Le protestantisme s’est construit sur la volonté de faire de la Bible la norme de la foi. Il est donc logique et conforme à la pensée des réformateurs que nous, protestants, croyons ce que la Bible dit de Marie. Elle y est présentée comme une femme humble et pleine de confiance en Dieu, la première à avoir accueilli Jésus d’une manière plus que courageuse. Un modèle de foi, dont nous pouvons nous inspirer.
Pourquoi alors certains protestants affirment-ils qu’ils ne croient pas en Marie ?
Je crois que certains, marqués par la théologie libérale ou la culture ambiante, veulent exprimer qu’ils ne croient pas que Marie ait pu donner naissance à Jésus sans avoir eu de relations sexuelles avec un homme. C’est pourtant ce que la Bible raconte. Cela n’a rien d’incroyable pour qui croit en un Dieu créateur, d’imaginer qu’il puisse donner vie en dehors de ce que nous pouvons humainement envisager. Et cela a beaucoup de sens, puisque cette conception particulière dit que Jésus n’est pas un simple humain mais bel et bien le Fils de Dieu, Dieu venu dans notre humanité afin de la relever.
D’autres veulent certainement manifester qu’ils ne croient pas en certaines des choses que le catholicisme dit de Marie sans que cela ne repose sur ce que la Bible en dit. Comme protestants, nous ne croyons pas que Marie est montée au ciel, ce que la tradition catholique nomme l’Assomption. Nous ne croyons pas non plus que Marie a été conçue sans péché ce que le catholicisme appelle le dogme de « l’immaculée conception ». Enfin, nous ne pensons pas que Marie soit demeurée vierge toute sa vie, mais bien plutôt, comme la Bible l’indique, qu’elle a eu d’autres enfants avec son mari, Joseph.
Ne pas croire en Marie peut aussi signifier pour certains ne ne pas lui adresser de prières. En effet, les protestants, dans la ligne de ce qu’indique la Bible, n’adressent pas plus de prières à Marie qu’à ceux que le catholicisme nomme ‘les saints ». En effet, nous croyons avec Timothée 2/5 que Jésus est le seul médiateur entre le Père et nous. Ainsi, dans la droite ligne des premiers écrits chrétiens, et plus particulièrement des épîtres de la Bible, nous adressons nos prières au Père, au nom de Jésus.
Pourquoi Jean- dans l’Apocalypse- n’écrit pas directement aux Églises- mais aux anges des Églises ? [Hana]
Le livre de l’Apocalypse, Hana, est un livre chargé de symboles, ce qui rend sa compréhension parfois difficile, pour ne pas dire obscure, si on ne prend pas le temps de les interpréter.
Le nombre d’Eglises auxquelles les fameuses lettres sont envoyées (Ch. 2 et 3) est lui-même très symbolique. Le chiffre 7 représente une totalité, une plénitude, on peut donc penser que ces Eglises, les plus importantes d’Asie Mineure au moment de la rédaction du livre (vers l’an 100 de notre ère), représentent l’Eglise universelle.
Pourquoi écrire aux anges de ces Eglises ? Une explication est donnée au Ch. 1. Dans cette vision inaugurale du livre apparaît le Christ dans sa gloire au milieu de sept chandeliers et tenant dans sa main droite sept étoiles représentant les sept Eglises. Le verset 20 en donne une explication : les étoiles sont les anges des Eglises, les chandeliers sont les Eglises.
Etoiles et chandeliers pourraient symboliser deux aspects de l’Eglise : l’Eglise comme réalité céleste (les étoiles brillent dans le ciel) ; l’Eglise comme réalité terrestre (les chandeliers brillent sur terre).
Or toutes les lettres aux Eglises sont tournées vers la fin des temps – l’eschatologie. Elles s’adressent donc plutôt à la réalité céleste de l’Eglise, à son devenir final. C’est une des manières de comprendre l’intermédiaire des anges.
Il y a plus de 60 mentions des anges dans le livre de l’Apocalypse, ce qui en fait le champion du Nouveau Testament en la matière ! Il est toutefois précisé à la fin que, bien qu’un ange ait été envoyé pour apporter cette révélation à Jean, seul Jésus est « l’étoile resplendissante du matin » (22, 16). Le seul à être à la fois le message et le messager.
Jésus commande d’aimer le prochain et l’ennemi. Pourquoi cette différence ? Tous sont nos prochains ! [Mathilde]
Jésus nous appelle à aimer :
– le Seigneur Dieu (Matthieu 22,37 rappelant Deutéronome 6)
– notre prochain (Marc 12,31)
– notre ennemi (Luc 6,27).
Il fait cette différence entre prochain et ennemi, car justement, Jésus donne une définition très précise de ce qu’est le prochain.
