Que veut dire 666 ? [René]

Le nombre 666 a fait couler beaucoup d’encre ! On le trouve en Apocalypse 13, 18 où il est présenté comme le “ chiffre “ et le “ nom” de l’une des deux bêtes sorties l’une de la mer, l’autre de la terre pour asseoir leur domination sur les hommes. Voici ce verset : 

“ C’est ici qu’intervient la sagesse. Que celui qui a de l’intelligence calcule le chiffre de la bête. Car c’est un chiffre humain. Son chiffre est : 666.” 

Cette bête de l’Apocalypse est l’une des figures bibliques du mal. Elle est combattue, et vaincue par les forces de l’Agneau (le Christ). De fait, 666 est aujourd’hui compris comme le chiffre du diable.  

Qu’est-ce qui permet de le penser, au-delà du fait que cette bête s’oppose au Christ ? Le chiffre est interprété de plusieurs manières. Les deux principales sont le symbolisme et la gématrie. 

Symboliquement, le 6 est dans la tradition biblique le chiffre de l’imperfection et du mal. C’est 7, le chiffre de la perfection, moins 1. Noé avait par exemple 600 ans quand le déluge tomba sur terre. Le triple 6 représenterait ainsi le comble du mal. Le livre de l’Apocalypse a souvent recours aux symboles pour exprimer les réalités divines. 

Selon la gématrie, qui associe dans la tradition juive une valeur chiffrée à chaque lettre, 666 donne à connaître un nom : celui de César Néron, qui fut empereur romain de 54 à 68, et responsable de grandes persécutions contre les chrétiens. D’où la mention d’un chiffre “humain” dans le verset. Sous une forme codée, le chiffre ferait alors référence à un contexte historique précis que pouvaient connaître les premiers lecteurs de l’Apocalypse. 

Le défi de notre discernement de foi restant ici comme ailleurs de savoir lire les signes donnés sans verser dans le culte du mystère, sans tomber dans la superstition, et encore moins dans la fascination pour le mal qui en viendrait à cacher la victoire du Seigneur de la vie ! 

Pourquoi certaines personnes prient au nom de Marie ? [Estelle]

À ma connaissance, personne ne prie au nom de Marie.
En revanche, on trouve des traces de prières adressées à Marie dès les premiers siècles du christianisme. Cette dévotion s’est particulièrement développée depuis le Moyen-âge dans le catholicisme, alors que les protestants l’ont fortement rejetée en la considérant comme incompatible avec leur interprétation des Écritures. Jésus n’a jamais demandé qu’on adresse des prières ou des demandes particulières à sa mère, ni les apôtres non plus. Si l’on s’en tient aux Écritures, lorsqu’un chrétien prie, il s’adresse à « Dieu le Père, au nom de Jésus, et par la puissance du Saint Esprit ». Marie peut donc être pour les chrétiens une figure de foi inspirante, mais elle ne peut en aucun cas prendre la place du Christ, intermédiaire direct entre Dieu et les hommes (« Tout ce que vous demanderez en mon nom, je le ferai » Jean 14,13).
Pourtant, quand les catholiques adressent des prières « à Marie », ils demandent son intercession, ce qui signifie qu’ils lui demandent de prier pour eux et avec eux auprès de Dieu. Invoquée ainsi comme une figure de compassion et d’intercession, Marie occupe une place d’intermédiaire « malgré elle » (n’oublions pas que la seule fois où elle a essayé d’intercéder, durant les noces de Cana, Jésus l’a fermement remise à sa place !).
Cette dévotion n’est pas sans poser quelques questions : Dieu est-il si lointain et si effrayant qu’il faille passer par une figure jugée plus douce et compassionnelle ? Jésus n’est-il pas le premier-né d’entre les morts, et donc le seul capable de porter nos prières vers le Père ?
Laissons donc les morts reposer en paix en attendant la résurrection et Dieu s’occuper de nous aujourd’hui grâce à l’esprit vivifiant de Christ !

Puis je perdre mon salut si je vis hors mariage ? Je suis née de nouveau et mon compagnon refuse le mariage. [Déborah]

D’abord, traitons la question de la perte du salut.
Comment votre salut s’est-il mis en place ? Vous dites que vous êtes née de nouveau. Quelqu’un maîtrise-t-il sa naissance ? Personne.

Pour la nouvelle naissance, c’est juste la réception du message de la grâce de Dieu en Jésus-Christ qui nous ouvre la possibilité de dire : « Oui Père céleste, j’accepte d’être ton enfant, d’être sauvé.e et de naître de nouveau ».
Votre salut a été proposé et, une fois accepté, garanti et scellé par le sang de Christ.
Qui peut détruire quelque chose que Christ a construit ?
Le salut n’est pas quelque chose que l’on peu perdre à cause du péché, car Christ sait bien que nous demeurons des créatures marquées par le péché. La différence avec notre vie d’avant, c’est que, par l’accès au Père que nous garantit Jésus, à cause justement du salut qu’il nous a donné, nous pouvons demander pardon pour notre péché et en être lavés.

