Quelle est la différence entre la vision de Calvin et Zwingli sur la Sainte Cène ? Sur cette question les attestants sont de quel bord ? [Kny]

Merci Kny de nous inviter à revoir nos classiques ! En effet, la question de la Cène a été centrale au 16e siècle, non seulement entre catholiques et protestants, mais au sein même de la Réforme. Luther confessait la présence réelle du Christ au moment où les paroles de Jésus sont rappelées (lors d’un débat avec Zwingli, il aurait commencé par écrire sur la table, dans la version latine : « ceci est mon corps ». Bonjour l’ambiance !). Pour Zwingli, Christ est au ciel depuis son ascension, il n’est plus sur la terre, donc le pain et la coupe sont des symboles, un mémorial. Il faut donc comprendre: « ceci représente mon corps ». Calvin, auteur d’un Petit Traité sur la Sainte-Cène, aurait peut-être pu réconcilier les deux positions. Pour résumer la sienne : « ceci présente mon corps ». Ce n’est que du pain, ce n’est que du vin, mais avec ces signes, et par l’Esprit Saint, le Seigneur nous atteste que nous avons réellement communication à son corps, son sang, en un mot à sa vie.
Jésus lui-même n’aurait -peut-être- pas compris grand chose aux débats philosophiques concernant la « substance » véritable des éléments de la Cène. Quand Jésus déclare « ceci est mon corps », ceci renvoie d’abord à la fraction du pain, plus qu’au pain lui-même (c’est à ce geste de la fraction du pain que les disciples d’Emmaüs l’ont reconnu, Luc 24,35). Puisqu’il ajoute « faites ceci en mémoire de moi. Il nous dit : mon corps, ma vie, c’est cela : un don partagé, offert pour vous, pour la multitude.
Quant à vous dire de quel bord sont les Attestants sur cette question… je n’en sais rien ! Peut-être de bords divers. L’essentiel est que nous discernions que le Seigneur est présent lorsqu’il nous invite à sa table, et qu’il a donné son corps et son sang pour nous.

Comment les protestants comprennent-ils la crucifixion ? S’agit-il d’une expiation substitutive pénale ou d’un autre modèle théorique comme celui d’Abélard ? [René]

La grande majorité des protestants, à la suite de Martin Luther et Jean Calvin, comprennent la crucifixion de la même manière que l’ensemble des chrétiens : selon l’enseignement des écritures bibliques.

La mort de Jésus est la volonté de Dieu : « Cet homme [Jésus] vous a été livré conformément à la décision que Dieu avait prise et au plan qu’il avait formé d’avance ». (Ac 2.23). Et Jésus a obéi à la volonté du Père : « [Jésus] s’est abaissé lui-même en devenant obéissant jusqu’à la mort » Phi 2.8.

En effet, le sens de la crucifixion de Jésus s’exprime dans la Bible avec un langage judiciaire et sacrificiel (les deux vont de pair) : « Le Fils de l’homme est venu non pour être servi, mais pour servir et donner sa vie en rançon pour la multitude. » (Mt 20.28), « Jésus a été livré pour nos fautes » (Rom 4.25), « vous avez été rachetés à grand prix » (1 Co 6.20), « Il a subi notre punition, et nous sommes acquittés […] le Seigneur lui a fait subir les conséquences de nos fautes à tous » (53.5-6)

En résumé, la punition que nous méritons pour nos péchés a été prise par Jésus. Ainsi nous sommes réconciliés avec Dieu (Rom 5.10). C’est par amour pour nous que le Père a donné son fils, c’est ainsi que le mot « grâce » prend tout son sens ! Par la croix, Dieu nous offre le pardon gratuitement. Quel amour merveilleux ! « L’amour consiste en ceci : ce n’est pas nous qui avons aimé Dieu, mais c’est lui qui nous a aimés ; il a envoyé son Fils qui s’est offert en sacrifice pour le pardon de nos péchés. » (1 Jn 4.1)

Il y a dans le protestantisme, une minorité de personnes qui, comme Abélard au XIIe siècle, n’acceptent pas cet enseignement pour des raisons morales. Même pour les disciples de Jésus, l’idée n’était pas facile à accepter, Pierre a refusé l’idée que Jésus aille jusqu’à la croix, et Jésus lui a répondu par cette mise en garde : « Tes pensées ne sont pas celles de Dieu mais celles des hommes ». (Mt 16.23)

Comme l’enseigne Paul, l’idée la croix est pour beaucoup une folie (1 Co 1.17-25), mais pour ceux qui l’acceptent, la croix se révèle être « sagesse et puissance de Dieu ».

Est-il encore utile d’étudier les premiers réformateurs- comme Luther- Calvin et Castellion ? J’étudie le « Commentaire sur les Galates » de Luther et il est magnifique- mais n’est-il pas obsolète ? [Ernie]

Je crois que les écrits des Réformateurs, comme ceux des pères de l’Église, sont une ressource inestimable de trésors spirituels qui m’aident à mieux comprendre le texte biblique et ses implications dans la vie. Bien sûr, tous ces auteurs sont datés, ils sont de leur temps et tout ce qu’ils ont écrits n’est plus aussi pertinent aujourd’hui qu’à leur époque. Je ne considère pas les écrits de Luther, Calvin Augustin ou autres de la même manière que je considère la Bible, par laquelle Dieu a choisi de parler aux hommes sous l’action de l’Esprit Saint. Mais, comme vous, je trouve certains textes des Réformateurs magnifiques, et en cela, je crois qu’il peuvent m’aider à approfondir ma foi pour ma situation aujourd’hui. Il ne s’agit pas de chercher à revenir au temps de la Réforme. Ce serait même contraire au projet des Réformateurs !