortifié le courant pacifiste dans la démonstration de l’absurdité de la guerre, des conflits comme celles de 39-45 ont pu convaincre jusqu’à des pacifistes tel que Dietrich Bonhoeffer de la nécessité d’une résistance, y compris armée, au Mal.

Alors, que dit la Bible sur le sujet ? L’Ancien Testament semble conforter la position de la guerre juste, depuis la conquête de Canaan par Josué jusqu’aux guerres du roi David. Dans ce sens, il n’est pas possible de lire le 6e commandement (Exode 20.13) comme une injonction contre toute forme d’homicide, puisque la Torah prescrit la peine capitale pour certains crimes (ex : Genèse 9.6, mais aussi Exode 21.12-17, juste après le commandement). Jésus vient toutefois changer de paradigme, puisqu’il prône dans le Sermon sur la Montagne la non-résistance au mal (tendre l’autre joue, aimer et prier pour ses ennemis, etc., cf. Matthieu 5.38-48). Jésus semble entériner ce principe quand il refuse à Pierre le droit de le défendre contre ceux qui vont le crucifier (« tous ceux qui prendront l’épée périront par l’épée. » Matthieu 26.52). Il est clair qu’en temps que disciples de celui qui est appelé le prince de la paix (Esaïe 9.6), nous devons procurer la paix, et privilégier les solutions non-violentes. Toutefois, Paul nous rappelle que cela n’est pas toujours en notre pouvoir : « s’il est possible, autant que cela dépend de vous, soyez en paix avec tous les hommes. » (Romains 12.18). Nous vivons dans un monde où Satan est encore bien actif, et où les hommes méchants et violents semblent triompher. Dans ce contexte, Jésus semble dans certains passages maintenir le droit à la légitime défense (Luc 11.21, Luc 22.36-38). Le devoir de protéger le faible est aussi fondé bibliquement (ex : Psaume 82.4, Proverbes 24.11, Jérémie 22.3). Et nous sommes tous, bien que citoyens du ciel, citoyens de nos pays respectifs (comme Paul, le citoyen romain), soumis aux mêmes devoirs que nos concitoyens (devoirs qui impliquaient jusqu’à récemment le service militaire). Jean-Baptiste n’a pas demandé à ses auditeurs soldats de renoncer à l’épée, mais à la fraude et à l’extorsion (Luc 3.14). Aucune demande pacifiste n’est formulée à l’égard du centurion Corneille (Actes 10). Paul reconnait au magistrat le droit à l’épée, celui-ci étant « serviteur de Dieu pour exercer la vengeance et punir celui qui fait le mal » (Romains 13.4).

Tous ces versets ne forment pas une doctrine entièrement construite, ni en faveur du pacifisme, ni en faveur de la guerre juste. Tout au plus permettent-elles de tracer les contours de la liberté du chrétien, partagé entre sa répugnance pour la violence et le besoin de faire obstacle au mal. En cela, la doctrine des deux royaumes de Martin Luther est intéressante, puisqu’elle rappelle que si l’épée est bannie du royaume céleste, elle demeure une nécessité dans le royaume terrestre. La mesure dans laquelle un chrétien doit participer aux conflits de sa patrie terrestre reste une question ouverte, à laquelle il doit répondre en conscience.

Pourquoi Dieu ne guérit pas les gens pour lesquels on intercède ? [Annie]

La question de « l’efficacité » de nos prières doit prendre en compte plusieurs paramètres, et plusieurs versets bibliques qui, pris individuellement, pourraient nous faire perdre de vue l’ensemble.

D’un côté, nous croyons que Dieu est bon, et que dans Sa bonté Il désire guérir les malades. Nous voyons cette réalité dans le ministère de Jésus, qui guérissait tous ceux qui s’approchaient de lui (ex : Luc 4.40, Matthieu 8.16). Cela était possible car il était lui-même celui qui allait porter non seulement nos péchés, mais nos maladies sur la croix (Matthieu 8.17). Il laissa d’ailleurs à ces disciples d’incroyables promesses, promettant de répondre dès lors qu’une prière est faite avec foi (Marc 11.24), en son nom (Jean 14.13), et dans l’unité (Matthieu 18.19). Avec de telles promesses qui semblent être autant de chèques en blanc, il n’est pas surprenant que certains en soient venues à croire que, si tout est possible à celui qui croit (Marc 9.23), il doit être possible au chrétien d’utiliser la Toute-puissance de Dieu pour faire advenir la réalité qu’il désire. Dans cette optique, la seule limite à la bénédiction de Dieu est notre propre incrédulité (Marc 6.5). Mais c’est courir le risque de transformer Dieu en un distributeur de bénédictions à la demande, et de nier le fait que Dieu peut avoir un but bienveillant dans les souffrances que nous traversons (éprouver notre foi, forger notre caractère, etc.).

