Est-ce correct de prier Dieu en l’appelant « Papa » ? [Simone]

Jésus est très innovant et révolutionnaire en appelant Dieu « Père ».
C’est nouveau de faire cela, pour deux raisons :
– dire que Dieu est son père était vu comme une preuve d’arrogance dans le peuple Juif et quasiment aucune mention n’est faite du mot Père pour parler de Dieu dans le Premier Testament, sinon dans des expressions évoquant la paternité de Dieu (Exode 4,22-23 – 1Chroniques 17,13 – Proverbes 3,12) ou parlant de Dieu étant “comme un père » ; voyez Esaïe 63,16 : « C’est toi, Éternel, qui es notre père ».
Mais on n’appelle jamais Dieu “Père » directement.
– la deuxième raison c’est que Dieu ne devient père que quand… il a un Fils. Et même si Israël a été son fils premier-né, en tant que peuple (voir la citation d’Exode plus haut), il n’a un vrai Premier-né que quand advient le Fils unique venu du Père, à savoir au moment du baptême de Jésus : “Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j’ai mis toute mon affection » (Matthieu 3,17).

Le terme Abba n’est employé que trois fois dans le Nouveau Testament, bien que Jésus nous apprenne à prier Dieu en tant que Notre Père (Matthieu 6,9). Ce terme se trouve en Marc 14,36 – Romains 8,15 – Galates 4,6. Abba est un mot araméen, qui veut dire “Père“ mais avec une forme renforcée. Il est un peu à mi-chemin entre “Papa » et “Père », simplement parce qu’il est accessible dans le babillage de l’enfant. Pour autant, le choix de Marc et de Paul est bien particulier. A chaque fois, il est fait mention de “Abba, Père”. Abba n’est jamais employé seul. Le mot “Abba” est araméen, laissé tel quel, et le deuxième est en grec, la langue du Nouveau Testament. Comme il n’y a pas de ponctuation dans le grec de l’époque (koinè) on pense que l’interprétation la plus juste serait : “Abba [c’est-à-dire] Père ». Or, le mot grec qui est utilisé pour “Père » en grec n’est justement pas le mot “Papa” (mpampas) mais bien “Père” (pater). Matthieu et Paul expliquent comment on dit “Père » en araméen, et le traduisent pour leurs lecteurs grecs.

Certains voudraient y voir un langage affectueux ou de proximité. Je ne crois pas que cela soit le cas. C’est un langage intense d’implication, certes. Mais je pense que ces trois textes ne nous incitent pas à jouer aux enfants de cette façon qui nous ferait utiliser le mot “Papa”. En effet, le fait de devenir enfants de Dieu (Jean 1,12) n’est pas une infantilisation, une forme de régression en arrière vers l’enfance, mais une adoption d’adultes consentants. Quand Jésus nous fait prier “Notre Père”, il ne choisit pas le terme “Papa” et il insiste sur le collectif, bref : sur la révérence et l’aspect communautaire de la paternité de Dieu qui nous crée comme famille.

C’est pour cela que je prie Dieu en lui disant : “Père” ou “Notre Père” ou “Père Éternel”.

 

Croyez-vous en la « révélation progressive » ? Par exemple- une progression de la violence de l’Ancien Testament en 1 Chron 22-9 jusqu’à la déclaration de Jésus dans Matt 5-9 [Luc]

Parler de révélation progressive de Dieu, notamment à travers l’histoire du peuple d’Israël, semble juste, si on considère le simple fait que la rédaction des écrits bibliques s’étale sur plus d’un millénaire !

Vous évoquez à ce sujet la question délicate de la violence dans le Premier Testament. En effet, on peut s’étonner, voire être choqué, entre autres, par certains ordres donnés par Dieu ou en son nom : dans les récits de la conquête de la terre Promise (voir le ch. 6 de Josué par exemple, et l’anéantissement des populations de Canaan) ou encore de l’idolâtrie d’Israël au désert (Exode 35,25-29). Il s’agit pour les auteurs d’insister sur le rejet absolu du mal, que Dieu a en horreur. Israël, peuple mis à part pour manifester la sainteté de Dieu, ne doit rien laisser subsister en son sein, et autour de lui, qui pourrait y porter atteinte. On peut évoquer aussi certaines imprécations dans les psaumes, mais là, elles expriment souvent la souffrance et la colère du croyant opprimé, persécuté, qui appelle au secours, demande justice et délivrance (voir par exemple le dernier verset du Psaume 137).

