Actes 5: 15-16 (la silhouette de Pierre guérissant les gens) confère-t-il une validité à l’idée catholique que les reliques de saints peuvent guérir ? Que faisons-nous de cette histoire biblique ? [Pierre]

Si vous lisez de près ce récit du livre des Actes, notez que l’on plaçait les malades sur le passage de l’apôtre Pierre dans l’espoir que son ombre seule suffirait à les guérir (l’ombre représentait dans l’antiquité l’énergie vitale de la personne). Un peu comme cette femme qui voulait guérir en touchant simplement le vêtement de Jésus (év. de Luc 8,43-48). Ce qui est étonnant… c’est qu’elle a été vraiment guérie ! Mais pas par magie. Parce que Dieu a répondu à sa confiance, sa foi (même naïve et superstitieuse) en Jésus. Le Seigneur n’attend pas pour agir et répondre que notre foi soit parfaitement informée ou mâture. Un manuscrit ancien du Nouveau Testament, le codex de Bèze, ajoute même dans le texte des Actes que tous ceux que l’ombre de Pierre couvraient étaient guéris de toute maladie. Il se peut que ce soit la version du texte original des Actes. On peut faire à ce sujet la même remarque que pour le récit de l’Evangile. Ce n’est pas l’ombre de Pierre qui était porteuse en soi de puissance, pas plus que le manteau de Jésus. Tout comme son Maître qui l’a envoyé, Pierre est témoin de l’amour de Dieu qui seul relève et guérit. Les miracles des apôtres accompagnent le message qu’ils proclament.

De là à penser qu’une Eglise, en conservant des reliques (supposées authentiques) de saints ou d’apôtres, pourrait contrôler et dispenser à ses fidèles la guérison que Dieu accorde librement, par sa Grâce, il y a un grand pas… pour ne pas dire un fossé.

La mise en garde des conséquences de prendre la cène (1 Cor 11) s’adresse à des chrétiens. Pourquoi un non chrétien serait-il privé de prendre la cène si déjà il est au culte ? [Pascal]

La cène n’est pas seulement un repas partagé en mémoire de Jésus, ou parce qu’il nous a dit de le faire. Par ce repas, que l’on appelle aussi communion, Jésus-Christ manifeste mystérieusement sa présence à tous ceux qui croient en lui et reconnaissent qu’il est là, dans le pain et le vin partagé. Je ne me sens pas de demander à un non chrétien qui vient au culte de participer à un repas dont il ne partagerait pas le sens. Cela me semblerait être une contrainte de sa conscience plutôt qu’autre chose.

Le mariage entre évangélique et catholique est il possible ? [Hadassa]

La bible n’évoque ni les catholiques ni les évangéliques… Paul n’aimait pas beaucoup les partis et parle des chrétiens en évoquant « les croyants », ses « frères », les « saints » ou « les élus de Dieu »… Dans son épître aux corinthiens, il mentionne le mariage « dans le Seigneur » (1 Co 7, 39). La bible évoque donc clairement ici et ailleurs la priorité de se marier avec quelqu’un qui partage la foi au Dieu vivant !

Qu’en est-il du mariage d’un évangélique avec un catholique ? La question révèle notre orgueil spirituel vis-à-vis des catholiques. Mais pensons-nous sérieusement que tous les évangéliques sont chrétiens ? Il ne faut pas se méprendre sur la qualification « évangélique »… Qualifie-t-on des dénominations religieuses ou la relation d’une personne à Jésus-Christ ? Il y a dans le catholicisme des éléments qui sont étrangers à l’Évangile révélé dans la Bible. Il y a des sujets qui peuvent être graves, a fortiori au milieu d’un couple. Mais l’orgueil spirituel est aussi un sujet d’achoppement grave ! Par ailleurs, il y a clairement beaucoup de chrétiens catholiques qui ont une relation avec Jésus profondément enracinée dans l’Évangile !

Le plus important est de mettre toutes les questions spirituelles sur la table. Priez et lisez la bible ensemble. Si les idoles sont plus importantes que Jésus-Christ, vous le verrez bien vite et alors, ne vous mettez pas sous un joug disparate. 

Est-ce correct de prier Dieu en l’appelant « Papa » ? [Simone]

Jésus est très innovant et révolutionnaire en appelant Dieu « Père ».
C’est nouveau de faire cela, pour deux raisons :
– dire que Dieu est son père était vu comme une preuve d’arrogance dans le peuple Juif et quasiment aucune mention n’est faite du mot Père pour parler de Dieu dans le Premier Testament, sinon dans des expressions évoquant la paternité de Dieu (Exode 4,22-23 – 1Chroniques 17,13 – Proverbes 3,12) ou parlant de Dieu étant “comme un père » ; voyez Esaïe 63,16 : « C’est toi, Éternel, qui es notre père ».
Mais on n’appelle jamais Dieu “Père » directement.
– la deuxième raison c’est que Dieu ne devient père que quand… il a un Fils. Et même si Israël a été son fils premier-né, en tant que peuple (voir la citation d’Exode plus haut), il n’a un vrai Premier-né que quand advient le Fils unique venu du Père, à savoir au moment du baptême de Jésus : “Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j’ai mis toute mon affection » (Matthieu 3,17).

