Est-il bien de dire que les protestants sont des catholiques non-romains ? [Françoise]

Il y a plusieurs façons de se définir : en opposition, en écho, en continuité… En France, pour des raisons historiques et parfois par facilité, le protestantisme s’est souvent défini ‘contre’ : par opposition au catholicisme romain notamment. En matière de foi chrétienne, nous sommes appelés à nous définir par rapport au Christ : pour Lui.

De fait les protestants sont des catholiques non-romains. Mais ils devraient d’abord et avant tout être des disciples du Christ. Les protestants sont des chrétiens, dont l’expression de la foi se vit dans une tradition donnée. Leurs liens avec les catholiques romains se font par le Christ et non par le côté catholique.

La Trinité résumerait Dieu à un Père, un Fils et un Esprit-Saint ? Dieu est plus grand que ça, on ne peut pas capter sa nature ; c’est dur de le diviser en trois. Jésus serait Dieu et Fils de Dieu ? [Sarah]

Oui on ne peut pas limiter Dieu dans des définitions.

Mais en même temps on a besoin d’éléments pour le comprendre.

Dire qu’il est Père est un langage pour nous exprimer qu’il est un Dieu relationnel et pas seulement un « étant ».
Dire qu’il est Fils nous dit que quand on regarde Jésus, on voit le Père.
Dire qu’il est Saint-Esprit nous explique que Dieu n’est pas seulement créateur (début), sauveur (milieu), mais qu’il est aussi actuel.

Et dire que Dieu est un et trois à la fois, c’est aussi nous dire qu’il ne faut pas rêver de comprendre parce que c’est mathématiquement impossible. Définir avec de l’incompréhensible, c’est justement dire que ça dépasse nos capacités de perception.

La Trinité est donc un langage.
Ce n’est pas une définition de l’être de Dieu.
C’est une pédagogie.

Jésus est venu accomplir la loi. La loi dit « Tu ne tueras pas ». Personne ne prend la vie de Jésus- mais il la donne… et donc- logiquement- il se suicide. En quoi Jésus accomplit-il alors la Loi ? [Munch]

Le commandement appelant à ne pas tuer, (Exode 20, Deutéronome 5), use d’un mot hébreu qui parle du meurtre prémédité d’une autre personne et donc pas de suicide. Si le suicide est considéré comme une triste chose par les chrétiens, c’est une question de logique. En effet, si Dieu nous donne la vie et une espérance en Jésus-Christ, le suicide est le rejet de ce que Dieu donne.

La question est différente en ce qui concerne le sacrifice de Jésus-Christ, qui accueille, bien au contraire, la vie et la mission que le Père lui a donné, pour le salut des humains. Il accomplit alors la loi en aimant jusqu’au bout les humains dans l’obéissance au Père (Jean 15/13, Hébreux 5/7-9), pour que la vie triomphe (Romains 5/7-9).

Il a agi ainsi afin que nous puissions, dans les bons et les mauvais moment de la vie, compter sur lui et espérer toujours.

Pourquoi Rom 1:16 dit que « la Bonne Nouvelle est pour sauver d’abord les Juifs puis les autres » ? Dieu fait-il une préférence pour les Juifs ou le peuple juif ? Si oui pourquoi ? [Jin]

Toute la Bible vient rendre compte de la manière dont Dieu agit pour sauver la création toute entière -dont l’humanité bien entendu !-
Ainsi, après le temps du déluge, à l’époque de Noé, Dieu va prononcer ces paroles: « Je ne maudirai plus la terre à cause des humains […] et je ne frapperai plus tout ce qui est vivant » et « tous les êtres ne seront plus retranchés par les eaux du déluge, et il n’y aura plus de déluge pour anéantir la terre« .

Cette action de Dieu à sauver sa création passe par une histoire: celle du peuple juif qui va être appelé par Dieu « mon » peuple, puis celle de Jésus Christ né dans ce peuple et parmi lequel il a agit… ainsi que l’ont compris ceux qui l’ont accueilli à l’entrée de Jérusalem en criant « Hosanna ! Sauve ! »

La Bonne Nouvelle du salut est donc adressée par Dieu à son peuple mais aussi à l’humanité toute entière. Il souhaite montrer à toute la création qu’il ne se dégage pas des alliances qu’il a suscité malgré les errances de ses enfants.

