Est-il possible de lire la parabole des mines (Luc 19) en voyant le prétendant au trône comme l’esprit du mal ? Soit en renversant les rôles ? [Manu]

Lire une parabole en cherchant de nouvelles manières de l’interpréter est toujours intéressant. Le tout est d’être conséquent avec les pistes d’interprétations que l’on suit. Dans le cas que vous proposez, si le prétendant au trône est l’esprit du mal (et pas Jésus, comme manifestement lui-même le pensait…) qui sont ses serviteurs ? Sur quel pays lointain doit-il prendre l’autorité ? Qui sont ses concitoyens ? Vous voyez, cela fait beaucoup de questions, auxquelles il faut répondre pour trouver un nouveau sens à la parabole. Je vous laisse le faire. Pour ma part, j’ai besoin de me rappeler qu’il ne s’agit pas de simples allégories amusantes que Jésus donnait pour nous faire chauffer les méninges. Il s’agit, presque tout le temps, d’appels à la repentance, au retour vers Dieu, en nous reconnaissant dans tel ou tel personnage et en identifiant son comportement au nôtre, pour mieux le modifier si besoin.

Apocalypse 14:9 parle de ceux qui ont la marque de la bête sur le front ou la main ; pourriez vous m’éclairer un peu ? [Bodo]

L’Apocalypse a un langage codé, un peu comme les messages de radio-Londres aux résistants français sous l’occupation. Parce que c’est un livre qui proclame la victoire du Christ crucifié et ressuscité sur tous les pouvoirs du mal, et nous appelle à leur résister dans l’espérance. Qui dit code dit décryptage, pas toujours facile. Notons déjà que la « bête » fait partie, avec le Dragon (ch.12) et la « 2e bête » (ch. 13,11, appelée le faux-prophète dans d’autres passages comme 16,13) d’une sorte d’anti-Trinité, et qu’il lui est donné beaucoup de pouvoirs.

La marque (ou signe) de la bête est souvent citée dans l’Apocalypse. Là aussi, c’est une contrefaçon du sceau de Dieu sur le front de ses élus, attestant qu’ils lui appartiennent et qu’il prend soin d’eux (voir Ap. 14,1). Une sorte d’anti-baptême. Le terme grec employé, Charagma, était réservé au sceau impérial ou à l’empreinte d’une monnaie. Ce qui serait donc une allusion à l’empereur Romain et à sa prétention à se faire appeler « Seigneur » et recevoir un culte en lieu et place du seul vrai Dieu. Les chrétiens auxquels Jean, l’auteur de l’Apocalpyse, écrit, en refusant ce culte-là, allaient s’exclure de la société -et donc du système économique, ce qu’annonce 13,17 : personne ne pouvait acheter ou vendre sans cette marque.

Au passage, tordons le cou à une actualisation farfelue. Certains, sur la base de ce verset, identifient la marque de la bête au code-barre servant à identifier en caisse les articles achetés dans un commerce. Ils y ont même repéré le chiffre de la bête, le fameux 666. Leurs démonstrations savantes omettent simplement que ledit code-barre n’est pas posé sur notre main ou notre front (13,16). Il y a d’autres façons d’être fidèles à Jésus-Christ que d’embêter une caissière en lui refusant de scanner notre paquet de nouilles…

Comment expliquer la mort d’Ananias et Saphira (Actes 5, 1-11) ? Est-ce la conséquence d’un « blasphème contre le Saint-Esprit » (Marc 3, 29) ou d’un « pouvoir spécial » donné à Pierre (Matt 16, 19)? [Kristina]

Le rapport avec le Saint-Esprit est clair dans le récit de l’histoire d’Ananias et Saphira. Le premier a menti à l’Esprit (v. 3) et la seconde l’a provoqué, tenté ou défié (v. 9). Et comme vous le soulignez, le blasphème contre l’Esprit Saint est le seul dont on ne peut être délié.

Le mensonge est une question spirituelle… et mortelle si on s’y abandonne. La division qu’il apporte (le texte parle de Satan, celui qui divise) nous empêche d’être un. Et comme c’est contre l’Esprit que le couple s’est placé, ils se sont empêchés d’être un avec Dieu. C’est cela qui est mortel.

