Faut-il être diplômée de théologie pour animer une étude biblique ? Apparemment- il y a beaucoup d’incohérences dans la Bible ? Jusqu’à quel point pouvons-nous compter sur le Saint-Esprit ? [Mima]

Votre triple question, Mima, revient finalement à la suivante : Le sens d’un texte biblique est-il toujours immédiatement accessible ?

La réponse est non. Tout d’abord, il doit nous être traduit dans notre langue (à moins que vous parliez et lisiez couramment l’hébreu ou le grec anciens). Puis replacé dans son contexte historique, littéraire, pour cerner l’intention de son auteur, et ce qu’il pouvait signifier pour ses premiers lecteurs. Les incohérences que vous avez relevées tiennent parfois à des situations différentes, des angles de vue divers et complémentaires sur un sujet donné… Enfin, il nous faut l’interpréter, c’est à dire accueillir ce que le texte veut me dire , dans ma situation particulière, bref quelle parole de Dieu il m’adresse aujourd’hui… ou nous adresse, devrais-je dire, car il est bon de la lire avec d’autres !

Pour toutes ces étapes : observer, puis comprendre, pour enfin, et c’est le but, mettre en pratique ce que nous dit la Bible, le Saint-Esprit nous est nécessaire d’un bout à l’autre. Mais le Saint-Esprit ne court-circuite pas ni ne remplace notre intelligence, nos connaissances, bien au contraire, il s’en sert et les éclaire. Avec ou sans diplôme, il est donc bon d’avoir un bagage théologique et quelques notions de méthode de lecture d’un texte avant d’aider les autres à explorer cet univers fantastique et parfois surprenant qu’est le monde de la Bible !

Lors du retour du Seigneur- la terre sera-t-elle régénérée ou bien complètement détruite- puis remplacée par la Jérusalem céleste ? [Joël]

Certains passages de l’Ecriture abordant la fin des temps décrivent une sorte de destruction totale, effectivement, comme dans la 2e lettre de Pierre, au chapitre 3, qui rappelle le précédent du déluge. Mais ce qui disparaîtra, est-il précisé au v.10, ce sont les éléments célestes (les astres etc), qui désignent, dans ce langage codé qu’est le style dit « apocalyptique », l’ordre actuel du monde. Les astres y figurent les puissances spirituelles qui prétendent le régenter à la place de Dieu (comparer Marc 13,24-25). La terre et ce qu’elle contient sera, pour sa part, jugée, toujours selon le même verset. Ce passage de l’épître se termine par le célèbre « nous attendons de nouveaux cieux et une nouvelle terre où la justice habitera », au v.13. L’adjectif utilisé dans le texte grec original pour « nouveau » est kainos, ce qui est « renouvelé », et non neos, ce qui est neuf, au sens d’inédit. Autrement dit, ce n’est pas un autre monde que le Seigneur prépare par son règne à venir, c’est ce monde abîmé, blessé, en souffrance, marqué par le mal et la mort, mais qu’il vient totalement relever, purifier, transformer, délivrer… Le jugement du monde ancien est intervenu à Golgotha, à la mort de Jésus (ce que signifient les ténèbres qui ont régné à ce moment-là, voir Matthieu 27,45) et la nouvelle création a commencé le 3e jour après, au matin de sa Résurrection.

Votre question en tout cas est très pertinente, et sa réponse a des conséquences pratiques très importantes. Car si ce monde où nous vivons était déclaré irrémédiablement perdu, la tentation des croyants pourrait être grande de s’en désintéresser, de se désinvestir de la préparation du règne de Dieu dans tous les domaines : social, économique, politique, écologique, etc…. et de se replier dans une « bulle spirituelle », un peu comme Jonas, à l’abri de son arbuste, attendant la destruction de Ninive !

Luc 17:34 sonne comme un cauchemar avec les familles divisées et un envoyé en enfer. Qu’est-ce que ça veut dire ? [Marguerite]

Je ne sais pas pour vous, Marguerite, mais ce qui me met le plus mal à l’aise quand j’ai un cauchemar, c’est l’impression d’assister à une scène menaçante, pénible, sans pouvoir réagir, rester prisonnier d’une réalité qui m’enferme. Et alors le réveil sonne comme une libération : « ouf ! ce n’était qu’un rêve ». Les paroles de Jésus concernant son retour et le jugement, à la fin des temps, ont pour but précisément de nous tenir éveillés, de nous mettre en garde. Il est urgent de nous préparer au retour du Maître, qui nous surprendra tous. Le verset que vous citez fait partie de ces paroles (« deux personnes seront dans le même lit, l’une sera prise (sous-entendu dans le Royaume de Dieu), l’autre laissée ».