On ne peut donc « perdre son salut », en aucun cas.
On peut le refuser, mais ce serait un acte de rébellion consciente et frontale qui ressemblera de près à ce que Jésus appelle « blasphème contre le Saint-Esprit », quand on maudit Dieu en face droit dans les yeux, si j’ose dire.

Donc, vous ne pouvez pas perdre votre salut pour une question de statut conjugal.

1 Corinthiens 7:12-14 nous dit : « Si un frère a une femme non croyante, et qu’elle consente à habiter avec lui, qu’il ne la répudie point ; et si une femme a un mari non croyant, et qu’il consente à habiter avec elle, qu’elle ne répudie point son mari. Car le mari non croyant est sanctifié par la femme, et la femme non croyante est sanctifiée par le frère. »

Il faut donc plutôt intercéder pour votre conjoint. Il a peut-être dans sa tête l’idée qu’il y a de « bonnes raisons » de ne pas se marier :
– peut-être est-il insécurisé et inapte à prendre des engagements durables ; un accompagnement spirituel lui serait d’un plus grand bien,
– peut-être a-t-il eu de mauvaises images de la conjugalité, des expériences fâcheuses, à commencer par le couple de ses parents ou dans la famille ; il doit vivre une guérison intérieure.
– peut-être trouve-t-il que la pression que met l’Eglise, la famille, la société, et sa fiancée, est très étrange ; vous avez besoin de parler plus de l’intérêt d’être mariés.
– ou bien d’autres possibles encore…

Quoi qu’il en soit, dialoguez, et ne le « coincez » pas dans vos raisonnements, vos craintes, et vos discussions. Priez et Dieu fera le reste.

Pourquoi fallait-il que Jésus soit sacrifié pour nous sauver ? Dieu est bon- pourquoi a-t-il mis en place cette « règle du jeu » barbare ? [Alexis]

C’est vrai, Alexis, que la théologie chrétienne est allée jusqu’à présenter la mort du Christ un peu comme une “ règle du jeu “ destinée à satisfaire mécaniquement, ou mathématiquement la soif de colère du Père envers l’humanité. Et dans certaines Eglises, ou certains milieux, on se plaît à souligner toute la barbarie de la crucifixion, que la Bible, elle, se garde d’étaler. La logique est alors : plus le sang coule, plus le prix payé par le Christ pour notre salut est important ! 

Les Ecritures lient évidemment la mort du Christ, et donc, d’une certaine manière sa souffrance, au salut des croyants. Pourtant, il est juste de voir en elle plus le signe d’un amour que d’une cruauté. Je propose trois réflexions pour l’étayer. 

Le Christ ne vit sa mort comme un abandon que dans les derniers instants. Abandon à la volonté du Père (Matthieu 26, 42). Le reste de sa vie laisse voir le Messie qui se donne pour les autres. Une vie où le don est plus fort que l’abandon, et c’est aussi cette force du don qui conduit à la mort. 

Sa mort n’est pas la fin de l’histoire, mais sa résurrection, qui est vécue par les croyants, et présentée par les textes comme une victoire. La souffrance du Fils n’est donc pas le dernier mot, mais son élévation et son règne avec le Père, dans la réconciliation. La communion du Père et du Fils n’est pas rompue. 

Le pourquoi de la souffrance du Christ reste malgré tout un mystère que devant lequel nous plions le genou, parce que ses dimensions ultimes nous échappent (Philippiens 2, 6-11). En étant près du Christ, on comprend cependant que ce n’est pas souffrance qui est recherchée, mais le salut et la vie. 

Peut-on se dire chrétien alors qu’on réfute la résurrection physique de Jésus ? Doit-on prendre au mot près la Bible ou l’interpréter ? [Patrick]

Dès le moment où nous ouvrons la Bible, nous allons l’interpréter. Dire le contraire serait mentir. Les lecteurs les plus littéralistes l’interprèteront aussi, en choisissant un verset plutôt qu’un autre pour répondre la question qui les taraudent. Choisir, c’est déjà interpréter. La lecture des Ecritures, geste vital pour les chrétiens, consiste à s’approprier une parole qui nous a précédée, et qui nous succèdera. Nous la lisons avec ce que nous sommes. Nous l’interprétons, ce qui ne veut pas dire que nous ne la prenons pas au sérieux, et que nous ne considérons pas attentivement ses détails.