Et je crois donc que ce texte n’est pas là pour présenter un pouvoir spécial qui serait donné à Pierre, mais pour nous mettre en garde contre ce qui divise et nous monte contre l’Esprit et in fine nous tue.

J’ai entendu dire que des pasteurs Attestants « chasseraient l’esprit de Marie » de gens qui en seraient possédés ? Vous m’expliquez ? [Anonymous]

L’ennemi du Christ est le prince du mensonge. Evidemment, ceux qui vous ont dit cela ont fait des raccourcis et se sont glissé quelques confusions, au point que ce qu’ils vous ont dit n’a plus aucun rapport avec le réel.

Premièrement, tous les Attestants ne pratiquent pas la délivrance, et certains sont simplement confessants ou orthodoxes théologiquement, ils ne sont pas charismatiques et ne vont pas sur ce terrain-là.

Deuxièmement pas mal d’Attestants, comme beaucoup de croyants protestants ou évangéliques pensent que Marie étant la mère de Jésus, la figure de l’Israël véritable, la première chrétienne de l’histoire. Ils croient qu’elle sera, au dernier jour, la première ressuscitée (puisque nous ne croyons pas à son assomption et que nous pensons donc qu’elle attend le dernier jour dans la paix du séjour des morts). Nous avons donc grande révérence pour sa mémoire et son témoignage, mais ne nous adressons pas à elle puisque nous ne nous adressons qu’à Dieu et ne communiquons pas avec les morts.

Troisièmement, il est probable que la confusion vienne du fait suivant : les Attestants qui pratiquent la délivrance pensent que, derrière une mariologie idolâtrique (mariolâtrie) se cache une réalité spirituelle. L’entité qui « répond » à certaines prières, dans différentes expériences mystiques de par le monde, est plutôt ce que le livre de Jérémie (ch. 7 et 44)  appelle une puissance démoniaque qu’il nomme ‘Reine du Ciel » (ou Astarté, Ashera, etc.) et qu’en France on appelait dans le paganisme pré-chrétien la Dame Blanche (ou Marianne aujourd’hui 😉 !).
Alors oui, nous pratiquons la délivrance de ceux qui sont démonisés par la Reine du Ciel, mais nous savons que cette dernière n’a aucun rapport avec Marie de Nazareth ! Elle peut se déguiser pour tromper des croyants pas assez instruits des choses de l’Esprit, mais en aucun cas nous ne les assimilons !

Enfin, du fait d’une lecture trop restrictive de passages comme Apocalypse 12, certains groupes mariolâtres affublent à mauvais escient Marie du titre de Reine du Ciel, en ajoutant à la confusion.
Marie de Nazareth est admirablement nommée comme « humble servante » par les Ecritures, et c’est le plus beau nom qu’on puisse jamais lui donner.

Ce sujet est très complexe et donne lieu à beaucoup de souffrances dans le corps du Christ, alors nous demandons pardon par avance à toute personne qui serait troublée par notre réponse. Gardons ensemble les yeux tournés vers Christ afin que toute son Eglise reste unie.

La nouvelle traduction du Notre Père par l’Église catholique est-elle meilleure que la traduction oecuménique actuelle ? [David]

