Quelles différences entre luthériens- réformés et baptistes ? [Lulu]

Luthériens, réformés et baptistes font ensemble partie de la même famille protestante. Comme vous le savez sans doute déjà, il y a pas mal de nuances en son sein, qui en fait une sorte de kaléidoscope.  

En l’occurrence, la différence entre ceux qu’on peut nommer les luthero-réformés et les baptistes est loin d’être négligeable, puisqu’il s’agit de la question du baptême. Autrement dit de l’entrée dans la vie chrétienne. A ma gauche, les luthéro-réformés reconnaissant la validité du geste consistant à baptiser les enfants ; à ma droite les baptistes ne prenant en compte comme vrai baptême qu’un baptême choisi et accompli par une personne d’âge mûr, en son âme et conscience. Au coeur du débat se trouve le rôle des croyants dans l’oeuvre de salut. A ma gauche, on insiste sur la force irrésistible de la grâce ; à ma droite, sur la nécessaire profession de foi du baptisé. 

Cette différence est ancienne, puisqu’elle remonte au 16ème siècle, c’est-à-dire à la naissance même du protestantisme. En héritier de Saint Augustin, Martin Luther avait une très haute idée de la grâce de Dieu, et beaucoup de réserve quant au bien-fondé des décisions humaines. Il était soucieux aussi de changer l’Eglise de l’intérieur, en en conservant des fondements, en particulier les sacrements du baptême et de la Sainte-Cène. Sa position favorable au baptême des enfants peut s’expliquer par ces deux éléments. A la même époque se dessina une réforme plus radicale, menée par des chrétiens anabaptistes, rejetant la tradition du baptême des enfants, et mettant en en avant la nécessité de la nouvelle naissance des croyants dans le baptême. C’est de cette branche que viennent les baptistes, dont les premières communautés apparaissent en Angleterre et aux Pays-Bas au début du 17ème siècle. 

Pourquoi dit-on des protestants qu’ils sont des hérétiques ? [Véronique]

Pour répondre à votre question Véronique, il serait utile de savoir qui est le « on » qui traite les protestants d’hérétiques.

Un peu d’explication s’impose. Hérésie vient d’une racine grecque signifiant « prendre », « saisir ». C’est étymologiquement l’adoption d’une doctrine, d’un système de pensée particulier, en opposition à d’autres.  Sans connotation forcement négative, il peut s’agir donc d’un parti  religieux notamment (voir Actes 15,5 pour les pharisiens, 5,17 pour les sadducéens par exemple. Il est intéressant que le mouvement de Jésus est appelé dans les Actes non un parti ou secte, mais la « voie », un chemin qui mène vers Dieu et non un enfermement dans un cadre doctrinal étroit).

Paul met en garde contre les hérésies : « il faut des dissensions (hérésies) parmi vous », écrit-il aux Corinthiens tentés par l’esprit sectaire et diviseur, « pour que ceux d’entre vous qui résistent à l’épreuve puissent se manifester » (1 Corinthiens 11,19). Autrement dit l’hérésie est ici synonyme d’une déviance par rapport aux vérités essentielles de l’Evangile.

Dans l’histoire de l’Eglise, des doctrines fausses sont apparues et réapparaissent régulièrement, comme l’arianisme qui niait la divinité de Jésus-Christ. Hérésie, au sens négatif cette foi, qui a été condamnée par le concile de Nicée-Constantinople (dont nous célèbrerons en 2025 les 1700 ans). L’Eglise catholique a condamné à partir du 16e siècle les « hérésies » du Protestantisme parce qu’il s’éloignait en certains points de la doctrine officielle de Rome. Sauf que la référence, pour distinguer le vrai du faux, n’était plus le seul enseignement biblique vers lequel les Réformateurs ont voulu revenir, mais la tradition de l’Eglise Romaine, qui s’en était éloignée en plusieurs points importants.

Je pense que depuis le concile Vatican II, seuls des catholiques intégristes ou traditionnalistes nous appliquent encore ce terme péjoratif et méprisant.

Puis je perdre mon salut si je vis hors mariage ? Je suis née de nouveau et mon compagnon refuse le mariage. [Déborah]

D’abord, traitons la question de la perte du salut.
Comment votre salut s’est-il mis en place ? Vous dites que vous êtes née de nouveau. Quelqu’un maîtrise-t-il sa naissance ? Personne.