Le terme Abba n’est employé que trois fois dans le Nouveau Testament, bien que Jésus nous apprenne à prier Dieu en tant que Notre Père (Matthieu 6,9). Ce terme se trouve en Marc 14,36 – Romains 8,15 – Galates 4,6. Abba est un mot araméen, qui veut dire “Père“ mais avec une forme renforcée. Il est un peu à mi-chemin entre “Papa » et “Père », simplement parce qu’il est accessible dans le babillage de l’enfant. Pour autant, le choix de Marc et de Paul est bien particulier. A chaque fois, il est fait mention de “Abba, Père”. Abba n’est jamais employé seul. Le mot “Abba” est araméen, laissé tel quel, et le deuxième est en grec, la langue du Nouveau Testament. Comme il n’y a pas de ponctuation dans le grec de l’époque (koinè) on pense que l’interprétation la plus juste serait : “Abba [c’est-à-dire] Père ». Or, le mot grec qui est utilisé pour “Père » en grec n’est justement pas le mot “Papa” (mpampas) mais bien “Père” (pater). Matthieu et Paul expliquent comment on dit “Père » en araméen, et le traduisent pour leurs lecteurs grecs.

Certains voudraient y voir un langage affectueux ou de proximité. Je ne crois pas que cela soit le cas. C’est un langage intense d’implication, certes. Mais je pense que ces trois textes ne nous incitent pas à jouer aux enfants de cette façon qui nous ferait utiliser le mot “Papa”. En effet, le fait de devenir enfants de Dieu (Jean 1,12) n’est pas une infantilisation, une forme de régression en arrière vers l’enfance, mais une adoption d’adultes consentants. Quand Jésus nous fait prier “Notre Père”, il ne choisit pas le terme “Papa” et il insiste sur le collectif, bref : sur la révérence et l’aspect communautaire de la paternité de Dieu qui nous crée comme famille.

C’est pour cela que je prie Dieu en lui disant : “Père” ou “Notre Père” ou “Père Éternel”.

 

Croyez-vous en la « révélation progressive » ? Par exemple- une progression de la violence de l’Ancien Testament en 1 Chron 22-9 jusqu’à la déclaration de Jésus dans Matt 5-9 [Luc]

Parler de révélation progressive de Dieu, notamment à travers l’histoire du peuple d’Israël, semble juste, si on considère le simple fait que la rédaction des écrits bibliques s’étale sur plus d’un millénaire !

Vous évoquez à ce sujet la question délicate de la violence dans le Premier Testament. En effet, on peut s’étonner, voire être choqué, entre autres, par certains ordres donnés par Dieu ou en son nom : dans les récits de la conquête de la terre Promise (voir le ch. 6 de Josué par exemple, et l’anéantissement des populations de Canaan) ou encore de l’idolâtrie d’Israël au désert (Exode 35,25-29). Il s’agit pour les auteurs d’insister sur le rejet absolu du mal, que Dieu a en horreur. Israël, peuple mis à part pour manifester la sainteté de Dieu, ne doit rien laisser subsister en son sein, et autour de lui, qui pourrait y porter atteinte. On peut évoquer aussi certaines imprécations dans les psaumes, mais là, elles expriment souvent la souffrance et la colère du croyant opprimé, persécuté, qui appelle au secours, demande justice et délivrance (voir par exemple le dernier verset du Psaume 137).

Il faut y insister cependant : dès les origines, Dieu se manifeste comme celui qui ultimement fait grâce. Comme le dit un autre  Psaume (117), la bonté du Seigneur pour nous est la plus forte (et sa « colère », ajouterais-je, n’est que l’expression de son amour blessé). Moïse, en intercédant pour Israël, a pu « fléchir » le Seigneur et l’amener à renoncer à anéantir le peuple rebelle. La violence n’est pas le dernier mot de Dieu. A la croix de Jésus-Christ, Dieu prend sur lui la conséquence de notre péché et de notre idolâtrie. Désormais, ce n’est plus contre des hommes que nous avons à lutter. Le combat est à l’intérieur de nous-mêmes, de nature spirituelle. Nos armes : l’amour, le pardon. Notre victoire : la paix et la réconciliation.

Un gnostique est-il un chrétien ? [NewDeli]

Un gnostique est une personne qui pense qu’elle peut avoir accès à Dieu par sa connaissance, sa propre initiation.
Mais la révélation chrétienne n’est pas due à une quelconque connaissance, si ce n’est celle de Jésus. Et le Christ ne se donne pas d’abord à connaître mais à recevoir, à croire comme le dit par exemple l’évangile selon Jean (3,16 ou 11,25).
La question pour un chrétien est d’avoir une relation de foi avec le Christ. Cette relation mène à Dieu. Dans ce même évangile Jésus dit : « Je suis le chemin, la vérité, et la vie. Nul ne vient au Père que par moi. » (14,6).
En ce sens un gnostique n’est pas chrétien.