Pour nous le prochain c’est tout le monde.
Alors, soyons sérieux avec la Parole de Christ, et voyons ce qu’est un prochain d’après Jésus. Sa définition à lui n’a rien à voir avec la nôtre. En Luc 10,36 et 37 on peut lire dans l’histoire du Bon Samaritain : « Lequel de ces trois hommes te semble avoir été le prochain de celui qui était tombé au milieu des brigands? C’est celui qui a exercé la miséricorde envers lui, répondit le docteur de la loi. Et Jésus lui dit: Va, et toi, fais de même. »
Mon prochain, c’est celui qui m’a aidé et aimé.
Mon prochain, c’est celui qui a pris soin de moi.
Mon prochain, c’est celui qui s’est fait proche dans la bienveillance.
Donc mon ennemi n’est pas mon prochain.
Dans le même sens, Jésus ne nous dit jamais qu’il faut aimer nos parents. Etrange non ? Il dit même qu’il faut les haïr ! choquant ! (Luc 14,26-27)
Il rappelle que selon les dix commandements il faut les honorer et selon la Genèse il faut les quitter pour pouvoir s’attacher à son conjoint.
Quitter, honorer, mais pas d’obligation à aimer. En tout cas pas d’obligation à les aimer pour la seule bonne raison qu’ils seraient nos parents. Oui, nous pouvons les aimer, mais c’est
– soit parce qu’ils ont été des prochains bénissants, des prochains très proches et essentiels,
– soit nous pouvons les aimer en tant qu’ennemis, s’ils ont été nuisibles pour nous.
Que cette Parole de Christ continue à nous déranger.
Comment se fait-il que les protestants n’osent plus dire qu’il y a un problème avec le célibat des prêtres ? [Elsa]
Bonjour Elsa, je ne sais pas sur quoi repose votre constat de mutisme des protestants sur le célibat des prêtres dans l’Eglise catholique, ni pourquoi ils se taisent, si c’est vraiment le cas, ni à quel problème vous pensez : la solitude affective et la souffrance qu’elle peut engendrer ? Un obstacle à la vocation de qui ne veut pas du célibat ?
Comme je ne dispose pas de sondage ou autres éléments statistiques pour vous répondre, faisons un pas de côté. Le célibat est imposé aux prêtres depuis le 11e siècle, cette mesure avait pour but à l’origine de les empêcher de s’enrichir au profit de leur descendance, et au détriment de leur paroisse. L’idée aussi était, face à certains abus, de leur permettre de se consacrer totalement à leur ministère. Mais ce qui était peut-être justifié dans un contexte précis ne l’est plus forcément aujourd’hui. L’Eglise doit toujours se réformer !
Ce célibat obligatoire pose un double problème du point de vue biblique :
Nous sommes tous prêtres (1 Pierre ch.2. v.5), en tant que membres de l’Eglise de Jésus-Christ, c’est à dire tous consacrés au service du Seigneur, avec les ministères divers auxquels nous sommes appelés, et en fonction des dons que nous avons reçus de l’Esprit Saint. Ce sacerdoce universel amène à refuser qu’il y ait deux catégories de chrétiens avec des conditions distinctes, les clercs et les laïcs.
L’autre problème est que le célibat, tout comme le mariage, est une vocation. Paul en parle au ch.7 de la 1ère lettre aux Corinthiens : il a choisi le célibat et le conseille pour se consacrer prioritairement à l’annonce de l’Evangile, mais précise que chacun a reçu un don particulier : pour vivre à deux ou vivre seul. (1 Co 7, v.7).
Pourquoi les chrétiens se chamaillent-ils autant ? [Reuben]
Se chamailler, c’est bien le propre des frères et des sœurs, le propre de ceux que tout rapproche, mais qui s’efforcent de souligner leurs différences !
C’est vrai, il arrive que les chrétiens se chamaillent, pour des broutilles du genre : « qui a la plus grande Eglise ? » ou « qui gardera l’entrée du Saint Sépulcre ? » ! Pauvres de nous …
Plus souvent, et depuis toujours, les chrétiens se disputent – un mot à entendre dans son sens originel : ils débattent – et ces discussions théologiques prennent vite un caractère très sérieux, parce qu’elles sont liées à la vérité de ce qu’ils croient. Elles les ont conduits et les conduisent encore à avancer des convictions, des affirmations de foi différentes, par exemple sur l’interprétation des Ecritures, la pratique et le sens des sacrements, la nature des ministères, etc … Certaines différences entraînent des séparations (des schismes), d’autres des distinctions sans pour autant diviser le corps du Christ.
On peut considérer à juste titre, comme vous semblez le faire, Reuben, que les débats et les divisions ont un caractère scandaleux et qu’elles blessent Dieu, puisqu’il n’y a qu’ « un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême » (Ephésiens 4, 5).
