J’ai lu des théologiens libéraux américains. Ils rejettent Noël comme un mythe parce que Marc (ancien évangile) ne le mentionne pas. L’incarnation est-elle fausse? Jésus de Fils de Dieu par adoption ? [Sophie]

Si nous voulons appuyer notre foi sur la pensée humaine, nous pouvons croire ce qu’avancent les théologies libérales au grès des modes et des temps. Si nous voulons appuyer notre foi sur la Bible, telle qu’elle est reçue par l’Eglise depuis les premiers siècles de son histoire, nous devons croire en l’incarnation. Ayant confiance en l’Esprit, qui a conduit la rédaction des Écritures et sa réception, j’ai fait le choix d’appuyer les contenus de ma foi sur la Parole telle qu’elle nous est donnée à travers les différents livres de la Bible.

Lorsque je lis la Bible, je remarque que les Évangiles de Luc et de Matthieu parlent de la naissance du Christ, Fils de Dieu, que l’Évangile de Marc, s’il ne raconte pas cette naissance, ne remet pas en question cette donnée (Marc 14/61-62) et que l’Évangile de Jean est on ne peu plus clair sur ce qui advint en Christ (Jean 1, Jean 16/28 etc). Paul, dans ses lettres, est fidèle à cette donnée, reprenant, dans l’un des plus beau passage de l’Ecriture, ce qui était probablement un hymne de la première Eglise (voir Philippiens 2/5-12).

Il est remarquable que la doctrine de  l’incarnation donne toute sa cohérence et sa spécificité à la foi chrétienne. Alors que les autres religions invitent l’homme à s’élever vers Dieu par toutes sortes de moyens, nous croyons que notre Dieu est venu vers nous pour nous libérer du péché et de la mort. C’est parce que  Jésus a été homme qu’il a pu prendre sur lui le péché des humains. C’est parce qu’il est Dieu qu’il nous en a libéré.

Quel est le point de vue d’un catholique romain sur la Bible et sur la Trinité ? [Cle]

Il serait plus honnête de poser votre question aux catholiques eux-mêmes, répondre à la place de l’autre prend toujours le risque de le trahir (et le site eglise.catholique.fr comprend une rubrique « approfondir sa foi » qui répondra sans doute à beaucoup de vos questions). Qui plus est quand chacune de vos questions a suscité beaucoup de débats entre les chrétiens depuis 2000 ans. Cela dit, et pour résumer très grossièrement :

  • La Bible, pour les catholiques comme pour les autres chrétiens, est la Parole de Dieu. Nous croyons tous que Dieu peut communiquer avec nous, entre autres à travers ces vieux textes qui racontent comment Dieu s’est révélé à l’humanité. La différence avec le monde protestant ne tient pas dans cette définition, mais plutôt dans la façon d’interpréter cette Parole, et dans le monde catholique c’est le magistère de l’Église, son enseignement, qui donne les clés de lecture nécessaires à cette interprétation. Pas dans le monde protestant.
  • Là aussi, la ligne de démarcation entre les différentes compréhensions de ce concept théologique ne passe pas entre les catholiques et les autres. je me permets donc de vous renvoyer à la réponse déjà faite sur la Trinité ici : http://1001questions.fr/comment-expliquer-simplement-ce-quest-la-trinite-kristina/

Est-il vrai qu’une fois qu’une personne est sauvée, elle est sauvée pour toujours ? [Laurent]

Si nous sommes sérieux avec le fait que le salut est opéré par Dieu via Christ et par pure grâce, par le moyen de la foi, comme le dit Paul notamment en Ephésiens 2,8, alors je ne vois pas comment qui que ce soit pourrait détruire un salut acquis par celui dont le nom est au-dessus de tous les autres noms (Philippiens 2,9-10), c’est-à-dire qui est l’autorité ultime.

Ce qui signifie que quelqu’un qui croit ne peut pas perdre le salut.
C’est clair et net.

Les deux réserves à cette idée sont :
– le cas de quelqu’un qui blasphémerait contre le Saint-Esprit (Luc 12,10),
– la personne franchement rétrograde qui finit par refuser explicitement le salut que Dieu lui avait donné (Hébreux 6,1-8).

« Cette parole est certaine : si nous sommes morts avec lui, nous vivrons aussi avec lui ; si nous persévérons, nous régnerons aussi avec lui ; si nous le renions, lui aussi nous reniera ; si nous sommes infidèles, lui reste fidèle, car il ne peut se renier lui-même. » (2Timothée 2,11-13)

Un enfant d’une dizaine d’années peut-il demander le baptême ? La liturgie du baptême réformé se base sur la foi des parents et non celle de l’enfant (même si l’enfant est conscient de sa démarche). [Mimi]

Il y a deux liturgies dans l’Eglise protestante unie de France, une pour le baptême de bébés et une pour le baptême d’adultes. Si l’on part du principe qu’un enfant de dix ans est conscient de sa démarche, cela fait de lui, du point de vue cognitif un adulte (conscience de soi), et donc nous sommes supposés utiliser la liturgie de baptême d’adulte.