L’Eglise catholique a décidé ce changement dans la formulation commune du Notre Père : « Ne nous soumets pas à la tentation » est remplacé par « ne nous laisse pas entrer en tentation ».  Le problème est que le verbe grec eispherein, que l’on trouve aussi bien dans le texte de Matthieu que dans celui de Luc, signifie bien « transporter, mener,  induire, conduire, faire entrer dans ». Et non pas « laisser entrer ». Ce n’est pas la même chose ! Les tentatives de justifier ce changement sur la base d’une source littérale araméenne de la prière de Jésus paraissent très conjecturales, et surtout guidées par un présupposé : Dieu ne peut pas nous tenter, c’est l’oeuvre du Diable. Or Jésus lui-même a été poussé au désert par l’Esprit Saint pour y être tenté, éprouvé, le Diable lui-même étant soumis à la volonté de Dieu. Jésus a été tenté (y compris à Gethsémané et sur la croix) dans sa foi, dans sa relation au Père; La tentation est la condition de tout croyant. Dès que je crois, je suis exposé au combat -contre le doute. Et Paul précise que Dieu nous donne, avec l’épreuve-tentation, le moyen d’en sortir (1 Corinthiens 10,13). Jacques 1,13 « que personne ne dise c’est Dieu qui me tente, car Dieu ne tente personne » pourrait faire approuver le changement. Mais Jacques veut simplement rappeler que Dieu n’est pas à l’origine du mal, et qu’il ne le cautionne pas.

Bref, nous pouvons demander à Dieu de nous épargner l’épreuve que constitue la tentation, car nous sommes faibles. Mais nous n’avons pas à tenter de le « disculper » de toute responsabilité en modifiant le texte biblique, car c’est bien de cela qu’il s’agit.

La dot est-ce biblique ? Comment en parler face à des chrétiens de culture où elle est encore exigée ? Spirituellement que risque t-on ? [Jin]

Il y a cinq mentions de la dot dans le premier testament.
C’est une pratique culturelle. Cela ne fait pas partie des choses centrales de la foi.
La dot n’est pas un élément de la Bonne Nouvelle du Royaume puisqu’il n’y aura plus ni homme ni femme (Galates 3,28), et qu’on n’aura pas la préoccupation de la sexualité ou de la reproduction.

Donc il s’agit d’un élément totalement culturel. Qui a pour fonction de signifier que les familles « perdent » beaucoup quand elles lâchent un de leur membre pour qu’il intègre une autre famille. D’où la compensation symbolique qui s’y joue, et qui dans certains contextes n’est pas que symbolique, mais une vraie fortune.

Il ne faut pas mépriser ce qui se joue dans la culture ; souvent ce sont des intuitions justes pour marquer des grands moments de la vie, des rites de passage.
Maintenant si on a le sentiment d’être vendu(e) ou acheté(e) il faut prendre position spirituellement et signifier sa liberté, et le fait que nous sommes sous la seule autorité de Christ.

Quel est le sens biblique de notre offrande à l’Eglise ? [Lemurien]

Paul disait dans la deuxième épitre aux Corinthiens (9,7) : « Que chacun donne comme il l’a résolu en son coeur, sans tristesse ni contrainte; car Dieu aime celui qui donne avec joie. »

L’offrande fait partie de la louange. D’ailleurs il faudrait dans nos cultes la mettre dans la louange plutôt que connectée aux annonces (au business) de l’association cultuelle. Dans l’esprit de la dîme du premier testament, on donne les prémices de ce qu’on reçoit à l’Eternel, et le donner à l’Eglise est une façon d’œuvrer pour la gratuité de l’annonce de la Bonne Nouvelle du Royaume. Donc si nous donnons c’est dans la joie. Car le seul sacrifice qui vaille, depuis que Jésus a donné sa vie, c’est le sacrifice de louange, d’offrir notre reconnaissance (Hébreux 13,15).

Que dit la Bible de l’utilisation d’un don de sperme (ou don d’ovocyte) pour un couple stérile ? [Tony]

La notion de don d’ovocyte n’existe pas dans la Bible.

Laissez-moi d’abord vous poser une question. Pourquoi voudriez-vous que ce soit la Bible qui décide à votre place ? Dieu veut que nous décidions pour les choses de la vie. Il nous informe dans la prière en inclinant notre conscience, et il nous informe par le témoignage biblique où d’autres, qui ont vécu des situations similaires, ont fait des choix instruits par le Seigneur ; ce qui nous inspire.