Le temps de l’unité n’est pas encore venu, pourtant elle progresse chaque jour. Un mouvement est en marche, qui contribue au rapprochement des chrétiens. Le dialogue œcuménique a permis de lever beaucoup de condamnations et de malentendus que l’histoire des Eglises avait accumulés. C’est la prière du Christ que nous essayons d’accomplir en son nom et avec son aide : « Qu’ils soient un, comme toi et moi nous sommes un ! » (Jean 17, 11).
Pourquoi Jésus oublie le « croissez et multipliez » ordonné aux humains à la base ? [Sam]
Il est vrai que lorsque Jésus aborde la question du mariage et du couple, par exemple en Marc ch.10, vv.6ss, il ne parle pas des enfants mais cite le ch.2 de la Genèse, qui donne comme sens et but à l’union de l’homme et de la femme de devenir « une seule chair », littéralement, comme un seul être. Par l’amour où chacun ne s’appartient plus, mais se donne à l’autre.
Je ne pense pas que Jésus oublie le mandat de fécondité donné par Dieu au ch.1 de la Genèse, que vous citez, Sam. Mais il répond à une question des pharisiens sur le divorce, qui, dans le Judaïsme, était toléré pour des motifs parfois très futiles. Jésus connaît le texte du Deutéronome permettant à l’homme de répudier sa femme, mais il insiste sur le fait que ce n’est pas le projet de Dieu, que c’est une concession à la dureté de nos coeurs, autrement dit à notre manque d’amour. Bref, ce n’est pas la question des enfants qui est au coeur de ce débat où Jésus est impliqué. Ce n’est pas le sujet.
Quant au mandat de « remplir la terre » que le Créateur a donné aux hommes, il peut être considéré comme bien rempli, puisque nous avons dépassé le cap des 8 milliards d’êtres humains sur terre ! Et même un couple qui n’a pas la joie de mettre des enfants au monde est un couple à part entière, dont l’amour peut engendrer d’autres fruits.
Comment puis-je être sûr d’être sauvé ? [Alain]
Sous un angle chrétien protestant, la réponse à cette question ne peut se trouver que du côté de la foi. Car la foi est la seule réalité de ce monde qui peut nous assurer du salut que Dieu offre en Jésus-Christ : « La foi, c’est la réalité de ce qu’on espère, l’assurance de choses qu’on ne voit pas » (Hébreux 11, 1). Le salut, précisément, nous est donné en espérance, et on ne le voit pas.
A ce sujet, le catéchisme de Heidelberg (1562) demande à sa question 21 : « Qu’est-ce qu’une vraie foi ? ». Je cite deux éléments de réponses qui peuvent nous éclairer, cher Alain : d’abord la foi est une connaissance de la vérité, une connaissance du Christ Sauveur qui ne se limite pas à une action de notre intelligence, mais qui est validée par l’adhésion de tout notre être. Autrement dit, elle est « confessée » explicitement.
Mais cette connaissance court le risque de se muer en orgueil ou en certitude mortifère, qui consisterait à se rendre maître du salut, à prétendre savoir qui est sauvé, et qui ne l’est pas. Pensons à la surprise des « bénis de mon Père » au ch. 25 de l’évangile de Matthieu : elle nous rappelle que seul Dieu est maître du salut, et que celui-ci ne vient que par pure grâce. Même un cœur limpide ne saurait s’en emparer !
C’est pourquoi (2ème élément de réponse) la seule assurance que nous avons vient de l’action du Saint Esprit en nous. Il nous conduit dans la repentance et nous ouvre au pardon divin. Ses dons et ses fruits témoignent de la présence de Dieu dans notre vie, et ce sont de bons indices pour nous, tout comme l’amour que nous mettons en pratique. Mais le premier des signes qui nous sont donnés du salut est sans doute celui d’un cœur reconnaissant de se savoir aimé et justifié par Dieu dans la personne de Jésus.
Comment expliquer simplement à mon fils ce qu’est la trinité ? [Boris]
Cher Boris, pour parler de la Trinité, que ce soit à des jeunes ou à des moins jeunes, je dirais que la simplicité a d’abord besoin d’humilité. Nous parlons de Dieu, dont nous n’aurons jamais fini de découvrir « la profondeur de la richesse, de la sagesse et de la connaissance » (Romains 11, 33). Et nous restons dans l’attente de ce jour où nous connaîtrons Dieu comme nous sommes connus de Lui ! (1Corinthiens 13, 12)
Parler de la Trinité revient à considérer un seul Dieu mais en trois « personnes » différentes. Si Dieu était une donnée mathématique, on écrirait donc l’équation suivante : 1+1+1 = 1. D’ailleurs, comme les mathématiques, la Trinité relève d’une certaine abstraction. C’est une idée, un concept.