Est-ce vrai que d’après les Juifs d’aujourd’hui le nom de Jéhovah est erroné car l’alphabet Juif ne contient pas aucun lettre J ? [Mark]

Dans nos Bibles, le nom de Dieu est traduit le plus souvent par « Seigneur » ou « Eternel ». Ce nom présente la racine du verbe « être » en hébreu (voir Exode 3/14). Le problème se situe moins au niveau des consonnes de ce nom que de ses voyelles. En hébreux, à l’origine, les consonnes seules étaient écrites. YHWH ou JHVH sont des transcriptions possibles des quatre consonnes de ce nom. En revanche, lorsque les voyelles ont été ajoutées au texte biblique, au Moyen-âge, les juifs qui ont entrepris ce travail n’ont pas mis à ce nom ses « vraies » voyelles. En effet, afin de ne pas prononcer le nom de Dieu en vain, il était alors d’usage de ne pas dire ou écrire le nom de Dieu. Ils ont donc ajouté aux consonnes YHWH les voyelles du mot « Adonai » qui signifie « Seigneur ».  C’est par ce nom-ci : « Seigneur » que les juifs et la plupart des chrétiens s’adressent encore à Dieu aujourd’hui.

Comment suivre la Parole sans ce couper du monde ? Y a-t-il des versets dans la Bible là-dessus ? [Marianne]

Qu’est-ce que « suivre la Parole » ? Et même, avant, dirais-je: qu’est-ce que la « Parole » ?

Le quatrième évangile –celui selon saint Jean– offre -en écho avec les premières pages de la Bible qu’est le livre de la Genèse- une réponse à cette dernière question: la Parole est ce qui a amené à l’existence toutes choses. La Parole est donc connu pour l’action qu’elle produit: donner la vie.
Puis l’évangile rajoute : la Parole a pris corps (chair) afin de donner, selon la volonté de Dieu, le pouvoir de devenir son enfant (à Dieu).

Comme nous sommes des individus « incarnés », Dieu a choisi d’incarner sa Parole. Cela, pour nous permettre d’en être mieux saisi, de mieux voir ses bienfaits.

Dieu réalise des actions accessibles pour nous, afin de nous permettre d’être épanouis avec nous-mêmes, avec notre environnement (toute la création) et avec lui. Ces actions sont donc « dans le monde créé ». Dieu ne veut pas nous sortir du monde.

Suivre la Parole, c’est suivre Christ, c’est recevoir un épanouissement de sa vie, dans ce monde.
Pourtant, l’esprit du monde ne souhaite pas nous voir épanouis. Cela explique que nous sommes méprisés, rejetés, écrasés.
Le chrétien est donc appelé, par la seule puissance de la Parole de Dieu (Christ), à combattre l’esprit méprisant du monde et à annoncer la vie véritable, à vivre une vie dans et par la vérité.

Comment parler de Dieu le Père à ceux qui ont une relation conflictuelle (conflit, absence, traumatisme…) avec leur père terrestre ? [Philippe]

Si Dieu s’est présenté à nous comme un père, c’est bien parce que la paternité était supposée être une valeur positive, faite de réassurance et de tendresse, de sécurité et de douceur, de normativité et d’amour.
Si Dieu s’est présenté à nous comme un père, il est logique que l’ennemi du Christ ait envie de nous démontrer que la paternité ne tient pas la route, qu’elle n’est que lâcheté ou violence.

Alors plutôt que de regarder la paternité de Dieu à partir de nos expériences toujours imparfaites de la paternité terrestre, la Bible ne nous appelle-t-elle pas à regarder plutôt dans l’autre sens : jeter un regard de bonté et de miséricorde sur les pères terrestres, peu capables d’incarner ici-bas cette superbe paternité d’en-haut, celle de Dieu le Père. Nous n’avons pas à juger la paternité de Dieu sur la base des paternités abîmées de ce monde, mais plutôt à regarder les pères terrestres comme étant appelés à s’inspirer de la Paternité de Dieu pour vivre leur autorité et leur amour d’une façon différente ici-bas. S’ils sont lâche, qu’ils soient inspirés à être courageux. S’ils sont absents qu’ils apprennent à se rendre présents. S’ils sont violents, qu’ils se convertissent à la tendresse.