Cela nous emmène à notre deuxième point. Si nous devons prier avec persévérance et foi, nous devons aussi prendre en compte la souveraineté de Dieu, et nous soumettre à Sa volonté pour nos vies. Ainsi, l’apôtre Paul demanda trois fois à Dieu d’enlever l’écharde qui était dans sa chair, pour recevoir pour réponse « Ma grâce te suffit, car ma puissance s’accomplit dans la faiblesse » (2 Corinthiens 12.9). De même, Jésus, dans le jardin de Gethsémané, conclut sa prière en disant à son Père « toutefois, non pas ce que je veux, mais ce que tu veux » (Marc 14.36). L’apôtre Jean résume bien l’articulation de la foi avec la soumission à la volonté de Dieu : « Nous avons auprès de lui cette assurance, que si nous demandons quelque chose selon sa volonté, il nous écoute. Et si nous savons qu’il nous écoute, quelque chose que nous demandions, nous savons que nous possédons la chose que nous lui avons demandée. » (1 Jean 5.14-15). Dès lors, la prière est efficace, moins dans le sens qu’elle change la volonté de Dieu, mais bien dans le sens qu’elle nous amène à transformer notre volonté pour l’emmener en correspondance avec la sienne. Cela ne veut pas dire que la prière ne change pas la réalité concrète de nos vies (ou de celles pour lesquelles nous prions) : au contraire, Dieu se sert de nos prières (qu’Il guide et inspire) pour transformer nos réalités et pour guérir ceux qui sont malades. Et n’oublions pas que la première maladie qui afflige les hommes est le péché, et que Christ est prêt à guérir quiconque vient à lui pour le remède !

Pourquoi sur les réseaux sociaux les gens sont passionnés par les versets courts ? [Sabine]

Ce sont les normes des supports qui fixent la longueur des textes.
Depuis toujours !

Les dix commandements étaient assez courts, forcément, sur des tablettes d’argile ou de pierre.
Quand on a pu avoir des parchemins, on a pu avoir tout un livre écrit.
Et quand on est passé au papyrus et au codex, c’était carrément toute la Bible qui pouvait être éditée ! Formidable.

L’électronique est régressive : certes nous avons vingt versions de la Bible dans notre smartphone, mais le format que notre écran impose est un format court. Les prédicateurs sont influencés par cela. Ils prêchent souvent sur un seul verset. Et résultat il en découle de nombreux biais cognitifs : sortie du contexte, focalisation sur les mots en français alors qu’il s’agit d’une traduction depuis le grec et/ou l’hébreu, etc.

Bref, les citations brèves de la Bible sont monnaie courante, mais elles instrumentalisent le propos et souvent le tronquent. Acceptons-le, mais promouvons aussi une lecture plus profonde, plus approfondie, aussi !

Pourquoi Paul dit que la nature nous enseigne que c’est une honte pour l’homme de porter des cheveux longs ? [Alain]

« La nature elle-même ne vous enseigne-t-elle pas qu’il est déshonorant pour l’homme de porter des cheveux longs, alors que pour la femme c’est une gloire ? » (1 Corinthiens 11, 14)

Attention, terrain glissant ! L’argument de la nature demande à être manié avec précaution, non par peur des représailles, mais parce que distinguer le naturel du culturel et du spirituel n’est pas toujours facile, tant les choses sont liées dans la réalité.

Ce verset intervient dans une argumentation de Paul sur la tenue qui convient aux hommes et aux femmes dans les assemblées chrétiennes. Il faut ajouter : en Grèce, à Corinthe, vers l’an 50 de notre ère ! Car la façon de se vêtir, les coupes de cheveux sont des faits très culturels. D’ailleurs, si le monde gréco-romain – celui de Corinthe – voit d’un mauvais œil les hommes aux cheveux longs, on trouve l’inverse dans le Premier Testament et donc dans le judaïsme avec le cas des nazirs, ou encore celui d’Absalom (2 Samuel 14, 26).

Il n’en est pas moins vrai que, pour des raisons hormonales – naturelles, donc -, les cheveux des femmes poussent plus que ceux des hommes. Paul, comme d’autres anciens l’a observé, et la science peut le confirmer aujourd’hui.

Une autre dimension se greffe encore là-dessus, spirituelle celle-là. D’abord parce que s’accorder à la nature signifie pour l’apôtre s’accorder au Créateur. Ensuite parce qu’il soutient l’importance de reconnaître la différenciation sexuée, ce qui implique dans le cas précis de Corinthe une discussion sur l’exercice de l’autorité des unes et des autres.