En l’occurrence, la résurrection n’est pas un détail ! Tant les évangiles que les lettres de Paul insistent sur la dimension corporelle de la résurrection. Thomas est invité à mettre ses doigts dans les stigmates du Ressuscité. Paul combat dans les Eglises les spiritualistes gnostiques qui pensaient que les corps ne prennent pas part au salut, et il livre aux Corinthiens une profonde méditation sur le sujet (1 Corinthiens 15). Il est bien sûr possible de vouloir déconstruire ces textes pour en faire de simples symboles du don que Dieu nous fait de la vie, des théologiens renommés l’ont fait en intellectualisant ou en spiritualisant la résurrection.

Pour autant, l’interprétation qui a prévalu au cours des siècles et que les Eglises n’ont cessé de confesser à travers le symbole de apôtres reste bien « la résurrection de la chair ». Cette promesse dépasse notre entendement et résiste à notre intelligence, c’est certain, mais y renoncer signifie bien tourner le dos à un point essentiel de la foi chrétienne et à la rendre vaine, selon les mots de l’apôtre Paul.

Jésus dit que nous devons être parfaits comme le Père céleste est parfait. Comment faire ? [Maurice]

En laissant tomber, parce que c’est trop dur ! Plus gentiment, relisons le passage d’où cette affirmation est tirée. Il s’agit du verset 48 du chapitre 5 de l’évangile de Matthieu. Beaucoup de traductions proposent : « Soyez donc parfaits comme votre Père céleste est parfait. » (Ici, c’est la traduction « Segond 21 »).  Or le texte original, en grec, dit : « Vous serez donc parfaits… » Ce n’est pas exactement la même chose. « Vous serez parfaits » peut s’entendre comme une promesse, qui se réalisera justement si nous ne prenons pas cette parole comme un impératif. Car ce n’est pas par nos propres forces, nos bonnes actions, notre attitude religieuse, notre intelligence…, mais seulement par la grâce de Dieu que nous serons parfaits. Rendus parfaits par Lui. C’est pour cela que pendant toute la deuxième partie de ce chapitre 5, Jésus nous demande des choses franchement très difficiles : Ne pas dire la moindre insulte à quelqu’un, ne pas regarder une personne autre que notre conjoint avec le moindre désir sexuel, tendre la joue droite, etc. Impossible ? Certainement ! Mais rien n’est impossible à Dieu. L’enjeu et de renoncer à soi-même comme source de notre salut, pour, dans la prière, la lecture de la Bible et la fréquentation de l’Eglise, laisser Dieu nous travailler de l’intérieur, pour que notre impossible devienne son possible.

Pourquoi Dieu le Père et Jésus n’ont pas la même position sur la vengeance ? Pourquoi « Œil pour œil- dent pour dent » a existé ? [Bianca]

Chère Bianca, c’est vrai, dans la langue courante, « œil pour œil, dent pour dent » sonne comme une incitation à la vengeance. On a envie de la prononcer en serrant les mâchoires et en pensant à son ennemi du moment.

L’expression est l’une des déclinaisons pratiques données aux Dix commandements confiés à Moïse pour le peuple d’Israël (Exode 21, 24). Elle se rattache donc à la Loi de Dieu, et, dans ce sens, comme toute loi, elle vise à limiter et à encadrer l’usage de la violence. Ce qu’elle propose, c’est une équivalence des blessures infligées et de la peine encourue, d’où son nom de « loi du Talion », du latin talis qui veut dire tel : telle est la blessure, telle sera la peine.

Cette loi se montre donc plutôt raisonnable, équilibrée. La peine est proportionnée à la faute, ce qui est le principe de la justice. Elle représente en tout cas un progrès par rapport à ce que Dieu préconise par exemple pour les éventuels meurtriers de Caïn, car son meurtre sera vengé 7 fois (Genèse 4, 15).

Jésus ne remet pas en cause la loi du Talion, mais il demande à ses disciples d’aller beaucoup plus loin que cela en tendant « l’autre joue » si quelqu’un s’en prend à eux (Matthieu 5, 39). Je ne parlerais pas de contradiction entre dans la position de Dieu et celle de Jésus, mais plutôt d’une progression dans la révélation de son amour. C’est d’ailleurs comme ça que nous lisons la Bible, qui est une révélation progressive dont le point final et central est le Christ.

Il est bon qu’une justice existe dans ce monde, mais il est meilleur encore que des disciples montrent la voie de l’amour qui libère de tout mal, y compris de celui d’une punition légitime.

Est-ce que si on croit en Jésus mais qu’on n’est pas (encore) baptisé- on est sauvé ? [Judith]

A quelle condition est-on sauvé, c’est à dire, délivré du péché et de ses conséquences, à savoir la séparation d’avec le Dieu vivant, notre Père et notre Créateur ? Pendant des siècles, l’Eglise s’est arrogée le pouvoir d’ouvrir ou de barrer le chemin vers le ciel et l’éternité en faisant de l’administration des sacrements leur sésame indispensable. Et en forgeant des doctrines pour répondre aux cas particuliers, même s’il n’était guère possible de les fonder sur des textes bibliques.

