« Je ne permets pas à la femme d’enseigner- ni de dominer l’homme ; qu’elle demeure dans le silence. Elle sera néanmoins sauvée en devenant mère (…). » 1Tim 2-12 et 15. Vraiment ? [RK]

Comme dans l’ensemble de ses épîtres, et notamment comme dans la 1ère lettre aux Corinthiens dans laquelle nous trouvons une exhortation du même type (1Corinthiens 14,34), Paul a pour souci principal d’amener d’anciens polythéistes à renoncer à l’idolâtrie (1Thessaloniciens 1,9) et ses conséquences éthiques (quand bien même elles se revendiqueraient de la Loi de Dieu, voir 1Timothée 1,7-8). Il ne faut pas perdre de vue que ces lettres sont envoyées dans des situations de relative urgence, pour traiter de problématiques spécifiques et localisées.

Nous ne savons pas clairement quels sont les enjeux derrière ce passage : Influence des cultes à mystère et des pratiques divinatoires dans lesquelles les femmes ont traditionnellement une grande place ? Influence d’une tendance culturelle qui tendrait à « émanciper » les femmes de leur mari ? Tendance, sous l’influence d’une manière plus grecque que juive de voir l’Homme, au mépris du corps et de ses réalités ?

Il y a peut-être un peu de tout ça à la fois. Paul s’appuie sur l’enseignement de la Loi juive (1Timothée 2,13-14) comme en 1Corinthiens 14,34 (voir aussi 1Corinthiens 11, 7-11). Bien que par ailleurs Paul ne conteste pas la légitimité pour les femmes de parler et prophétiser publiquement (1Corinthiens 11,5), il refuse l’idée selon laquelle la femme pourrait dominer l’homme, et renvoie à l’ordre social du père comme chef de famille, qu’il ne remet pas en question. Paul invite finalement les femmes à faire le choix de la maternité, s’attaquant peut-être ainsi à un certain mépris du corps et de la sexualité.

Il me semble difficile d’absolutiser un passage qui parait si contextuel. Toutefois, il me semble évident qu’il peut interpeller aujourd’hui un certain féminisme méprisant la masculinité et assumant un certain (et très gnostique) mépris du corps et de l’appartenance sexuelle.

Paul en 1 Corinthiens 10-11 demande aux femmes de se voiler dans l’église. Un verset à prendre au sens littéral ou à considérer dans son contexte culturel ? [Emma]

Avec beaucoup de textes il faut choisir où nous allons mettre le curseur :

  • normativité haute : le texte est reçu comme une parole de Dieu et donc ces consignes s’imposent à tout un chacun au-delà des siècles,
  • normativité basse : le texte a été dit par un humain (il ne dit pas nécessairement que Dieu ordonne ceci ou cela, il exprime un point de vue), et surtout comme dans ce cas d’une lettre, il a écrit à des personnes dans un contexte particulier.

C’est ce qui est intéressant avec les épîtres de Paul, c’est qu’il a une approche pragmatique et sur mesure. Il écrit d’abord pour régler des problèmes spécifiques.

Et à Corinthe, le problème ce sont les religions pré-chrétiennes qui donnent notamment à la femme « en cheveux » comme on a dit à certaines époques (par opposition à voilée) le statut de prostituée, ou, là-bas et en ce temps-là, le rôle de prostituée sacrée, ou de voyante pratiquant la divination, ou de prophétesse d’un autre esprit que l’Esprit de Dieu. D’où son conseil.

A vous de choisir, donc, entre normativité haute et basse !

Noé a-t-il sauvé les poissons ou sont-ils restés dans l’eau ? [Jo]

Quelques éléments de réponse personnelle :

1- Que ce soient les poissons, tout autant que les volatiles, les animaux terrestres et les humains présents dans l’arche, ce n’est pas Noé qui les a sauvés mais Dieu. C’est lui qui a donné l’ordre à Noé de construire le refuge flottant où toutes ces espèces pouvaient loger, et c’est lui qui a laissé les eaux détruire tous les autres. Noé a obéit, mais il n’est pas l’auteur du salut.