Cette idée traduit cependant fidèlement la manière dont Dieu se révèle dans l’Ecriture. Elle témoigne de l’histoire du salut qui se déploie dans les textes. La clé de cette révélation est le Christ, le Fils qui révèle Dieu comme Père (Jean 14, 9) et qui annonce l’envoi de l’Esprit Saint aux apôtres (Actes 1, 8).
Le point essentiel, qui a été souvent débattu et combattu, est de considérer chacune des trois personnes comme étant pleinement Dieu : Dieu le Père, Dieu le Fils, Dieu le Saint Esprit, et de ne diminuer l’importance d’aucune des trois : ne pas réduire le Père à une idée, le Fils à un homme (seulement), et l’Esprit à n’importe quelle inspiration.
L’équation de La Trinité, loin d’obéir à une stricte logique, nous fait connaître Dieu comme le « Vivant ». Elle nous montre la vie divine, à travers les relations entre le Père, le Fils, et l’Esprit. Le baptême de Jésus en est peut-être le témoignage le plus parlant (Marc 1, 9-11). Cette vie est une communion, elle se réalise dans l’amour de ces trois personnes, avec en son centre le mystère de la croix. Dans ce sens, elle est un modèle pour nos propres relations. Et c’est aussi une richesse pour nous de pouvoir nous adresser plus spécialement à l’une ou l’autre dans notre prière.
Qui est Azazel dans le livre du Lévitique ? Est-ce un ange déchu ou une figure métaphorique ? [Auguste]
Azazel n’apparaît que dans le livre du Lévitique 16, 8-25, sans que l’on ait d’informations précises sur son identité. Il y a, en gros deux interprétation principales de ce nom :
-c’est un démon à part entière, ce que confirment des textes écrits un ou deux siècles avant notre ère (livre d’Hénoch, ou l’Apocalypse d’Abraham) qui finissent par l’identifier carrément à Satan.
-le mot Azazel désigne l’acte même de l’envoi du bouc dans le désert. C’est le bouc « pour éloigner » le péché. C’est comme ça que l’ont compris la traduction grecque de la Bible, et la traduction latine, qui parle d’un « bouc émissaire ».
Tout ça pour dire que je crois qu’il faut rester très prudent par rapport à ce que l’on peut dire des démons, mais aussi des anges, sur la base du texte biblique. L’origines des noms, les rôles et la hiérarchie des ces puissances ne sont pas décrites de façon exhaustive dans la Bible. Par contre, nous comprenons clairement que Jésus est venu pour assumer pour nous le rôle de ce bouc émissaire, car c’est lui qui porte les péchés du monde, ceux de chacun de nous encore aujourd’hui, si nous mettons notre foi en lui.
Y-a-t-il au moins une famille équilibrée dans la Bible ? [Ida]
C’est vrai. On pense aux frères ennemis Caïn et Abel (Genèse 4), à la rivalité de Jacob et d’Esaü largement orchestrée par leur mère, Rebecca (Genèse 27), où même à l’esprit de famille contesté par Jésus : la question est légitime !
Fondamentalement, on peut même se demander si famille doit rimer avec équilibre, puisqu’une vie de famille, c’est un changement perpétuel.
D’ailleurs dans la Bible les familles se présentent d’abord comme des histoires racontées. Dans ce sens, elles ne sont pas des modèles, mais le terreau naturel, humain pour l’annonce de l’amour de Dieu et de sa parole de salut. La famille relève d’un donné, du « créé ». Elle se révèle donc ambivalente.
La Torah s’intéresse quand même de près aux relations familiales. Elle prononce des interdits sexuels (Lévitique 20), des recommandations cultuelles familiales, comme le Sabbat. L’exemple le plus remarquable est le 5ème commandement : « Honore ton père et ta mère » (Exode 20, 12). Ces règles énoncent des équilibres essentiels.
Dans le Nouveau Testament, la famille apparaît surtout comme le lieu où la foi est vécue et transmise. Parfois cela bouscule, voire bouleverse les relations. Nous avons quand même au moins deux exemples positifs : la famille de Jésus, malgré les propos sévères de celui-ci sur sa « mère » et ses « frères », l’a suivi dans le discipulat, et a fait partie de la première Eglise ; et Timothée, qui a reçu la foi en famille, de sa grand-mère et de sa mère (2Timothée 1, 5). Quant à Paul, il s’est efforcé dans ses lettres de promouvoir des relations les plus équilibrées possibles dans les familles des chrétiens (1Corinthiens 7), pour que Dieu y soit honoré malgré la complexité des situations. Un défi qui reste d’actualité pour nous !