Ce texte nous dit que l’appartenance à la famille de Dieu va au-delà des solidarités humaines les plus étroites (comme celle de la famille). Elle dépend non seulement de l’appel de Dieu, mais de la réponse que je lui donne aujourd’hui, dans la foi, quelles que soient mes origines, mes liens et mes relations. Un peu plus loin dans le même évangile, Jésus pose la question : quand je reviendrai, est-ce que je trouverai la foi sur la terre ? (Luc 18,8)

Est-ce que Dieu a toute notre vie tracée pour nous (Jér 1-5) ? C’est une pensée réconfortante. [Cecelie]

Oui Cécélie, on peut trouver bien des passages des Ecritures qui nous attestent que nos chemins sont dans la main de Dieu, voulus, tracés par lui. Non seulement dans le récit de la vocation de Jérémie, mais aussi dans les Psaumes (31,16; 139,16a, etc), dans l’épître aux Romains (ch.9,à partir du v.11), ou aux Ephésiens (1,4ss)… C’est ce que l’on appelle l’élection, ou la prédestination. Mais ce n’est pas à confondre avec le fatalisme, qui entraînerait une sorte de résignation passive (du genre « c’est mon destin »), ou d’attente béate que tout nous tombe « tout cuit dans le bec ». Car Dieu qui trace notre vie nous appelle, ce qui suppose de notre part une réponse. Autrement dit, Dieu entre en alliance avec nous, nous rend co-responsables de notre vie, de nos choix, de nos actes. Et partenaires de son projet. Pour signer un contrat, il faut être deux. Paradoxalement (la vérité dans la Bible est toujours paradoxale), c’est cette souveraineté absolue de Dieu qui fonde notre liberté ! C’est réconfortant, certes, mais pas toujours confortable… Demandez à Jérémie (voir sa réponse peu enthousiaste, au verset qui suit celui que vous citez).

Actes 5: 15-16 (la silhouette de Pierre guérissant les gens) confère-t-il une validité à l’idée catholique que les reliques de saints peuvent guérir ? Que faisons-nous de cette histoire biblique ? [Pierre]

Si vous lisez de près ce récit du livre des Actes, notez que l’on plaçait les malades sur le passage de l’apôtre Pierre dans l’espoir que son ombre seule suffirait à les guérir (l’ombre représentait dans l’antiquité l’énergie vitale de la personne). Un peu comme cette femme qui voulait guérir en touchant simplement le vêtement de Jésus (év. de Luc 8,43-48). Ce qui est étonnant… c’est qu’elle a été vraiment guérie ! Mais pas par magie. Parce que Dieu a répondu à sa confiance, sa foi (même naïve et superstitieuse) en Jésus. Le Seigneur n’attend pas pour agir et répondre que notre foi soit parfaitement informée ou mâture. Un manuscrit ancien du Nouveau Testament, le codex de Bèze, ajoute même dans le texte des Actes que tous ceux que l’ombre de Pierre couvraient étaient guéris de toute maladie. Il se peut que ce soit la version du texte original des Actes. On peut faire à ce sujet la même remarque que pour le récit de l’Evangile. Ce n’est pas l’ombre de Pierre qui était porteuse en soi de puissance, pas plus que le manteau de Jésus. Tout comme son Maître qui l’a envoyé, Pierre est témoin de l’amour de Dieu qui seul relève et guérit. Les miracles des apôtres accompagnent le message qu’ils proclament.

De là à penser qu’une Eglise, en conservant des reliques (supposées authentiques) de saints ou d’apôtres, pourrait contrôler et dispenser à ses fidèles la guérison que Dieu accorde librement, par sa Grâce, il y a un grand pas… pour ne pas dire un fossé.

Si nous ne sommes plus grecs ou Juifs (Gal 3:28) et si les peuples sont réunis (Act 2:8-11)- pourquoi les protestants ont-ils des Eglises nationales séparées ? Pourquoi pas une EPU Internationale ? [Oliver]

Les chrétiens du monde entier, et pas seulement les protestants, sont répartis en une multitude de dénominations qui, souvent, se sont donné des limites territoriales correspondant à celle de leur pays, effectivement.