Pour la nouvelle naissance, c’est juste la réception du message de la grâce de Dieu en Jésus-Christ qui nous ouvre la possibilité de dire : « Oui Père céleste, j’accepte d’être ton enfant, d’être sauvé.e et de naître de nouveau ».
Votre salut a été proposé et, une fois accepté, garanti et scellé par le sang de Christ.
Qui peut détruire quelque chose que Christ a construit ?
Le salut n’est pas quelque chose que l’on peu perdre à cause du péché, car Christ sait bien que nous demeurons des créatures marquées par le péché. La différence avec notre vie d’avant, c’est que, par l’accès au Père que nous garantit Jésus, à cause justement du salut qu’il nous a donné, nous pouvons demander pardon pour notre péché et en être lavés.

On ne peut donc « perdre son salut », en aucun cas.
On peut le refuser, mais ce serait un acte de rébellion consciente et frontale qui ressemblera de près à ce que Jésus appelle « blasphème contre le Saint-Esprit », quand on maudit Dieu en face droit dans les yeux, si j’ose dire.

Donc, vous ne pouvez pas perdre votre salut pour une question de statut conjugal.

1 Corinthiens 7:12-14 nous dit : « Si un frère a une femme non croyante, et qu’elle consente à habiter avec lui, qu’il ne la répudie point ; et si une femme a un mari non croyant, et qu’il consente à habiter avec elle, qu’elle ne répudie point son mari. Car le mari non croyant est sanctifié par la femme, et la femme non croyante est sanctifiée par le frère. »

Il faut donc plutôt intercéder pour votre conjoint. Il a peut-être dans sa tête l’idée qu’il y a de « bonnes raisons » de ne pas se marier :
– peut-être est-il insécurisé et inapte à prendre des engagements durables ; un accompagnement spirituel lui serait d’un plus grand bien,
– peut-être a-t-il eu de mauvaises images de la conjugalité, des expériences fâcheuses, à commencer par le couple de ses parents ou dans la famille ; il doit vivre une guérison intérieure.
– peut-être trouve-t-il que la pression que met l’Eglise, la famille, la société, et sa fiancée, est très étrange ; vous avez besoin de parler plus de l’intérêt d’être mariés.
– ou bien d’autres possibles encore…

Quoi qu’il en soit, dialoguez, et ne le « coincez » pas dans vos raisonnements, vos craintes, et vos discussions. Priez et Dieu fera le reste.

Pourquoi fallait-il que Jésus soit sacrifié pour nous sauver ? Dieu est bon- pourquoi a-t-il mis en place cette « règle du jeu » barbare ? [Alexis]

C’est vrai, Alexis, que la théologie chrétienne est allée jusqu’à présenter la mort du Christ un peu comme une “ règle du jeu “ destinée à satisfaire mécaniquement, ou mathématiquement la soif de colère du Père envers l’humanité. Et dans certaines Eglises, ou certains milieux, on se plaît à souligner toute la barbarie de la crucifixion, que la Bible, elle, se garde d’étaler. La logique est alors : plus le sang coule, plus le prix payé par le Christ pour notre salut est important ! 

Les Ecritures lient évidemment la mort du Christ, et donc, d’une certaine manière sa souffrance, au salut des croyants. Pourtant, il est juste de voir en elle plus le signe d’un amour que d’une cruauté. Je propose trois réflexions pour l’étayer. 

Le Christ ne vit sa mort comme un abandon que dans les derniers instants. Abandon à la volonté du Père (Matthieu 26, 42). Le reste de sa vie laisse voir le Messie qui se donne pour les autres. Une vie où le don est plus fort que l’abandon, et c’est aussi cette force du don qui conduit à la mort. 

Sa mort n’est pas la fin de l’histoire, mais sa résurrection, qui est vécue par les croyants, et présentée par les textes comme une victoire. La souffrance du Fils n’est donc pas le dernier mot, mais son élévation et son règne avec le Père, dans la réconciliation. La communion du Père et du Fils n’est pas rompue. 

Le pourquoi de la souffrance du Christ reste malgré tout un mystère que devant lequel nous plions le genou, parce que ses dimensions ultimes nous échappent (Philippiens 2, 6-11). En étant près du Christ, on comprend cependant que ce n’est pas souffrance qui est recherchée, mais le salut et la vie. 

Est-ce que l’IA ne va pas devenir une divinité pour certains ? [Joëlle]

L’intelligence artificielle (IA) se développe d’une façon exponentielle, et d’un mois à l’autre, des progrès fulgurants sont faits au niveau technique.

Il est saisissant de tester qu’effectivement, sur ChatGPT par exemple, on peut poser des questions, notamment sur la Bible, qui peuvent trouver réponse très rapidement : « Trouve moi des versets sur le rapport à l’argent et l’idolâtrie qui peut naître autour des richesses ».

Les résultats sont spectaculaires, intéressants, et je note très peu d’erreurs.