2- Je ne suis pas de ceux pour qui la validité historique du récit du déluge est déterminante pour en estimer la valeur. On peut trouver cette histoire ridicule, mais il semble bien qu’un événement catastrophique de grande ampleur se soit déroulé, qui a impacté des récits de même facture dans de très nombreuses civilisations. Même si ce récit est à entendre de façon métaphorique, j’y reçois des vérités très interpellantes pour aujourd’hui. Ainsi : Le déluge est provoqué par le mal que commettaient les hommes (Genèse 6. 5) et la violence qui remplissait la terre (6. 11). Que le comportement humain ait des répercussions négatives sur toutes la création, cela ne vous paraît-il pas d’actualité (pollution, réchauffement climatique, etc.) ? Avoir foi en Dieu, croire ce qu’il dit nous fait souvent apparaître pour des idiots auprès de nos contemporains qui ne croient pas, tout autant que si nous nous mettions à construire un bateau gigantesque au beau milieu d’un continent…

3- Le mot aquarium n’existe pas en hébreu biblique. Les premiers aquariums datent du XIXe siècle. Merci d’avoir posé cette question qui m’a permis d’en apprendre davantage sur les aquariums !

Noé a-t-il sauvé les poissons ou sont-ils restés dans l’eau ? [Jo]

Une réponse Croix Bleue : les poissons aiment l’eau, eux… hein Noé ?

Une bonne nouvelle : la baleine n’est pas un poisson. Parce qu’en couple dans l’arche, ça aurait été galère. C’est assez…

Une réponse rabbinique : les poissons n’étaient pas concernés par le péché parce que n’ayant pas de paupières ils ne peuvent pas fermer les yeux sur le péché.

N’oubliez pas de chercher votre réponse !

Pourquoi Dieu a-t-il essayé de tuer Moïse (Exode 4:24-26) et pourquoi est-il sauvé par la circoncision de son fils ? [Laura]

Merci pour cette question que je me suis souvent posée sans jamais prendre la peine d’y chercher une réponse précise.

Genèse 17/9-14 explique le sens de la circoncision. C’est le signe de l’appartenance d’un individu au peuple avec lequel Dieu a fait alliance par l’intermédiaire d’Abraham.  Sans circoncision, l’individu est exclu de l’alliance et de ses promesses.
Bien longtemps après ce commandement,donné à Abraham Moïse est né dans le peuple de l’alliance. Puisque rien n’est précisé à ce sujet dans le livre de l’Exode, nous pouvons croire qu’il a été circoncis, comme tous les enfants de son peuple à 8 jours, malgré les persécutions et le danger qui devait peser sur lui (Josué 5/5). L’histoire nous laisse ensuite entendre que Moïse fut tiraillé entre son appartenant au peuple hébreu (Exode 2/11-13) et les cultures diverses de ceux qui l’ont pour ainsi dire « adopté » pour lui sauver la vie : la fille du pharaon (Exode 2/10) puis le madianite Réuel dont il épousa la fille et le mode de vie sans vraiment avoir l’impression d’appartenir pleinement à ce peuple (Exode 2/21-22).
Exode 4 est le moment où Moïse qui vient d’accepter l’appel de Dieu doit se ranger définitivement du coté du peuple de l’alliance. Il me semble qu’il doit donc, en quelques sortes, mourir aux différentes identités entre lesquelles il a navigué pour accepter l’identité que Dieu lui donne. Cela passe certainement par la circoncision de son fils, qui avait dû être négligée, vue la situation flottante de l’identité de Moïse. C’est ainsi que nous pouvons penser que Séphora accomplit à la place de son mari ce qu’il aurait dû faire, en rangeant la famille entière dans l’alliance de Dieu (ce que peux signifier l’expression « époux de sang » ). En acceptant le geste de sa femme, Moïse renonce  aux vieilles identités qui l’ont jusque là protégées, pour entrer dans la mission que Dieu lui donne. Il devra dorrémavant mettre sa confiance en Dieu seul.
Pourquoi tant de violence, me direz-vous ? Peut-être pour nous dire que la vie avec Dieu nécessité, un jour et chaque jour quelque chose de l’ordre du renoncement à nos fausses sécurités, aux histoires et aux actions que nous inventons pour nous en tirer par nous-mêmes. Paul nous dira qu’en Jésus, il nous est donné d’apprendre à mourir à nous-mêmes. L’appel est sérieux, le chemin, est celui de la vie et de la liberté promises.
Romains 6:4 « Nous avons donc été ensevelis avec lui par le baptême en sa mort, afin que, comme Christ est ressuscité des morts par la gloire du Père, de même nous aussi nous marchions en nouveauté de vie. »

Que faire de la prédestination aujourd’hui ? [Aline]

Dans une culture occidentale qui présuppose que les Hommes sont naturellement libres et autonomes, ce n’est effectivement pas une doctrine facile.

