Oui Cécélie, on peut trouver bien des passages des Ecritures qui nous attestent que nos chemins sont dans la main de Dieu, voulus, tracés par lui. Non seulement dans le récit de la vocation de Jérémie, mais aussi dans les Psaumes (31,16; 139,16a, etc), dans l’épître aux Romains (ch.9,à partir du v.11), ou aux Ephésiens (1,4ss)… C’est ce que l’on appelle l’élection, ou la prédestination. Mais ce n’est pas à confondre avec le fatalisme, qui entraînerait une sorte de résignation passive (du genre « c’est mon destin »), ou d’attente béate que tout nous tombe « tout cuit dans le bec ». Car Dieu qui trace notre vie nous appelle, ce qui suppose de notre part une réponse. Autrement dit, Dieu entre en alliance avec nous, nous rend co-responsables de notre vie, de nos choix, de nos actes. Et partenaires de son projet. Pour signer un contrat, il faut être deux. Paradoxalement (la vérité dans la Bible est toujours paradoxale), c’est cette souveraineté absolue de Dieu qui fonde notre liberté ! C’est réconfortant, certes, mais pas toujours confortable… Demandez à Jérémie (voir sa réponse peu enthousiaste, au verset qui suit celui que vous citez).
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La bague de fiançailles ou bague de mariage est-elle biblique ? Sinon quel objet de croyance pour les chrétiens ? [Alphonse]
Dans l’antiquité, l’anneau était effectivement le signe d’un engagement. On trouve dans la Bible quelques allusions à un échange d’anneau pour formaliser des fiançailles (par exemple Abraham avec Rebecca en Genèse 24, 22 et s) mais il semble que cela n’était pas réservé au mariage (par exemple dans le récit dit du retour du fils prodigue, dans l’évangile de Luc, chap 15, c’est le père qui fait passer un anneau au doigt de son fils).
D’autre part, cet anneau n’est en aucun cas un objet de croyance; il n’est qu’un anneau, c’est à dire un signe qui renvoie toujours à une relation. On ne place pas sa confiance dans un objet, mais dans quelqu’un. Lors d’un mariage, l’échange des alliances n’est que le signe de l’alliance que le couple a décidé de librement contracter et de la confiance qu’ils se font l’un à l’autre.
Que dit le protestantisme par rapport à la prostituée de Babylone ? Est-ce l’Eglise catholique ? [Philippe]
La Grande Prostituée est cette femme évoquée dans le livre de l’Apocalypse qui domine une bête à 7 têtes (représentant à la fois 7 montagnes sur lesquelles elle est assise et 7 rois). Jean, qui reçoit cette révélation biblique de Jésus, s’adresse aux chrétiens pour leur montrer ce qui doit arriver bientôt. Cela lui permet de les encourager ou de les mettre en garde contre eux mêmes et contre le reste de la création.
Cette Grande Prostituée qui porte le nom de Babylone, est la mère de toutes les abominations de la Terre, boit le sang des martyrs chrétiens, brille par ses vêtements (pourpre et écarlate) et ses bijoux (en or, pierres précieuses et perles), exerce une domination sur des peuples et nations. Cette Grande Prostituée sera vaincue par dix rois et la Bête.
Nous voyons ici qu’il s’agit d’images et que les interprétations peuvent être nombreuses et contradictoires. Le protestantisme ne porte donc pas une seule compréhension de ce qu’est cette Grande Prostituée.
Il est vrai que certains protestants (après avoir entendu -plus que lu- que le Réformateur Martin Luther avait publié un ouvrage intitulé « Prélude sur la captivité babylonienne de l’Eglise ») ont pu considéré qu’il s’agisse de l’Eglise catholique romaine. Cependant, cette interprétation est extrêmement minoritaire comme en témoigne les nombreux dialogues et rencontres fraternels entre catholiques et protestants et évangéliques.
D’autres protestants, beaucoup plus nombreux, plaçant ce livre de l’Apocalypse dans son contexte d’écriture, estime que cette Grande Prostituée est l’Empire Romain.
Pour ma part, je demande au Seigneur de m’éclairer sur ce qui en moi, dans mes pensées, mes paroles et mes gestes sont des compromissions avec la Grande Prostituée, au détriment de sa volonté à Lui, Mon Créateur.
Pourquoi Rom 1:16 dit que « la Bonne Nouvelle est pour sauver d’abord les Juifs puis les autres » ? Dieu fait-il une préférence pour les Juifs ou le peuple juif ? Si oui pourquoi ? [Jin]
Toute la Bible vient rendre compte de la manière dont Dieu agit pour sauver la création toute entière -dont l’humanité bien entendu !-
Ainsi, après le temps du déluge, à l’époque de Noé, Dieu va prononcer ces paroles: « Je ne maudirai plus la terre à cause des humains […] et je ne frapperai plus tout ce qui est vivant » et « tous les êtres ne seront plus retranchés par les eaux du déluge, et il n’y aura plus de déluge pour anéantir la terre« .
