Est-ce que Matthieu, Marc, Luc et Jean se connaissaient ? [Eva]

Rien ne permet d’affirmer d’après le témoignage du Nouveau Testament que les auteurs des quatre Evangiles aient eu l’occasion de se rencontrer ou de se connaître personnellement.

C’est en fait peu probable, parce que chaque évangéliste écrit des décennies après le ministère terrestre de Jésus, en fait ressortir des aspects particuliers, en  fonction du contexte qui est le sien : L’Evangile selon Matthieu, par exemple contient énormément de citations de l’Ancien Testament et aurait plutôt été destiné à des lecteurs juifs. Luc écrit pour sa part à l’intention d’un lectorat de culture gréco-romaine : par exemple, le toit en terrasse (architecture typique de la Palestine) dans lequel on creusa un trou pour y faire passer le paralytique de Capernaüm (Marc 2,4) devient chez Luc un toit de tuiles (Luc 5,19).

La proximité des trois premiers évangiles que l’on appelle « synoptiques » (littéralement « vus ensemble »;  puisqu’ils présentent une série de récits et de paroles de Jésus que l’on peut lire de façon parallèle) s’explique non par le fait qu’ils en auraient été des témoins directs (et qui, donc, se seraient forcément connus !) mais par leur usage de traditions communes. L’hypothèse classique est que Marc est l’écrit plus ancien, Matthieu et Luc auraient puisé chez lui ces traditions et auraient eu recours à un autre document, la source des Logia (paroles, en grec) pour toutes les paroles de Jésus qu’ils rapportent conjointement. Certains exégètes penchent pour l’antériorité d’un prototype de l’évangile de Matthieu en araméen, plutôt que pour celle de Marc. Il existe encore d’autres théories, plus ou moins complexes, mais aucune à ce jour ne permet d’expliquer de façon totalement satisfaisante les similitudes et les différences entre les trois écrits. La question est très complexe !

Est-ce que jésus est la même personne que le Dieu de l’Ancien Testament ? [Kevin]

Jésus-Christ, Dieu le Fils est une des trois personnes du Dieu unique révélé dans le Premier et le Nouveau Testaments. Un exemple ? En Genèse 15. 1, nous lisons : « Après ces événements, la parole de l’Eternel fut adressée à Abram dans une vision. Il dit : ». Littéralement, on peut lire : « Après ces choses,  la parole de l’Eternel fut vers Abram dans la vision en disant ». Et Abram identifié cette parole à lui adressée dans la vision comme étant Dieu lui-même (verset 2).  C’est comme si la parole de Dieu s’était déplacée vers Abram pour lui parler par le moyen d’une vision, comme une personne pleine et entière. Au verset 4, cette même parole est à nouveau vers Abram et le fait sortir pour contempler les étoiles. Or le premier verset de l’évangile de Jean pour décrire la parole de Dieu venue jusqu’à nous en Jésus-Christ nous dit : « Au commencement, la Parole existait déjà. La Parole était avec Dieu et la Parole était Dieu », comme si, là aussi, la Parole était en quelque sorte, identique et différente à la fois de Dieu le Père.

Il y a encore beaucoup d’autres situations comparables à celle-là dans le Premier Testament, qui peuvent être comprises à la lumière de ce que le Nouveau Testament nous dit de Dieu, trois personnes en un être.

Jésus aime-t-il Michel Onfray ? [Gilles]

Oui. Si Jésus devait ne plus aimer toutes les personnes qui disent des âneries à son sujet, il n’aimerait plus grand monde ! Jésus aime Michel Onfray, c’est le contraire qui me semble moins sûr. Jésus aime Michel Onfray et c’est peut-être ce qui pose un problème à ce dernier… Jésus aime Michel Onfray comme chacun d’entre nous, car Dieu est amour et qu’il a tellement aimé le monde qu’il a envoyé son Fils unique afin que quiconque croie en lui ne périsse pas mais ait la vie éternelle.