L’idée (développée en Romains 9-11) selon laquelle Dieu choisit certaines personnes (Romains 9,14), pour leur donner la foi et qui auront la vie éternelle, tandis que les autres n’ont pas cette chance, est difficilement compatible avec l’esprit moderne.

Je crois qu’il faut appréhender cette doctrine avec deux manières de vivre la réalité :

  • ce qui est de notre ressort
  • ce qui nous dépasse et appartient aux impénétrables voies du Seigneur

Ce qui est de notre ressort est de répondre aux appels de Dieu, lui obéir avec effort (Luc 13,24) et persévérance (Actes 14,22), être exemplaires avec tout le monde (Matthieu 5,13-16) et témoigner de notre foi (Romains 10,14), car le salut est destiné à toute la création (Jean 3,16-18).

Mais, afin de ne pas s’enorgueillir, être surpris ou découragés, il faut garder en tête que Dieu a un plan, des projets et des manières d’opérer qui nous dépassent. Même si le croyant doit s’efforcer de marcher avec Dieu, c’est en fait Dieu lui-même qui opérera (Romains 9,16 ; 1Thessaloniciens 5,23-24). Même si le croyant progresse dans la sanctification, il connaîtra des épreuves (1Pierre 1, 6-7) et des oppositions. Même si le croyant témoigne avec talent, certaines personnes demeureront sourdes à la Parole (Romains 9,18).

Que faire de la prédestination ? Comme l’apôtre Paul, méditer ce mystère et conclure :

« Quelle profondeur ont la richesse, la sagesse et la connaissance de Dieu! Que Ses jugements sont insondables, et Ses voies impénétrables! En effet, qui a connu la pensée du Seigneur, ou qui a été Son conseiller? Qui Lui a donné le premier, pour être payé en retour?  C’est de Lui, par Lui et pour Lui que sont toutes choses. A Lui la gloire dans tous les siècles! Amen! » (Romains 11,33-36)

Hébr 8-7 : « Si la première alliance avait été irréprochable- il n’aurait pas été question de la remplacer par une seconde. » Comment comprendre que Dieu puisse mettre en place l’imparfait ? [Simon]

Cette question dépasse très largement la seule citation de l’épître hébreux… Car si Dieu n’avait pas mis en place l’imparfait, aurait-il seulement créé l’humanité ? Et c’est bien de cela dont il est question ici : cela n’est pas tant la première alliance qui était imparfaite que ce que les humains en ont fait « Parce qu’eux-mêmes ne se sont pas maintenus dans mon alliance, moi aussi je les ai délaissés, dit le Seigneur. » v.9. Et c’est toute l’histoire du Salut biblique qui se dit là : celle d’un Dieu qui inlassablement propose à l’être humain de le sauver, lui indique un chemin de Vie, mais le laisse libre de ses choix par amour. Si l’alliance du Seigneur avait été si parfaite que nous ayons été obligés de la respecter, nous n’aurions pas pu choisir librement d’aimer le Seigneur. Dieu a pris le risque de la liberté pour que cette relation d’amour soit possible. En Christ il va même encore plus loin, choisissant délibérément d’aller jusqu’au bout de cet amour en acceptant d’être crucifié. Dieu a renoncé à la colère pour nous apprendre à aimer.

L’Evangile de la grâce à bon marché est-il une #fakenews ? [Henry]

« Depuis le prophète jusqu’au prêtre,
Tous usent de tromperie. […]
Paix ! paix ! disent-ils ;
Et il n’y a point de paix. » (Jérémie 6,13-14)

Il n’y a pas que les politiques qui sont des trompeurs. Les théologiens le sont aussi souvent. On prétend même méchamment que le saint patron des théologiens est le Serpent de la Genèse. Car il est le premier à avoir enclenché la sacro-sainte « pensée critique » avec son : « Mais… Dieu a-t-il vraiment dit… ? » (Genèse 3,1).

Une fausse prophétie est une fausse information.
Une parabole tordue pour la mettre à notre service est une fausse information, un mensonge.
Une prédication de la grâce qui ne conduit pas à la repentance, à l’humilité, à fuir le péché et à changer de vie est une fausse information, une grâce qui n’est pas donnée par Dieu.