Pour des raisons pratiques tout d’abord. Vous imaginez un synode avec des protestants chinois, nigérians, camerounais, français, allemands, malgaches, ukrainiens, coréens, etc… ? les trois-quarts du budget d’une telle Eglise passeraient en frais d’interprètes… et de transport !). Mais pour éviter de s’ignorer et de négliger la dimension universelle du peuple de Dieu, des organismes ont été créés comme le Conseil Oecuménique des Eglises (regroupant Eglises issues de la Réforme, et Eglises orientales, notamment), l’Alliance Evangélique Universelle, l’Alliance Réformée mondiale, la Fédération Luthérienne Mondiale, etc… A noter aussi que de nombreux pasteurs d’origine étrangère (africains, malgaches, allemands, suisses, hollandais) viennent souvent exercer leur ministère dans nos Eglises en France, notamment dans l’Eglise protestante unie. Et c’est très enrichissant. N’oublions pas, enfin, que ce qui nous unit avant tout n’est pas une organisation humaine commune, mais la même foi en Jésus-Christ mort et ressuscité.

Les adventistes du septième jour sont-ils une secte ? [Oscar]

Le mot « secte » est un terme de sens très variable. Couramment, on entend par là un groupe religieux extrêmement fermé, aux doctrines bizarres, et dont les adhérents se font manipuler par un fondateur ou un maître soit illuminé, soit escroc… Je peux garantir que les Eglises adventistes ne répondent en rien à ce signalement ! J’étais encore ce matin chez un collègue, pasteur adventiste, qui m’a passé une magnifique vidéo (produite par les adventistes d’Allemagne) illustrant l’appel que Jésus nous adresse à être à sa suite lumière du monde…. (Matthieu 5,14).

Il s’agit d’une des nombreuses branches du protestantisme, née au XIXe siècle, qui met l’accent sur le retour du Christ (que tous les chrétiens attendent d’ailleurs). Leur dénomination complète est « Eglise adventiste du 7e jour » car une de leurs particularités est de célébrer le sabbat, (donc leur culte a lieu le samedi), estimant que le 4e commandement du décalogue reste applicable aux chrétiens. Les adventistes sont membres de la Fédération Protestante de France. Ils ont un fort témoignage dans le domaine de la santé (L’association adventiste Vie et Santé propose notamment depuis 1959 le fameux « plan de 5 jours » pour aider à décrocher de l’addiction au tabac).

 

 

A quoi se réfère le verset de Genèse 6v2 ? Qui sont ces habitants du ciel dont il est fait question et la suite des versets 4 les héros d’autrefois ? [Marie]

Tout d’abord, Marie, merci pour votre question qui me donne l’occasion de me pencher sérieusement sur ces quatre premiers versets mystérieux de Genèse ch.6 !

Je me suis aperçu en me documentant que plusieurs interprétations ont été proposées. Certaines paraissent farfelues (le texte évoquerait des extra-terrestres, par exemple, d’où l’expression « habitants du ciel », qui ne correspond nullement au texte biblique). Les pistes les plus sérieuses voient dans les « fils de Dieu » des êtres célestes (sortes d’anges déchus qui auraient engendré des demi-dieux, les « géants » du v.4, avec des humaines), mais on ne voit pas ce que ce mythe viendrait faire dans le déroulement du récit des origines, qui court des ch.1 à 11. Et il n’est pas dit, d’ailleurs que les « géants », nephilim, peuple de grande taille mentionné en Nombres 13,31-33, soient issus des unions décrites au v.2.

D’autres ont vu dans les « fils de Dieu » les descendants de Seth, celui qui invoquait le Seigneur (Gn 4,25), mais il vaut mieux, avec  rapprocher l’expression « fils de Dieu » de son emploi dans le Psaume 82, cité par Jésus en Jean 10,34 (voir aussi Ps 89,27): elle désigne des princes, chefs et autres rois de ce monde ; appelés ainsi à cause de l’autorité qui leur est confiée par Dieu, autorité dont ils ne se montrent guère dignes en méprisant la justice et en détournant le pouvoir à leur profit, notamment en se constituant des harems. Cette dernière interprétation cadre mieux avec le contexte du récit de la Genèse. Depuis la chute (Genèse 3), le récit nous montre la dégradation du monde consécutive au péché de l’homme et à sa volonté de pouvoir. D’où la sentence divine au v.3.