Là où cela devient plus compliqué, c’est quand on pose une question dans un registre de foi, de théologie, ou de la Bible, et que notre attente est existentiellement ou spirituellement très (trop ?) intense. Oui, il y a là le danger de penser que l’aspect fascinant d’une réponse faite par une puissance de calcul bien au-delà de nos capacités, puisse être prise pour une réponse vraie et parfaitement vraie, et que cette fascination et cette intensité confinent au domaine de la foi. C’est bien formulé. C’est vérifiable. C’est efficace. C’est la vérité.
Il n’y aurait qu’un pas pour que nous nous mettions à dire : « Le Saint-Esprit m’a parlé au travers d’une réponse de ChatGPT », ce qui est encore correct. Mais ça deviendrait plus compliqué dès lors que le constat se formulerait de la façon suivante : « ChatGPT me guide vraiment pour comprendre la volonté de Dieu ». On sent que dans cette dernière formule il y a une confusion entre un outil qui brasse de l’information, et la pertinence que seul le vrai Saint-Esprit peut apporter dans une réponse de la part de Dieu.

A terme donc, il est fort probable, comme le dit Y. Hariri dans « Nexus », que l’IA crée de vraies religions… et — c’est moi qui rajoute — que pas mal de chrétiens mettent leur foi plus en ChatGPT qu’en Dieu, simplement parce que l’outil informatique semble plus intelligible et ne nécessite pas la patience et l’attention que requiert la prière.

Certains font appel à un magnétiseur pour leur santé. Quel est l’impact sur le plan spirituel ? [Nicole]

Il serait hasardeux, Nicole, de donner une réponse catégorique à votre question. Cet impact que vous mentionnez dépend à mon avis de plusieurs critères d’appréciation. J’en mentionnerai deux, les principaux pour moi :  

D’abord, de quelle pratique parlons-nous, exactement ? Entre un praticien qui utilise le rayonnement des pierres, relevant d’une chimie naturelle, et un autre qui se réclame d’un don de guérison transmis de génération en génération, il existe à mon sens une différence qualitative. Le deuxième cas est le plus susceptible d’atteindre spirituellement la personne “ soignée “, étant donné le mystère qui entoure en général l’origine de ce don. Une puissance qui ne dit pas son nom peut s’avérer nuisible, et c’est souvent le cas. Mieux vaut ne pas s’y fier, quand bien même elle serait efficace d’un point de vue de la santé physique.  

Ensuite, quelle est la disposition intérieure de la personne se soumettant au soin ? Est-elle psychiquement et spirituellement dans un état de vulnérabilité ? Si c’est le cas, elle sera d’autant plus exposée. Par vulnérabilité, j’entends aussi le fait de vouloir la santé à tout prix, ce qui peut être une entrave à la confiance en Dieu, confessé comme étant celui qui sauve son enfant dans la santé et dans la maladie. La santé est un bien éminemment souhaitable, mais on ne peut pas se jeter en son nom à corps perdu dans toutes les mains.  

La foi proclame que Christ est vainqueur de toute puissance de ce monde. Approprions-nous cette victoire, sans négliger le mal, mais sans nous y soumettre dans la peur.  

Peut-on être protestant et préférer la réincarnation à la résurrection ? [Pierre]

Un protestant est, avant tout, un chrétien. C’est à dire un disciple de Jésus-Christ.  Sa foi en Jésus-Christ est particulièrement « colorée de protestantisme » en fonction de plusieurs critères bien connus. Parmi eux, sa confiance en la seule autorité des Ecritures recueillies dans la Bible, inspirées par l’Esprit Saint, pour éclairer sa conscience et fonder ses convictions. Ainsi, un protestant ne croira pas en tel ou tel dogme ou article de foi selon ses goûts ou préférences, mais s’il est conforme à ce que dit la Bible (même quand ce que dit la Bible le heurte ou le dérange !).

Beaucoup de nos contemporains sont séduits par l’idée d’une réincarnation de l’âme, comme si une nouvelle chance, une autre vie nous était donnée au-delà de notre mort physique. De même, si j’ose la comparaison, qu’après une partie perdue dans un jeu vidéo, on peut appuyer sur la touche « reset » pour une nouvelle tentative. La croyance en la réincarnation repose sur l’idée d’un progrès spirituel de l’être humain qui, par ses efforts, parviendra ultimement à se libérer de la « roue du karma », le cycle des existences successives, encore appelé « Samsara ». Notions centrales du bouddhisme et de l’hindouisme qui voient dans la condition de tout être le résultat, la conséquence des actes commis dans ses vies antérieures.