Par exemple, au sujet des enfants morts à la naissance sans avoir été baptisés. Ils ne pouvaient « mériter » d’aller en enfer ! Mais toutefois, marqués par le péché originel, ils étaient censés rejoindre un lieu appelé « les limbes », sorte d’antichambre du Paradis (l’Eglise catholique a officiellement remis en cause cette doctrine en 2007, sans la condamner totalement). C’est pourquoi il était permis, en l’absence de prêtre, d’asperger un nourrisson à l’agonie au Nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, pratique appelée « ondoiement ».

Qu’en penser ? Ce n’est pas le baptême en lui-même, quelle que soit sa forme, mais Jésus-Christ qui nous sauve ! Le baptême ne nous confère pas  le statut d’enfant de Dieu, aimé de Lui, uni à lui par le don de Jésus-Christ. Il nous l’atteste. De même qu’une signature au bas d’un contrat marque l’engagement du contractant, le Seigneur s’engage envers nous par ce signe visible de sa grâce invisible. Comme un Père atteste son amour à son enfant par un geste de tendresse. Le baptême est un sacrement, mot qui vient du latin sacramentum, terme du droit désignant un dépôt de garantie, puis le serment de fidélité à la Patrie que prononçaient les militaires.

Comme votre question le souligne elle-même, Judith, le lieu où Dieu choisit de nous rencontrer, de nous retrouver, et de nous réconcilier avec lui, c’est la foi en son Fils Jésus-Christ. Jean ch.3, v.16, le verset qui résume l’Evangile, nous le rappelle utilement.

Quand est-ce qu’on devient vraiment chrétien ? éducation ? conversion ? baptême ? [Hanta]

Votre question, Hanta, contient déjà une grande partie de la réponse que l’on peut y apporter. Les trois éléments que vous mentionnez ont effectivement leur place dans la vie chrétienne.

L’éducation comme préparation à une vie de disciple, comme transmission des éléments fondamentaux de la foi.

La conversion comme accueil de la grâce de Dieu qui change la disposition du cœur en l’ouvrant pleinement à Christ.

Le baptême comme manifestation visible de cette foi et entrée dans l’Eglise, famille des enfants de Dieu.

Tout cela construit bien un « devenir » chrétien.

Les chrétiens portent le nom du Christ. Un nom qu’ils confessent du cœur et des lèvres (Romains 10, 10). C’est cette confession de foi en Jésus ressuscité, Seigneur et Sauveur, qui pose le véritable fondement d’une vie chrétienne (1 Corinthiens 3, 11). Elle est cette adhésion qui nous lie à Dieu sur la terre et au ciel. L’éducation peut la préparer, la conversion du cœur lui est nécessaire pour lui donner une assise sérieuse, le baptême la rend publique et lui donne ses témoins. Ces trois choses lui sont donc indispensables, mais ne la contiennent pas tout entière.

On devient chrétien en mettant aussi en pratique les enseignements du Christ et des apôtres. Mais même si nos actes font défaut. Et ils font toujours partiellement défaut, nous sommes donc toujours en devenir. La foi confessée continue à nous lier au Christ, et à nous faire avancer dans la bonne direction, vers une vie sanctifiée.

Jésus n’a rien révélé avant l’âge de 30 ans ? Pourquoi ce revirement ? [Ivan]

Il est exact que le ministère itinérant de Jésus n’a pas commencé avant qu’il ait atteint environ 30 ans, selon l’évangéliste Luc (ch.3,v.23). Certains penchent même pour un âge plus avancé encore, d’après l’interpellation qu’il reçoit dans l’évangile de Jean (ch.8 v.57) mais celui donné par Luc est le plus plausible.

Toutefois, Jésus a révélé durant son adolescence qu’il avait une mission et une identité particulière. A ses parents inquiets de l’avoir perdu lors d’un pélerinage à Jérusalem et qui le retrouvent discutant avec des théologiens dans le temple, il leur dit qu’il devait s’occuper des affaires de son Père (Luc 2,49). Il est ajouté qu’il grandissait en sagesse, en stature, en grâce devant Dieu et les hommes.

Autrement dit, ce début tardif n’est pas un « revirement », un changement de cap inattendu, mais le fruit, l’aboutissement d’une longue maturation. En Jésus, Dieu a adopté le tempo lent d’une existence humaine. 30 ans pour se préparer dans la prière et la méditation des Ecritures, 3 ans pour enseigner et prêcher le Royaume, avec des signes et des miracles, 3 jours pour accomplir notre Salut par sa mort et sa résurrection…

A titre de comparaison : pour gagner une course aux jeux olympiques qui se jouera en quelques minutes, voire quelques secondes, les athlètes se préparent pendant des années !