Pourquoi les Eglises semblent vouloir « divertir » les chrétiens plutôt que de « convertir » les gens au Christ ? [Stella]

Stella, ni divertir, ni convertir !
Je crois qu’effectivement le rôle des Églises n’est pas de divertir les chrétiens, comme le monde d’ailleurs. Et je crois tout aussi fortement qu’elles n’ont pas à convertir.
Mais j’aime bien les guillemets que vous avez mis autour de ces deux verbes. Je comprends par « divertir » la volonté des Églises de présenter l’Évangile de manière plus douce, plus acceptable qu’il n’est en réalité, en essayant de gommer ce que l’Évangile a de radical : « Aimer ses ennemis » par exemple (Mt 5, 44). Et j’imagine que par « convertir » vous voulez dire annoncer l’Évangile.
Je ne sais dire les raisons pour lesquelles les Églises agissent ainsi. Cela traduit, en tous cas, le fait qu’elles sont pécheresses, à côté de ce que le Christ, leur chef, leur demande de faire. Et s’il en est ainsi, elles doivent se repentir, revenir à Dieu et mettre en pratique les enseignements de l’Évangile, en totalité.

« Heureux ceux qui auront cru sans avoir vu ». Doit-on mépriser d’avoir vu de grandes choses ? [Sophie]

Jésus adresse cette remarque à Thomas en Jean 20/29. Alors que Jésus ressuscité s’est montré aux autres disciples, Thomas était absent. C’est alors qu’il annonce qu’il ne croira pas tant qu’il n’aura pas vu Jésus de la même manière que les autres disciples l’ont vu. Huit jour plus tard, Jésus lui apparaît avant de déclarer : « Parce que tu m’as vu, tu as cru. Heureux ceux qui n’ont pas vu, et qui ont cru ! ».
Je ne pense pas que Jésus cherche ici à mépriser ce qu’il nous est donné de voir de l’œuvre de Dieu en Christ.
Tout d’abord, nous pouvons constater que la Bible donne un rôle particulier aux témoins oculaires de la vie de Jésus (Luc 1/2). En effet, le fondement de notre foi est historique. Dieu, en Jésus, est venu dans notre monde pour accomplir l’œuvre du salut. Nous avons besoin de le savoir afin de pouvoir l’accueillir. Le rôle des disciples, qui deviendront apôtres, sera de parler de ce qu’ils ont vu, y compris de la résurrection qui est un gage de sa victoire sur la mort.
Cependant, le fait de voir ne suffit pas à croire. Ainsi, beaucoup de ceux qui ont vu l’œuvre de Jésus ne l’ont pas cru. Matthieu 13/11-17 nous laisse entendre que c’est une grâce, un cadeau qui a été fait aux disciples non seulement de voir, mais aussi de croire ce qu’ils ont vu. C’est ce que nous montre l’épisode de Thomas doutant : Jésus lui fait la grâce de se montrer à lui. Aujourd’hui encore, certains ont la grâce de voir Jésus leur apparaître en rêve, par exemple. Il leur est alors fait la grâce de voir afin qu’ils puissent croire. A d’autres, il peut être donné de voir simplement son œuvre, à travers des guérisons, des miracles extraordinaires. Il n’y a rien de méprisable en ce qui est donné par Dieu pour notre salut.
Enfin, si le cadeau de la foi peut passer par le fait de voir, cela n’est pas nécessaire. C’est ce qu’exprime 1 Pierre 1/7-9, par exemple. Je pense que le but de l’interpellation de Jésus à Thomas en Jean 20 vise à encourager ceux qui, comme nous qui sommes nés si longtemps après Jésus, ne le verrons pas en chair, ni même sous forme de vision. Que nous l’ayons vu ou non, et même si nous ne sommes pas familiers des miracles, nous aussi, nous pouvons être heureux, comme Thomas et comme les disciples, parce qu’il est donné de croire en attendant le jour où, à la fin des temps, nous le rencontrerons face à face.
Pour résumer, ne méprisons pas ce que nous voyons, mais ne méprisons pas non plus ceux qui ne voient rien. Car ce qui compte, ce n’est pas de voir mais de croire. Et cette foi est un cadeau, une grâce qui ne peut que nous rendre heureux.