Croyez-vous en la « révélation progressive » ? Par exemple- une progression de la violence de l’Ancien Testament en 1 Chron 22-9 jusqu’à la déclaration de Jésus dans Matt 5-9 [Luc]

Parler de révélation progressive de Dieu, notamment à travers l’histoire du peuple d’Israël, semble juste, si on considère le simple fait que la rédaction des écrits bibliques s’étale sur plus d’un millénaire !

Vous évoquez à ce sujet la question délicate de la violence dans le Premier Testament. En effet, on peut s’étonner, voire être choqué, entre autres, par certains ordres donnés par Dieu ou en son nom : dans les récits de la conquête de la terre Promise (voir le ch. 6 de Josué par exemple, et l’anéantissement des populations de Canaan) ou encore de l’idolâtrie d’Israël au désert (Exode 35,25-29). Il s’agit pour les auteurs d’insister sur le rejet absolu du mal, que Dieu a en horreur. Israël, peuple mis à part pour manifester la sainteté de Dieu, ne doit rien laisser subsister en son sein, et autour de lui, qui pourrait y porter atteinte. On peut évoquer aussi certaines imprécations dans les psaumes, mais là, elles expriment souvent la souffrance et la colère du croyant opprimé, persécuté, qui appelle au secours, demande justice et délivrance (voir par exemple le dernier verset du Psaume 137).

Il faut y insister cependant : dès les origines, Dieu se manifeste comme celui qui ultimement fait grâce. Comme le dit un autre  Psaume (117), la bonté du Seigneur pour nous est la plus forte (et sa « colère », ajouterais-je, n’est que l’expression de son amour blessé). Moïse, en intercédant pour Israël, a pu « fléchir » le Seigneur et l’amener à renoncer à anéantir le peuple rebelle. La violence n’est pas le dernier mot de Dieu. A la croix de Jésus-Christ, Dieu prend sur lui la conséquence de notre péché et de notre idolâtrie. Désormais, ce n’est plus contre des hommes que nous avons à lutter. Le combat est à l’intérieur de nous-mêmes, de nature spirituelle. Nos armes : l’amour, le pardon. Notre victoire : la paix et la réconciliation.

Comment devons-nous comprendre qu’en Josué 10-12-14 le soleil reste immobile ? [Learner]

Le livre de Josué emprunte explicitement ce récit à un autre livre qui ne nous est pas parvenu, le « Livre du juste ». L’épisode se situe lors de la conquête de la terre promise. Il s’agit d’un miracle, qui a permis au peuple de Dieu de remporter un succès complet sur ses ennemis amorites (juste auparavant, des grelons gros comme des pierres ont même atteint ceux qui tentaient de fuir). Les récits bibliques ne sont pas avares d’autres interventions de Dieu qui bousculent les lois de la nature (comme l’ouverture de la Mer Rouge lors de la sortie d’Egypte). Josué demande à Dieu d’arrêter la course du soleil et de la lune.

Deux questions se posent : ce miracle a-t-il eu lieu, historiquement ? Bien des explications ont été tentées. La plus plausible serait une éclipse, on pourrait comprendre alors que le soleil (comme la lune bien entendu) se sont arrêté… de briller (des chercheurs anglais auraient établi qu’une éclipse annulaire a eu lieu le 30 octobre 1207 avant notre ère au Proche-Orient, ce qui peut correspondre à la période de la conquête). Il reste que, de même que pour le miracle de la mer Rouge (Tsunami ? violent coup de vent ?), qu’aucune explication d’ordre scientifique n’est sûre à 100%. L’intention de l’auteur n’est pas de nous faire chercher ou comprendre comment cela s’est passé, mais de nous inviter à croire que Dieu est intervenu pour sauver son peuple.

L’autre question, plus importante, est de saisir la signification de cette intervention de Dieu sur le soleil et la lune. Si les astres « sont immobiles » (sens exact du verbe hébreu utilisé ici), eux que les peuples antiques adoraient voire craignaient comme des dieux, c’est qu’ils ne sont que des objets célestes au service du Créateur et de ceux avec qui il a fait alliance.