Rien dans la Bible n’appuie une telle conception de la vie, de ses joies et de ses souffrances, de ses bonheurs ou malheurs. Nous n’avons qu’une seule vie, don du Créateur, et elle est appelée à l’éternité. La résurrection de Jésus-Christ n’est pas une migration de son âme d’un existence à une autre, mais la victoire de Dieu sur la mort dont il relève son Fils. Victoire qui est gage et promesse du Salut qui s’accomplira dans notre propre Résurrection (car la mort est la conséquence de notre péché) . Cette vie nouvelle et éternelle est l’œuvre du Seigneur : elle n’est pas le résultat de nos mérites ou de nos efforts, même religieux. Elle nous est offerte  gratuitement, par l’amour de celui qui a livré son propre fils pour nous tous (Romains 8,32). Et elle commence dès aujourd’hui, dans la foi.

 

D’où Abraham connaissait Dieu pour entendre son ordre de quitter son pays ? [Lisette]

Abraham (qui s’appelait d’ailleurs encore Abram), était un païen. Et pourtant il a entendu l’ordre de Dieu. D’après Jean 1,9, dès le commencement du monde, la lumière de Dieu « était la véritable lumière, qui, en venant dans le monde, éclaire tout homme. » Cette insistance sur « tout homme » signifie que Dieu agit à travers la conscience de chacun et se fraye des chemins même chez ceux qui sont le plus éloignés de lui.
Paul va exprimer cela en Romains 2,14-15 en disant que « Quand des païens, qui n’ont pas la loi, font naturellement ce que prescrit la loi, eux, qui n’ont pas la loi, se tiennent lieu de loi à eux-mêmes ; ils montrent que l’œuvre de la loi est écrite dans leurs cœurs, leur conscience en rendant témoignage, et leurs pensées s’accusant ou se défendant tour à tour. »
Il y a donc bien une forme de révélation de Dieu pour toute créature humaine. Quelques versets avant, l’apôtre Paul avait déjà affirmé en Romains 1,19 que « les perfections invisibles de Dieu, sa puissance éternelle et sa divinité, se voient comme à l’œil, depuis la création du monde, quand on les considère dans ses ouvrages. »

Abraham a donc été au bénéfice d’une révélation qu’il a surtout acceptée, et à laquelle il s’est soumis, bien que déjà très âgé et installé dans des processus de compréhension du monde très établis dans son cerveau et dans son cœur. Une bonne nouvelle pour tous !

Dois-je obligatoirement avouer mon infidélité- sachant que mon mari est dépressif ? [Ouriah]

Chère Ouriah, aucun des répondants sur 1001questions.fr ne revendique d’autre qualification que pastorale. Nous ne sommes pas des psychologues, pour décider si parler de votre infidélité à votre mari l’aiderait à sortir de son état dépressif ou l’y enfoncerait davantage. D’autant plus qu’un psychologue chercherait d’abord à comprendre les causes de cette dépression en en parlant avec l’intéressé…

Il vous demanderait aussi si cette « infidélité » appartient au passé, ou s’il s’agit d’une liaison dans laquelle vous êtes toujours engagée. Si la réponse est « oui », vous êtes-vous posée l’autre question ? A savoir, que pense le Seigneur de ma relation avec un autre homme ? Est-ce que je peux rester dans cette situation, et simplement me préoccuper qu’elle ne fasse pas souffrir celui à qui j’ai donné ma parole ?

 

La différence entre un chantre et un artiste chrétien ? [Emmanuel]

Les deux notions se recoupent sans se confondre.

Un chantre, dans l’Ancien Testament, était responsable de la conduite du chant et de la musique lors du culte rendu au Seigneur. Le plus célèbre est Asaph, cité en 1 Chroniques 15,17, car son nom est associé à plusieurs psaumes. Le chant et la musique, comme expression de louange et d’adoration, tiennent également une grande place dans le culte chrétien ! Beaucoup d’assemblées délèguent la conduite de la louange et des cantiques à des personnes sachant bien chanter, diriger un choeur, ou jouer d’un instrument de musique.

Un artiste chrétien est tout simplement un chrétien qui exerce le métier ou l’activité d’artiste ! Mais pas nécessairement lors du culte. Si c’est un musicien ou un chanteur, il peut témoigner de sa foi par son talent. En concert bien sûr, ou par ses compositions (Jean-Sébastien Bach est un bel exemple).  Le risque qu’il court toujours est le vedettariat, qui risque d’attirer plus l’attention sur lui-même que sur le Seigneur. C’est pourquoi J.S. Bach, toujours lui, terminait toutes ses partitions en écrivait SDG, les initiales d’ « A Dieu Seul la Gloire » en latin.