Il faut y insister cependant : dès les origines, Dieu se manifeste comme celui qui ultimement fait grâce. Comme le dit un autre  Psaume (117), la bonté du Seigneur pour nous est la plus forte (et sa « colère », ajouterais-je, n’est que l’expression de son amour blessé). Moïse, en intercédant pour Israël, a pu « fléchir » le Seigneur et l’amener à renoncer à anéantir le peuple rebelle. La violence n’est pas le dernier mot de Dieu. A la croix de Jésus-Christ, Dieu prend sur lui la conséquence de notre péché et de notre idolâtrie. Désormais, ce n’est plus contre des hommes que nous avons à lutter. Le combat est à l’intérieur de nous-mêmes, de nature spirituelle. Nos armes : l’amour, le pardon. Notre victoire : la paix et la réconciliation.

Un gnostique est-il un chrétien ? [NewDeli]

Un gnostique est une personne qui pense qu’elle peut avoir accès à Dieu par sa connaissance, sa propre initiation.
Mais la révélation chrétienne n’est pas due à une quelconque connaissance, si ce n’est celle de Jésus. Et le Christ ne se donne pas d’abord à connaître mais à recevoir, à croire comme le dit par exemple l’évangile selon Jean (3,16 ou 11,25).
La question pour un chrétien est d’avoir une relation de foi avec le Christ. Cette relation mène à Dieu. Dans ce même évangile Jésus dit : « Je suis le chemin, la vérité, et la vie. Nul ne vient au Père que par moi. » (14,6).
En ce sens un gnostique n’est pas chrétien.

Jésus exhortait ses disciples à guérir et chasser les démons comme lui-même le faisait, pourquoi ne nous a-t-il pas appelé aussi à changer l’eau en vin et à marcher sur l’eau ? [Jean-Luc]

Pour Jésus il y a des impératifs de plus ou moins grande importance.

Celui qui revient le plus souvent (plus souvent même que le commandement d’amour), c’est d’annoncer que « le Royaume de Dieu s’est approché (de nous/vous) ».

Et cette annonce majoritaire est adjointe régulièrement, dans l’ordre d’occurence des plus importantes, de ces mentions :
1. Guérissez les malades
2. Chassez les démons
3. Purifiez les lépreux et ressuscitez les morts.

Viennent ensuite toutes les autres, comme :
– laver les pieds des autres croyants,
– prendre un repas en mémoire de lui,
– baptiser les personnes, même issues des nations non juives,
– aimer les ennemis,
– etc.

Jamais il ne demande de changer l’eau en vin ni de marcher sur l’eau.
Peut-être parce qu’il a concédé à le faire juste pour signifier sa puissance. Mais que ce qu’il nous demande, c’est de faire des choses significatives pour les autres, qui portent un fruit immédiat dans leur vie.

C’est certainement pour cela qu’il insiste sur l’évangélisation, la guérison, la libération.

Jésus a-t-il marché physiquement sur l’eau (Matt 14: 22-33)? J’ai entendu certains dire que c’est une allégorie. Cela ne compromettrait-il pas tous les miracles- et même la résurrection ? [Dan]

Dans ce passage, Matthieu (14. 25) comme Marc (6. 49) et Jean (6. 19), ont une façon très curieuse d’utiliser la grammaire grecque, pour nous faire comprendre que ce qui s’est passé montre la divinité de Jésus. Il marche sans bouger ! Je ne peux pas vous dire ce qui s’est passé exactement (je n’y étais pas, n’est ce pas…) mais ce que je constate c’est que les trois évangiles font la même « erreur » de grec pour signifier qu’en Dieu, il y a du mouvement, qui ne correspond pas à notre mouvement humain, conditionné par les lois de la physique terrestre. Dès lors, pour moi, il ne s’agit ni de voir cela comme une marche sur l’élément liquide, ni comme une allégorie, mais comme la tentative de rendre compte d’une expérience spirituelle qui va au-delà des mots. Ce qui est le propre de tous les miracles, qui ont une signification spirituelle qui va au-delà même de leur matérialité.

Que penser de ces tags « Jésus sauve »- que l’on trouve partout dans Paris ? Est-ce à la gloire de Christ ? [Peps]

« Qu’importe? De toute manière, que ce soit pour l’apparence, que ce soit sincèrement, Christ n’est pas moins annoncé: je m’en réjouis, et je m’en réjouirai encore. » Philippiens 1. 18. Je ne suis pas dans la tête des personnes qui font ces tags, je ne peux donc rien dire quant à leurs intentions. Mais en lisant votre question, c’est ce verset de Paul qui m’est tout de suite venu à l’esprit. Bien sûr, cela ne veut pas dire que je cautionne la pratique du tag ou du graffiti qui tombe sous le coup de la loi…

Les chrétiens devraient-ils être écologistes ? L’environnementalisme est-il idolâtre ou païen? [Frédéric]

Si la « nature » est considérée comme « Création » et donc l’œuvre du Créateur, la créature humaine doit exercer une sainte domination sur le monde créé, pour y figurer son statut d’image de Dieu. Le projet était quand même que l’humain s’occupe correctement du jardin.
Mais l’échec de ce projet ne date pas d’hier, et les pépins sont vite arrivés.