L’Homme existe depuis 2 millions d’années. Jésus venu il y a 2000 ans seulement. Pourquoi pas plus tôt ? [Michel]

Il faudra demander au Patron quand nous serons en sa présence ! Plus sérieusement, Michel, je crois que votre question pose un premier problème celui de la définition de l’être humain. Vous faites référence aux estimations scientifiques qui établissent que les premiers individus du genre « homo » (« habilis » de son petit prénom) : il y a environ 2,4 millions d’années. Mais l’homo habilis était-il un être humain au sens où la Bible comprend ce terme ? Je ne suis pas sûr que l’on puisse l’affirmer, d’autant que je ne considère pas la Bible comme un exposé scientifique. Penser que l’on peut faire coïncider ce qui nous est dit dans la Bible avec les recherches scientifiques relève de ce que l’on appelle le « concordisme ». Je ne partage pas ce point de vue. Il me semble que les humains principalement concernés par ce qui est raconté dans la Bible sont ceux qui ont appris à écrire et qui par conséquent ont une Histoire et une conscience que cette Histoire est impactée par Dieu, car c’est autour de Lui, et pas des humains que l’Histoire tourne. Or l’être humain semble avoir commencé à écrire il y a 3500-3000 ans. Par rapport à la venue de Jésus, c’est déjà un peu plus court, non ? Vous pouvez aussi relire le chapitre 11 de a lettre aux Hébreux qui donne un éclairage très intéressant sur les croyants nés avant Jésus.

Est-ce que la théologie, ce n’est pas en fait du pinaillage, souvent ? [Eloïse]

La théologie, comme son nom l’indique, c’est un discours sur Dieu.
Et comme personne n’a jamais vu Dieu (c’est dit en Jean 1,18 et 1Jean 4,12) il est assez compliqué d’envisager un discours 100% scientifique et objectif sur Dieu.

Pour les chrétiens protestants que nous sommes, le critère de référence, qui va permettre de trancher certains débats théologiques, c’est la Bible. Souvent elle est assez claire et radicale, comme par exemple avec le fameux aimez vos ennemis de Jésus en Matthieu 5,44 et Luc 6,27 ou 6,35. Mais parfois c’est plus complexe, parce qu’il y a des formulations imagées, ou des traductions hasardeuses pour rendre le propos initial compréhensible, ou encore des sujets sur lesquels il peut y avoir une absence de textes ou des contradictions d’un livre à l’autre qui sont difficiles à résoudre.

Le débat théologique est bon, car c’est dans la confrontation avec le texte biblique et la lecture qu’en font mes sœurs et mes frères que peut s’activer l’Esprit Saint qui va inspirer en nous une conviction théologique. Mais quand la motivation est d’abord de persuader, de briller intellectuellement, de croiser le fer avec d’autres chrétiens d’autres Eglises, alors là, ça se gâte, et effectivement, il se peut que ce ne soit plus l’Esprit de Dieu qui motive les discussion et qu’on tombe dans le pinaillage, le débat futile, la violence complaisante.

Tout est donc affaire de motivation.
Et la question restera : par quel esprit vivons-nous ces choses ?
Si c’est l’Esprit du Christ, ça se passera mieux.

Pour les protestants réformés, est-ce que Jésus offre son corps et son sang dans la Sainte Cène sous les signes du pain et du vin ? [Kanye]

La réponse est oui ! Mais il convient de l’expliciter. Pour les réformés, le pain et le vin restent d’un bout à l’autre pain et vin, à la différence de nos frères et soeurs catholiques qui confessent que les « espèces » (du latin species, apparence) que sont le pain et le vin deviennent réellement le corps et le sang du Christ. Donc peu importe pour les réformés ce que deviennent le pain et le vin après la communion, alors que dans l’Eglise catholique, une fois consacrés, ils doivent être soit consommés soit pieusement conservés.