« Si un prophète prophétise la paix, c’est par l’accomplissement de ce qu’il prophétise qu’il sera reconnu comme véritablement envoyé par l’Eternel. » (Jérémie 28,9)

« Parce que vous affligez le coeur du juste par des mensonges,
Quand moi-même je ne l’ai point attristé,
Et parce que vous fortifiez les mains du méchant
Pour l’empêcher de quitter sa mauvaise voie et pour le faire vivre,

Vous n’aurez plus de vaines visions,
Et vous ne prononcerez plus d’oracles ;
Je délivrerai de vos mains mon peuple.
Et vous saurez que je suis l’Éternel. » (Ezéchiel 13,22-23)

Que signifie le terme « onction » que les Eglises charismatiques d’aujourd’hui emploient sans cesse ? [Andry]

L’onction des descendants d’Aaron pour être prêtres pour Israël est définie en Exode 40,14-15 : « Tu feras approcher ses fils, tu les revêtiras des tuniques, et tu les oindras comme tu auras oint leur père, pour qu’ils soient à mon service dans le sacerdoce. Cette onction leur assurera à perpétuité le sacerdoce parmi leurs descendants. »

Etaient oints (aspergés d’une huile ou d’un parfum), les prêtres, les prophètes et les rois. D’où l’idée d’une onction sacerdotale, d’une onction prophétique et d’une onction royale. « Oint » en hébreu a donné le mot Messie en français, et « oint » en grec a donné le mot Christ. Jésus est celui qui est « oint » par excellence, il est le Christ et le Messie, celui qui a reçu sur une seule et même personne la triple onction sacerdotale, prophétique et royale.

Ceux qui sont chrétiens sont donc de « petits oints ». C’est aussi ce que suggère 1 Jean 2,27 : « Pour vous, l’onction que vous avez reçue de lui demeure en vous, et vous n’avez pas besoin qu’on vous enseigne; mais comme son onction vous enseigne toutes choses, et qu’elle est véritable et qu’elle n’est point un mensonge, demeurez en lui selon les enseignements qu’elle vous a donnés. »

Dans certaines théologies néo-pentecôtistes, l’onction fait référence à l’expérience du baptême du Saint-Esprit, où l’Esprit Saint descend pour oindre ses présents apôtres. Mais un abus de ce qui est depuis Jésus une image (Jésus n’a pas été oint d’huile), fait que les leaders se désignent parfois comme spécialement inspirés, spécifiquement choisis et revêtus d’une autorité sacerdotale, prophétique ou de leadership. Ainsi ils doivent, pour certains, passer l’essentiel de leur temps à essayer de manifester ou signifier qu’ils auraient plus d’onction, plus de puissance, plus d’Esprit-Saint que les autres.

Comme si l’Esprit n’était pas souverain, entre les mains du Père, pour se donner lui-même, et nous conduire dans l’humilité du service.

Je crois en la Trinité- donc à l’Esprit-Saint. Mais croire que le corps et le sang du Christ sont réellement présents dans la Cène serait pour moi une superstition. Est-ce contradictoire ? [Valérie]

Quand Jésus a parlé à Nicodème de la nouvelle naissance, ce dernier a répondu, complètement à côté de la plaque, qu’il ne comprenait pas comment on pouvait retourner dans le ventre de sa mère (Jean 3). C’est la même chose quand Jésus dit « si quelqu’un mange mon corps et boit mon sang, il vit avec Dieu pour toujours » (Jean 6). Si vous lisez tout le discours de Jésus, il s’oppose à une compréhension strictement matérialiste de la vie… Le pain que Dieu donna aux hébreux dans le désert ou que Jésus multiplia pour les foules est l’élément physique d’un signe désignant la providence de Dieu pour les hommes. Mais la vie de l’homme est d’avantage que la stricte compensation de ses besoins biologiques !

Le plus profond besoin de l’homme est d’être pardonné et réconcilié avec Dieu. Seul le sacrifice de Jésus sur la croix, avec son corps meurtri et son sang répandu répond à ce profond besoin pour aujourd’hui et pour l’éternité (1 Pierre 2, 24). La Cène présente le mystère rédempteur de la croix et de la résurrection, mais a également pour fonction spirituelle de nous y introduire et de nous y faire participer. Dans la Cène, par la foi et donc sous l’action de l’Esprit, nous plongeons dans la mort et la résurrection de notre Sauveur. Et si justement nous n’avons pas besoin de penser que le pain ou le vin s’est transformé en corps et sang, c’est parce que la présence spirituelle de Dieu à nos côtés est bien réelle ! Et pour être réelle, elle n’a pas besoin d’être physique parce que la réalité est d’avantage que le monde physique.

Toutes les « solutions » dogmatiques sur la transformation des éléments de la Cène proviennent donc effectivement soit d’une idolâtrie de la raison humaine cachant un esprit de contrôle, soit d’une confusion entre la foi et la pensée magique.