Jésus exhortait ses disciples à guérir et chasser les démons comme lui-même le faisait, pourquoi ne nous a-t-il pas appelé aussi à changer l’eau en vin et à marcher sur l’eau ? [Jean-Luc]

Pour Jésus il y a des impératifs de plus ou moins grande importance.

Celui qui revient le plus souvent (plus souvent même que le commandement d’amour), c’est d’annoncer que « le Royaume de Dieu s’est approché (de nous/vous) ».

Et cette annonce majoritaire est adjointe régulièrement, dans l’ordre d’occurence des plus importantes, de ces mentions :
1. Guérissez les malades
2. Chassez les démons
3. Purifiez les lépreux et ressuscitez les morts.

Viennent ensuite toutes les autres, comme :
– laver les pieds des autres croyants,
– prendre un repas en mémoire de lui,
– baptiser les personnes, même issues des nations non juives,
– aimer les ennemis,
– etc.

Jamais il ne demande de changer l’eau en vin ni de marcher sur l’eau.
Peut-être parce qu’il a concédé à le faire juste pour signifier sa puissance. Mais que ce qu’il nous demande, c’est de faire des choses significatives pour les autres, qui portent un fruit immédiat dans leur vie.

C’est certainement pour cela qu’il insiste sur l’évangélisation, la guérison, la libération.

Pourquoi les chrétiens négligent le jour du sabbat ? Un jour béni par Dieu qui est le 7ème jour dans la Bible ? [Irénée]

La spiritualité du sabbat était centrale au temps de Jésus. L’ordre de se reposer est toujours le quatrième commandement, légitime pour les chrétiens. Mais comme Jésus s’est dit « maître du sabbat », une partie des chrétiens ont considéré que leur jour de repos devait être le jour symbolique de la résurrection, un dimanche. C’est pour cela que durant le dimanche (dominicus dies, jour du Seigneur), beaucoup de chrétiens se reposent dans une sorte de sabbat centré sur Jésus.
Mais les pratiques sont très diverses à l’intérieur du christianisme.
Ce qui semble essentiel c’est de bien respecter un jour de repos :
– d’après Exode 20 parce que Dieu s’est reposé le 7ème jour,
– d’après Deutéronome 5 parce que si on ne se repose pas, c’est comme si on méprisait notre libération d’Egypte.

Les chrétiens devraient-ils être écologistes ? L’environnementalisme est-il idolâtre ou païen? [Frédéric]

Si la « nature » est considérée comme « Création » et donc l’œuvre du Créateur, la créature humaine doit exercer une sainte domination sur le monde créé, pour y figurer son statut d’image de Dieu. Le projet était quand même que l’humain s’occupe correctement du jardin.
Mais l’échec de ce projet ne date pas d’hier, et les pépins sont vite arrivés.

Le Nouveau Testament nous présente une création qui a besoin d’être sauvée. Et c’est la raison pour laquelle Jésus est envoyé. L’Apocalypse, le dernier livre de la Bible, nous dit aussi que ce qui adviendra, c’est une « Jérusalem céleste », qui descendra. Donc désormais le projet de l’humain, tout en respectant la création, ne doit pas devenir idolâtre effectivement, et vénérer la création plus que le créateur comme le dit Paul en Romains 1. Il ne s’agit pas de rebâtir et restaurer la Jérusalem terrestre. D’ailleurs ce n’est plus un jardin, c’est bien une ville. La Jérusalem ancienne sera détruite.

Donc, pour simplement ne pas s’empoisonner, il faut être écologistes.
Et pour laisser Dieu sauver le monde, il faut arrêter de vouloir le sauver nous-mêmes.

En Hébreu, le nom de Jésus est Yeshua , il a été traduit en Grec par yesous puis est devenu Jésus . Comment les apôtres appelaient-ils Jésus ? Pourquoi avoir traduit son prénom d’origine ? [Isabelle]

C’est le même nom que notre Josué du premier testament.
La mutation de Yeshouah à Jésus s’est simplement opérée par glissement successifs au fil des époques.

Hébreu : Yeshouah, puis…
Grec : Yesous, puis…
Latin : Iesus, puis…
Français moderne : Jésus.

Ce n’est pas à proprement parler une traduction, mais juste une évolution dans la prononciation, tout comme Charlemagne ne s’appelait pas « Charlemagne » avec notre prononciation dans la langue franque de l’époque devenue vieux françois et français…
Dans le même sens, en restant sur une même époque, si vous avez une amie malgache qui s’appelle Hanitra, les français vont prononcer son nom « Anitra » alors qu’elle le prononcera en malgache « An’tch ».

Il n’y a donc pas de problème d’utiliser Jésus, Yesous, ou Yeshouah (d’autant plus que le « ah » final est quasiment imprononçable pour un français, et que donc, il sera presque impossible d’être fidèle à sa prononciation authentique).