Renversons les représentations.

Dans Luc 16,9 Jésus a dit : « Faites-vous des amis avec les richesses injustes ». Quel rapport entre richesse et les tabernacles éternels ? [Unkn]

Les richesses sont de ce monde. Les tabernacles éternels évoquent la Vie éternelle.
Toute richesse dans ce monde livré à Mammon est en quelque sorte injuste. Si nous comptions sur l’Esprit de Dieu conformément aux béatitudes, nous ne manquerions de rien, nous n’aurions pas peur de manquer et donc pas besoin d’épargner. L’argent, à part comme moyen de faire circuler la richesse, ne sert à rien. Et nous n’emporterons rien dans la tombe.

S’opposent ici la logique du monde et celle du Royaume.
Si je cherche à capitaliser l’argent de ce monde j’investis dans les espoirs vains du monde.
Si je cherche à investir sur le Royaume, je suis prêt à tout utiliser de ce monde dans le seul but de gagner les uns et les autres pour le Royaume, de les gagner pour le Salut et la vie éternelle. Il n’y a plus que ça qui compte.

En français on dit que l’argent n’a pas d’odeur, ce qui signifie, paradoxalement, par antinomie, qu’il est toujours sale.
L’argent sale ce sont les ressources utilisées pour moi de façon narcissiques.
L’argent nettoyé c’est celui qui est, même d’origine injuste, investi dans le Royaume de Dieu et sa justice.

Comment utilisons-nous nos bien ?

Le plan du Salut (Romains 8 : 28-30) : cette réflexion me porte directement vers la prédestination. Qu’en est-il alors de ceux qui ne sont ni prédestinés- ni appelés ? [Carole]

Ce passage de l’épître aux Romains souligne que  Dieu nous sauve en Jésus-Christ, quand bien même nous ne pouvons rien faire de nous-mêmes pour nous sauver.  Ainsi apprenons-nous que c’est Dieu qui « gère » notre salut, et que nous pouvons donc lui abandonner nos vies, dans la confiance.

Nombreux sont ceux que l’idée de prédestination angoisse. Ils pensent à ceux qui ne sont pas prédestinés au salut et semblent donc injustement exclus. Ils ont peur d’être de ces derniers et se demandent comment vérifier qu’il n’en sont pas.  Ce mode de pensée est étranger voir opposé à la manière confiante de penser à laquelle Paul nous convie. En effet, si Dieu est Dieu et s’il gère le salut, ne le gérera-t-il pas correctement ? Et quand bien même je ne serais pas prédestiné au salut, cela pourrait-il être pour mon mal si telle était la juste volonté de Dieu ?

Dieu gère le salut et il  le fait bien. Il a aimé le monde et il l’a sauvé en Jésus-Christ. La Bible nous dit que certains seront sauvés quand d’autres ne le seront pas. Notre affaire n’est ni de le comprendre ni de le savoir. Notre affaire est de croire.

Comment parler de Dieu le Père à ceux qui ont une relation conflictuelle (conflit- absence- traumatisme-…) avec leur père terrestre ? [Philippe]

D’abord en les écoutant, pour entendre où se situe chez eux le problème dans leur relation avec leur père terrestre, et en quoi cela peut affecter pour eux la notion de Dieu comme Père.

Ensuite, je crois qu’il ne faut pas forcer le dialogue dans le sens de : « Si tu ne crois pas à Dieu le Père, ou si tu ne pries pas Dieu le Père, tu n’es pas un bon chrétien… » Après tout, si Dieu est venu jusqu’à nous en Jésus-Christ, le Fils, c’est aussi pour inviter les humains à une rencontre à un autre niveau que seulement la relation Père-enfants.

Dieu n’est pas que Père. Il est aussi Fils, (et donc, pour nous chrétiens, en quelque sorte, frère en Jésus) et Esprit (en hébreu, le mot traduit par Esprit, rouah, est féminin) ; Dieu peut être ému aux entrailles quand il voit ses enfants souffrir. Or cette manière de parler de lui relève de la féminité plus que de la masculinité. La tendresse de Dieu est infinie, comme sa patience. Si quelqu’un a du mal avec la notion de Père, pas de souci, donc.