Mais par la foi, et parce que le Christ est présent comme il l’a promis dans le don du Saint-Esprit, nous croyons que nous avons réellement part à ce que le pain et le vin nous représentent lorsque nous participons à la Sainte-Cène. Nous sommes unis à Jésus, à sa mort et à sa vie, aussi vrai que nous mangeons de ce pain, et que nous buvons de cette coupe. Et donc unis les uns aux autres qui mangeons de ce même pain et buvons à cette même coupe (ce qui reste vrai même si nous buvons dans des gobelets individuels pour éviter toute contagion).

Une remarque au sujet des récits bibliques d’institution de la Cène par Jésus. Quand il déclare « ceci est mon corps, faites ceci en mémoire de moi », le « ceci » ne renvoie pas au pain lui-même, mais au geste de la fraction du pain qui représente le don par le Christ de sa vie pour nous tous. Il faudrait traduire : « mon corps, c’est ceci » pour éviter l’ambigüité.

D’après la Bible, que se passe-t-il pour ceux qui meurent, en attendant la « fin des temps » ? [Véronique]

Cette question, Véronique, les chrétiens Thessaloniciens se la posaient déjà vers l’an 50. Plusieurs d’entre eux étaient morts sans avoir vu le retour de Jésus-Christ, et ceux qui restaient se demandaient avec tristesse et angoisse ce qu’ils deviendraient. Paul, dans la première lettre qu’il leur adresse, les rassure au sujet de ceux « qui se sont endormis » (= qui sont morts). Ils ne sont pas perdus, au retour du Christ, ils ressusciteront. Voir 1 Thess. ch.4, v.13-18.

Quant à savoir ce qu’il advient des morts en attendant cette Résurrection à la fin des temps, les Ecritures sont assez sobres voire quasi muettes à ce sujet, loin des représentations traditionnelles de ce que l’on appelle le paradis. Un indice se trouve pourtant dans la lettre de Paul aux Philippiens : même si son espérance ultime est la Résurrection à la fin des temps (Phil 3,20s), l’apôtre confie à ses destinataires que mourir lui serait un « gain », qu’il aimerait bien « s’en aller », quitter l’existence terrestre, pour être avec le Christ (Phil 1,23). Nous pouvons donc affirmer que ceux des croyants qui nous ont précédés dans la mort sont d’ores et déjà dans la présence du Seigneur ! Ce que Jésus lui-même a assuré au brigand crucifié avec lui : « aujourd’hui, tu seras avec moi dans le paradis » (Luc 23,43).

Mais ce paradis, répétons-le, n’est pas notre « destination finale ». Dans l’Evangile de Jean, le Christ déclare à ses apôtres qu’il y a plusieurs demeures dans la maison du Père et qu’il s’en va « leur préparer une place » (Jean 14,2). Or le mot grec Monè, traduit par « demeure » désigne une habitation provisoire, un séjour temporaire. Notre ultime destinée, c’est la résurrection, dans une création renouvelée de fond en comble lors du retour du Christ. Et nous l’attendons avec impatience !

Devons-nous croire avec E. Renan que le Dieu des armées est toujours pour la nation qui a la meilleure artillerie ? [Elisa]

L’expression « Eternel des armées » est la traduction de l’hébreu « YHWH Elohim Sebaot » qui est utilisé dans les livres de Samuel, des Rois, des Chroniques, la plupart des livres prophétiques et de nombreux psaumes. Le mot « Sebaot » désigne en hébreu une totalité organisée, obéissant à un même chef. Dans la Bible c’est donc aussi bien une organisation militaire que les astres, des messagers de Dieu, des serviteurs du culte ou des êtres remplissant la création. L’expression vient donc surtout traduire la souveraineté de Dieu sur ce qu’il a créé, et même sur ce que els autres nations prennent pour des dieux. On peut choisir de ne retenir que la compréhension militaire de ce terme, mais je trouve que cela réduit singulièrement sa pluralité de sens.