Le Nouveau Testament nous présente une création qui a besoin d’être sauvée. Et c’est la raison pour laquelle Jésus est envoyé. L’Apocalypse, le dernier livre de la Bible, nous dit aussi que ce qui adviendra, c’est une « Jérusalem céleste », qui descendra. Donc désormais le projet de l’humain, tout en respectant la création, ne doit pas devenir idolâtre effectivement, et vénérer la création plus que le créateur comme le dit Paul en Romains 1. Il ne s’agit pas de rebâtir et restaurer la Jérusalem terrestre. D’ailleurs ce n’est plus un jardin, c’est bien une ville. La Jérusalem ancienne sera détruite.

Donc, pour simplement ne pas s’empoisonner, il faut être écologistes.
Et pour laisser Dieu sauver le monde, il faut arrêter de vouloir le sauver nous-mêmes.

En Hébreu, le nom de Jésus est Yeshua , il a été traduit en Grec par yesous puis est devenu Jésus . Comment les apôtres appelaient-ils Jésus ? Pourquoi avoir traduit son prénom d’origine ? [Isabelle]

C’est le même nom que notre Josué du premier testament.
La mutation de Yeshouah à Jésus s’est simplement opérée par glissement successifs au fil des époques.

Hébreu : Yeshouah, puis…
Grec : Yesous, puis…
Latin : Iesus, puis…
Français moderne : Jésus.

Ce n’est pas à proprement parler une traduction, mais juste une évolution dans la prononciation, tout comme Charlemagne ne s’appelait pas « Charlemagne » avec notre prononciation dans la langue franque de l’époque devenue vieux françois et français…
Dans le même sens, en restant sur une même époque, si vous avez une amie malgache qui s’appelle Hanitra, les français vont prononcer son nom « Anitra » alors qu’elle le prononcera en malgache « An’tch ».

Il n’y a donc pas de problème d’utiliser Jésus, Yesous, ou Yeshouah (d’autant plus que le « ah » final est quasiment imprononçable pour un français, et que donc, il sera presque impossible d’être fidèle à sa prononciation authentique).

On dit que le mot Seigneur ne fait pas totalement référence à Dieu mais plutôt à un roi ou empereur. Comment faire pour savoir si la Bible fait référence à un Dieu ou un roi lorsqu’il parle de Jésus ? [Teague]

La Bible fait référence à un roi et à un dieu lorsqu’elle parle de Jésus ! La plus belle illustration de cela me semble être l’exclamation de Thomas devant le ressuscité : « Mon seigneur et mon Dieu ! » (Jean 20. 28). Mais la Bible va même plus loin ! Jésus est grand prêtre (Hébreu 4. 14), avocat (1. Jean 2.1), juge des vivants et des morts (Actes 10. 42), chef de l’Église (Éphésiens 1. 22), et j’en passe. D’une manière générale, je crois que l’on peut considérer que les auteurs de la Bible ont tous essayé de rendre compte à leur manière de cette nouvelle abasourdissante : Jésus-Christ était Dieu, et en même temps le Messie annoncé par le Premier Testament.

Nul ne peut voir Dieu et vivre, pourtant Marie a porté 9 mois durant Dieu en elle. Cela ne prouve-t-il pas sa supériorité et le fait qu’elle ait une place spéciale auprès de Dieu ? [Ludivine]

Reprenons point par point.
Marie n’a pas porté Dieu en elle. Elle a porté Jésus.
Après ça, sa supériorité n’est pas dû au fait qu’elle ait porté Jésus en elle. Voyez :
A l’interpellation d’une femme dans la foule, écoutons ce que Jésus a répondu : « Heureux le sein qui t’a porté! heureuses les mamelles qui t’ont allaité ! Et Jésus répondit : Heureux plutôt ceux qui écoutent la parole de Dieu, et qui la gardent ! » (Luc 11:27-28)
Donc pas de supériorité de Marie, puisque Jésus refuse que sa maternité soit un sujet de gloire. Mais plutôt une valorisation de la fidélité.

C’est à ce titre que Marie est quelqu’un d’exceptionnel : elle a CRU !
Désormais toutes les générations la diront bienheureuse ! (cf Luc 1:48)
La place spéciale de Marie est donc que, quand le jugement aura sonné, elle sera vraisemblablement la première ressuscitée, car la première à avoir CRU !
« Qui est ma mère, et qui sont mes frères ? Etendant la main sur ses disciples, Jésus dit : Voici ma mère et mes frères. Car, quiconque fait la volonté de mon Père qui est dans les cieux, celui-là est mon frère, et ma soeur, et ma mère. » (Matthieu 12:48-50).