Cette action de Dieu à sauver sa création passe par une histoire: celle du peuple juif qui va être appelé par Dieu « mon » peuple, puis celle de Jésus Christ né dans ce peuple et parmi lequel il a agit… ainsi que l’ont compris ceux qui l’ont accueilli à l’entrée de Jérusalem en criant « Hosanna ! Sauve ! »
La Bonne Nouvelle du salut est donc adressée par Dieu à son peuple mais aussi à l’humanité toute entière. Il souhaite montrer à toute la création qu’il ne se dégage pas des alliances qu’il a suscité malgré les errances de ses enfants.
La « théologie de l’alliance » est souvent opposée au dispensationalisme. Laquelle est biblique selon vous ? [Miriam]
Votre question est importante, parce que selon que l’on opte pour l’un ou l’autre de ces systèmes théologiques, on aboutit à des conclusions doctrinales et éthiques différentes. La « théologie de l’alliance », bien qu’ayant des appuis chez les Pères de l’Eglise, a été développée par Jean Calvin, le plus influent des théologiens réformés, et peut être considérée comme traditionnelle au sein du protestantisme. Le « dispensationalisme » est un système théologique développé au 19e siècle par John Darby, et popularisé par la Bible annotée de Cyrus Scofield. Il a eu une influence considérable sur le monde évangélique et particulièrement le mouvement pentecôtiste depuis lors.
Ces systèmes sont des tentatives de rendre compte de la logique biblique de l’histoire du salut… Il faudrait rentrer dans les détails de ces deux systèmes et leurs conséquences pour considérer leur pertinence au regard de la Bible… Mais la question du rapport aux textes est me semble-t-il un des enjeux de votre question, et c’est sur ce point que j’insisterai.
Le dispensationalisme apparait comme une réaction contre un certain relativisme quant à l’autorité de la Bible et de ses enseignements. Ce système a prétention à une fidélité littérale à la Bible. C’est par une lecture littérale des prophéties que le dispensationalisme aboutit à une de ses grandes particularités : la distinction les prophéties qui concernent l’Eglise, et celles qui concernent Israël.
Il me semble que respecter l’autorité des Ecritures ne doit pas conduire à une prétendue littéralité qui nous ferait passer à côté de certaines subtilités des Ecritures et de leur logique. Ainsi, la nouvelle alliance n’est pas si nouvelle que cela… elle révèle ce qui en réalité figurait dans les alliances précédentes (Hébreux 8,5 ; 2Corinthiens 3, 14-16). Ensuite, les premiers chrétiens ont considéré vivre l’accomplissement d’un certain nombre de prophéties, bien que non « littéralement », comme la reconstruction du Temple de Jérusalem (Jean 2, 19-22) ou la restauration du royaume de Juda (comparer le livre de Joël avec Actes 2). Dans quelle mesure certaines prophéties ont-elles été ou non pleinement accomplies, symboliquement ou « littéralement » ? Telle est la question. Sur la question très délicate du rapport Eglise/Israël, une théologie réformée traditionnelle, avec sa doctrine de la substitution, ne fait sans doute pas justice à certains textes comme Romains 9-11. Mais la doctrine de la substitution n’est pas non plus sans fondement.
Prudemment, je dirais que les textes bibliques sont globalement clairs et accessibles pour la conduite de nos vies et notre salut. Mais nous avons une distance culturelle avec l’époque d’écriture de ces textes qui rend aujourd’hui complexe certains de leurs aspects. Je crois qu’un certain littéralisme, en réalité marqué par le rationalisme moderne, peut nous éloigner du sens profond de certains textes bibliques, et donc du respect de leur autorité.
Pourquoi certaines personnes ne disent pas Ancien Testament mais Premier Testament ? [Céline]
Certaines personnes, ayant le souci de (re)valoriser l’Ancien Testament, considèrent l’adjectif « ancien » comme péjoratif. Leur souci peut être lié aux relents marcionites dans l’Eglise (Marcion était un homme influent de l’Eglise ancienne considéré comme hérétique pour son mépris de l’Ancien Testament : selon lui, le dieu dont il est question dans l’Ancien Testament serait un dieu mauvais, tandis que le dieu du Nouveau Testament, dieu d’amour, serait le bon), et surtout à un sentiment de responsabilité ou de culpabilité vis-à-vis de l’antisémitisme dans l’histoire de l’Eglise et des pays de culture chrétiernne.
Quelle que soit la raison invoquée pour cette appellation, sa légitimité est discutable : Jésus est bien venu faire une « nouvelle alliance » (« alliance » et « testament » sont synonymes) d’après Luc 22, 20 par exemple, et ce selon l’attente prophétique que l’on trouve dans l’Ancien Testament (Jérémie 31, 33)…. Cela suppose qu’il y a bien une ancienne alliance. La lettre aux Hébreux parle certes de « première alliance », mais la caractérise comme « ancienne » (Hébreux 8,13).