[Chaque Eglise ayant ses règles, nous ne présentons ici que la règle de l’EPUdF puisque 1001questions est animé par des théologiens, pasteurs et non-pasteurs, qui sont membres de l’EPUdF. Pour d’autres dénominations, merci de vous renseigner directement auprès des bureaux nationaux de ces Eglises.]

Peut-on prendre la Sainte-Cène chez soi (seul ou en famille) si l’on considère que le pasteur n’a pas d’autorité particulière pour la donner- et que l’on ne reconnaît pas la transsubstantiation ? [Julien]

La Cène n’est pas un simple repas commémoratif (comme le rallumage de la flamme au pied du tombeau du soldat inconnu). C’est aussi un acte par lequel, en communauté, nous accueillons la réalité vivante du Christ dans l’assemblée réunie et ouverte à sa présence par l’action du Saint-Esprit. C’est donc un acte communautaire vital pour l’Église. Ce n’est pas parce qu’il n’est pas nécessaire qu’une personne particulière préside ce moment qu’on peut le vivre tout seul ! Par contre, célébrer une Sainte Cène chez soi, avec sa famille ou ses proches, ou encore aller la partager avec des malades qui ne peuvent pas se rendre au culte me semble être bien sûr un acte communautaire tout à fait possible et même utile dans bien des circonstances.

Pourquoi nos prières ne sont parfois pas accomplies- même lorsque nous demandons de bonnes choses au nom de Jésus ? [Elodie]

Cette question renvoie à des situations souvent douloureuses relatives au non exaucement de prières que nous faisons en exprimant des besoins ou des désires très forts à notre point de vue. On peut alors avoir l’impression que Dieu nous rejette, ne nous aime pas, ou que notre péché est trop fort pour que le Seigneur ait de la considération pour nous. Je crois avant tout important de refuser de rentrer dans de telle considération. C’est souvent une ruse de l’adversaire, même s’il n’est jamais mauvais de relire régulièrement sa vie à l’aune de ce qu’implique l’Évangile, et au besoin de remettre certaines choses en ordre. Mais il ne faut jamais oublier que la prière est une manière de se tenir devant un Autre. Quelqu’un qui n’a pas le même point de vue que nous sur notre vie. Quelqu’un que nous appelons le Seigneur. C’est-à-dire que ce n’est pas lui qui a à agir selon nos désirs. C’est bien le contraire qui doit se passer ! Je pense à ce moment où Jésus a guérit un homme possédé par un esprit impur appelé légion (Marc 5. 1-20). Cet homme n’avait rien demandé et Jésus lui a fait un grand bien puisqu’il l’a rétablit dans « son bon sens ». Pourtant, quand cet homme, sans doute débordant de joie et de reconnaissance pour Jésus, le supplie de le prendre avec lui pour l’accompagner, Jésus refuse. Quelle frustration ! Mais c’est que Jésus a un autre projet pour cet homme, qui lui permettra d’être vraiment le disciple qu’il avait envie d’être : « Va dans ta maison, vers les tiens, et raconte-leur tout ce que le Seigneur a fait pour toi, comment il a eu pitié de toi. » Pour nous comme pour cet homme, Dieu n’accède pas toujours à nos demandes selon notre point de vue. Mais sa vision des choses dépasse de loin la nôtre, et c’est tout de même pour le bien que parfois nous pouvons éprouver des frustrations.

Devrions-nous jamais nous référer à Jésus comme « Dieu » ou juste comme « Fils de Dieu » ? Devrions-nous adorer et révérer Jésus ou Dieu le Père seul ? [Solitaire]

Le Nouveau testament parle de Jésus comme Fils de Dieu, pas directement comme Dieu. Dans l’évangile de Jean au chapitre 14 Jésus se présente comme unique chemin vers le Père. Dans ce même chapitre Jésus fait la promesse de l’envoi de l’Esprit, qui sera avec nous pour toujours.

A vos deux questions je répondrais que la foi consiste d’abord à être en relation personnelle avec Dieu et à l’écoute de Jean 14 précisément en lien avec Dieu au nom de Jésus par l’Esprit. Cela me parait plus important que ce référer à lui comme ceci ou cela. De plus comme Jésus le dit lui-même, toujours dans ce chapitre 14, connaissant Jésus vous connaîtrez aussi son Père.

Noé est-il basé sur Gilgamesh ? Jésus et Pierre parlent comme s’il était une personne réelle. [P]

Plusieurs cultures antiques ont dans leur patrimoine des récits de déluge. Certains pensent que la version biblique est plus récente que celle de l’Epopée de Gilgamesh car des spécialistes datent ce texte babylonien du XVIIe siècle av J.-C., ce qui n’est pas prouvé pour la version biblique. Le récit de Noé serait alors, pour certains, inspiré du texte babylonien.

Toutefois, il n’y a aucune preuve à cela. Il s’agit sans doute de versions différentes d’un même évènement, dont l’exacte historicité selon des critères occidentaux du XXIe siècle n’est pas la première préoccupation. Le texte babylonien sert d’apologie du pouvoir babylonien et de leurs dieux, celui de la Bible du pouvoir du Dieu unique. Les Ecritures servent en effet à enseigner, convaincre, corriger et instruire dans la justice (2Tim 3,16-17). Et il n’est pas impossible que le texte biblique soit écrit en polémique avec la version babylonienne, même s’il a des fondements historiques.