Sur la question du don de sperme ou don d’ovocyte, les personnages de la Bible avaient une approche très pratique, liée aussi à leur époque. Par exemple, la Loi biblique permettait qu’on épouse la veuve de son frère, afin de lui offrir une sécurité mais aussi de prolonger sa descendance. Ce n’est pas un « don de sperme », mais c’est quand même l’idée que quelqu’un d’autre pallie à la fécondité.
Abraham, voyant que Sarah n’était pas enceinte, a été avec Agar (don d’ovocyte), afin d’avoir un fils, Ismaël. Mais ce ne fut pas forcément une réussite puisque c’était le fruit de l’impatience et la désobéissance d’Abram… qui devait attendre que la promesse s’accomplisse selon les méthodes de Dieu !

Donc on ne peut pas dire que les histoires de la Bible nous informent vraiment sur ce que l’on DOIT faire. Tout est question de relations et de motivations. Vous pouvez vous poser les questions suivantes :
– Est-ce que le désir de fécondité est insatiable au point de considérer que « tous les moyens sont bons » ?
– Est-ce que Dieu vous appelle uniquement à la fécondité biologique ?
– Est-ce que vous avez fait le deuil quant au fait que « tout ce que la technique nous offre » n’est pas forcément bon ?

Après cela, en extrapolant ce que dit Paul en Romains 14,23, j’aurais envie de conclure : « Tout ce qui n’est pas issu d’une conviction spirituelle reçue dans la prière est… une mauvaise voie ».

Est-ce normal qu’après avoir pardonné à un parent, on ressente un désarroi ? Le pardon unilatéral, comment faire pour ne plus être en attente que l’autre reconnaisse ses torts ? Que dit Jésus ? [Kym]

Jésus est radical en Matthieu 18. Dieu nous pardonne quand on regrette (c’est la parabole du serviteur indigne). Mais en plus, il nous dit de pardonner soixante-dix fois sept fois, autant dire, pardonner à la folie ! Parce que ça consiste à pardonner quelqu’un toutes les trois minutes durant une journée où on ne dormirait même pas !!!

Donc pour notre esprit, nous pouvons trouver la satisfaction de juste pardonner, comme Dieu a pardonné, totalement et radicalement.
Ceci dit, pour que le pardon soit pleinement satisfaisant pour notre âme, nous avons aussi besoin de la repentance de l’autre en vis-à-vis. Et là c’est plus dur. Car il nous faut accepter qu’il n’y ait parfois pas de retour. Souvent c’est même parce que l’autre n’a pas compris, ou pas voulu comprendre qu’il nous avait blessé.

Le désarroi peut venir du fait qu’on fait une vraie démarche qui a pour but la restauration complète de la relation, mais que là il manque quand même quelque chose si la restauration n’est pas vraiment activée du côté de l’autre.

La Bible est-elle plus violente que le Coran ? [Anna]

La Bible plus violente que le Coran ? Voici une proposition de non-réponse en deux trajectoires :

1. D’abord ces deux livres sont des objets avec des textes. Ils peuvent raconter des histoires violentes et comporter des textes qui appellent à la violence.
Mais c’est surtout la lecture qu’on en fait et l’usage pour lesquels on s’en sert qui peut être violent.

2. La Bible comporte pas mal de récits violents, parce que la vie est violente. Elle comporte aussi des paroles dures où des humains appellent à la violence, et des passages où l’on peut voir que Dieu se comporte d’une façon que nous pouvons considérer comme violente vue d’aujourd’hui. Mais la Bible, contrairement au Coran comporte une mise en ordre radicale, avec un premier et un nouveau testaments. Le Nouveau, avec les évangiles à son commencement, nous offre par la parole de Jésus un changement radical, qui consiste en particulier par le refus total de la violence. Ce qu’on entend derrière le « Aimez-vos ennemis » de Jésus en Matthieu 5,44, l’affirmation de l’apôtre Paul « Non, ce n’est pas contre des êtres humains que nous devons lutter. Mais c’est contre des forces très puissantes qui ont autorité et pouvoir. Nous devons lutter contre les puissances qui dirigent le monde de la nuit, contre les esprits mauvais qui habitent entre le ciel et la terre. » en Ephésiens 6,12. La mort de Jésus sur la croix se veut « dernier sacrifice » comme le décrit l’épître aux Hébreux, afin que justement les violences s’arrêtent.