Si les points communs entre les deux récits sont évidents, les différences du texte biblique avec l’Epopée de Gilgamesh sont également très importantes :

  • ce n’est pas par inconvenance liée au bruit que Dieu suscite le déluge, mais le cœur peiné du mal accompli par les Hommes (Gn 6,5-7)
  • il n’y a pas conflit de volonté entre des divinités capricieuses et injustes : c’est le Dieu unique et qui veille à la justice qui est aux commandes des évènements
  • le déluge dure quarante jours, temps hautement symbolique
  • Dieu n’accorde pas l’immortalité à Noé, puisque le péché est encore présent dans la création

Si Dieu a tout créé, pourquoi a-t-il créé des choses dangereuses comme des animaux dangereux, des maladies et des virus ? [Elodie]

Le livre de la Genèse nous parle de la création du monde par Dieu, mais pas dans une perspective scientifique comme la nôtre aujourd’hui, plutôt dans la préoccupation du « sens de la vie ». Dieu crée les choses du monde. L’écosystème terrestre inclue la vie et la mort, même pour l’humain après le chapitre 3. Le lion mange la gazelle, la gazelle mange les feuillages. La prédation fait partie du processus de la vie et de la mort. Les bactéries et autres virus permettent la régulation de certaines destructions, la limitation d’une croissance exponentielle de certaines espèces… Cet équilibre est quand même assez merveilleux, bien qu’il inclue la violence, c’est vrai.

Maintenant, puisque la perspective de la Genèse est la question du sens, il est clair que le type de création dont nous parle le premier livre de la Bible est très particulier. Il s’agit de façonnage plus que de création. Le verbe BARA utilisé en hébreu et qui est traduit par créer est un verbe de l’artisanat. Au commencement il y a surtout le TOHU BOHU (la Terre était informe et vide). Le processus de création est plus de l’ordre la mise en ordre que de la baguette magique. Il y a de la matière qui « est-là », et Dieu met de l’ordre dans toute cette confusion, il sauve le monde de l’indifférenciation et du chaos, de l’indétermination et de la vacuité.

La théologie du rédacteur de la Genèse met donc en place ce qui sera la dynamique de toute l’Ecriture : Dieu veut nous sauver, nous extraire du désordre, nous retirer du magma, pour faire quelque chose de beau, de très beau. C’est pour cela que nous continuons la dynamique créationnelle de Dieu par rapport à ces chose qui « sont-là » et nous paraissent mauvaises.

Que dire à une personne s’interrogeant sur la réincarnation? Quels arguments avancer ? Cette même personne désirant connaître le point de vue chrétien sur le sujet. [Myriam]

Vous pouvez expliquer à cette personne que l’espérance chrétienne n’est pas la réincarnation mais la résurrection. C’est la promesse de Jésus, qui affirme : « La volonté de celui qui m’a envoyé, c’est que je ne perde rien de tout ce qu’il m’a donné, mais que je le ressuscite au dernier jour. La volonté de mon Père, c’est que quiconque voit le Fils et croit en lui ait la vie éternelle; et je le ressusciterai au dernier jour. » Jean 6/39-40.
C’est ainsi que Dieu, créateur et restaurateur de notre esprit, de notre âme et de nôtre corps, nous donnera à la fin des temps de vivre avec lui toujours, avec notre esprit, notre âme et notre corps alors libérés du péché, du mal et de la mort. Il s’agit du corps glorieux dont il est question en Philippiens 3/20-21, voir aussi 1 Corinthiens 15/35-58.

L’idée de résurrection semble assez folle à beaucoup. Je la trouve, quant à moi assez pertinente car :
-Elle dit la réalité de la mort puisqu’elle postule que rien en nous n’a la capacité de perdurer par elle-même. Elle nous force à mettre notre confiance en Dieu seul, alors que l’idée de réincarnation, laisse croire aux gens que quelque chose perdure d’eux-même.
-Elle dit la puissance de Dieu, qui a créé et peut recrée.
-Elle dit l’amour de Dieu, qui nous aime tels que nous sommes, corps, âme et esprit et veut nous garder ainsi (voir Psaume 139).

En revanche l’idée de la réincarnation telle qu’elle est apprécie en occident me semble souvent reposer sur des phantasmes. On s’imagine volontiers vivre une autre vie, avoir un autre corps, tout en restant soi-même et on trouve cela plutôt cool de s’imaginer en grenouille sautant de nénuphar en nénuphar. C’est négliger le rôle que le corps a dans notre vie. Or, sera-t-on vraiment nous-mêmes avec un corps de grenouille et le cerveau qui va avec ?
N’oublions pas que dans le bouddhisme, qui est la religion qui a répandu l’idée de la possibilité d’une réincarnation, cette dernière est une punition, le but de l’humain étant de ne plus se réincarner pour atteindre la félicité.