Que choisir entre la guerre juste (Calvin et Bèze) ou les pacifistes (Trocmé- Lasserre- Brousson- Schweitzer) ? Le NT est-il ambigu ? [David]

Je crois que c’est surtout notre vie, marquée par le péché, qui est ambiguë. Dieu, en Jésus-Christ, est venue mettre la clarté de son esprit dans nos ambiguïtés. Cela étant dit, je crois qu’à la lumière du Nouveau Testament, nous pouvons dire qu’il n’y a pas de guerre juste. Il n’y a aucune « bonne raison » de tuer quelqu’un, même dans la guerre. Un général s’est d’ailleurs récemment exprimé sur la question : https://www.youtube.com/watch?v=sOZTgyiD-Zg

Une fois que l’on a dit cela, il faut aussi se rappeler que Dieu est venu jusqu’à nous en Jésus-Christ à cause de la dureté de notre cœur (Matthieu 19.8). Il ne justifie aucune des choses que cette dureté nous amène à commettre, mais il fait avec pour le tourner en bien, si nous ouvrons notre cœur à son action. Mais il ne me paraît pas possible de raisonner trop dans l’abstrait face à des questions aussi difficiles.

Comment on accompagne quelqu’un qui parle toujours à une personne morte et qui ne peut pas entendre que c’est un choix de mort ? [Léa]

Vous avez certainement partagé vos convictions avec cette personne et vous lui avez certainement donné des arguments bibliques. Elle ne les entend pas. Vous avez fait votre part et c’est maintenant le moment de constater que Dieu seul, par son Esprit, peut ouvrir les cœurs. Persévérez dans la prière et tenez-vous prête à échanger de nouveau avec cette personne si l’occasion se présentait. Croyez-moi, les ressources de Dieu sont immenses !

Le péché- parvenu à son plein développement- a pour fruit la mort (Jacques 1:15). Les gens meurent du fait du péché ? [Lucia]

Partons d’un verset plus explicite. Romains 5/12 dit cela : « Le péché est entré dans le monde à cause d’un seul homme, Adam, et le péché a amené la mort. ».
Nous voilà donc ramenés à l’histoire du premier couple humain, Adam et Eve. Dans les chapitres 2 et 3 de la Genèse, nous apprenons qu’ils vivent heureux et à jamais dans le jardin d’Eden, recevant de Dieu ce dont ils ont besoin dans une relation parfaite. Malheureusement, trompé par le serpent, l’humain se met à penser que ce que Dieu lui donne n’est pas suffisant. Il veut plus. Il veut être comme un dieu. Il mange alors du fruit du seul arbre que Dieu lui avait interdit. Il dit ainsi à Dieu qu’il préfère mener sa propre vie, indépendamment de lui. Ainsi est entré le péché dans le monde, et avec lui, la mort (Genèse 2/15-17, 3/4,3/19, 3/22).
Depuis, il y a quelque chose qui nous conduit à vouloir faire notre vie sans Dieu en nous prenant nous-mêmes pour des dieux, chacun poursuivant ce qu’il pense bon ou mauvais, avec toutes les conséquences négatives que nous connaissons bien. Nous sommes pécheurs. Et comme toutes ces choses que nous poursuivons en dehors de Dieu ne font pas vivre, coupés de la source de la vraie vie, de Dieu, nous mourrons. Là est la condition de tous les humains depuis Adam.
Mais l’histoire ne s’arrête pas là. Car Jésus-Christ est venu nous réconcilier avec le Père. En lui, la vie éternelle nous est rendue.
« Car le salaire du péché, c’est la mort; mais le don gratuit de Dieu, c’est la vie éternelle en Jésus-Christ notre Seigneur ». Romains 6/23

Est-ce un péché de vouloir être célèbre ? [Daniel]

Le livre de la Genèse nous parle d’hommes qui ont voulu devenir célèbres, les hommes de Babel (Genèse ch.11,1 à 9). Ils voulaient laisser une trace indélébile dans l’histoire et la mémoire, éviter d’être dispersés, inconnus à tout jamais, disparus en quelque sorte. Par un projet grandiose, une tour qui toucherait le ciel, ils voulaient littéralement « se faire un nom ». Vouloir être célèbre, c’est tenter d’exister en forçant l’admiration des autres.

Dans la Bible, le nom c’est la personne elle-même. Vouloir se faire un nom, c’est donc vouloir se forger et se donner sa propre identité. En quelque sorte se faire l’artisan de sa propre vie, et refuser de la recevoir de l’Autre. N’est-ce pas cela, le péché, un refus de Dieu ? Si le projet de Babel réussissait, tous les hommes se fondraient dans une même culture, une même langue, un même moule… projet totalitaire qui transformerait l’humanité en une fourmilière d’êtres anonymes. Ce succès serait donc finalement un échec !

La réponse de Dieu à la tentative humaine de Babel, c’est l’appel d’Abram, à qui Dieu promet : « je rendrai ton nom grand » (= je te rendrai célèbre, Genèse 12,2). En obéissant à la voix de Dieu, Abram est devenu Abraham, père d’une multitude. En laissant Dieu nous conduire, par la foi, nous trouverons notre vraie place, une place unique, puisque chacun d’entre nous est connu et aimé personnellement du Seigneur, quels que soient ses talents, ses capacités et ses oeuvres. Et alors, nous n’aurons plus rien à prouver…

Est-ce que la mort ça fait mal ? [Angélique]

Tout dépend du mal dont vous parlez ! En mourant on cesse de souffrir dans son corps puisqu’il redevient poussière. Déjà un philosophe de l’antiquité, Lucrèce, rappelait que notre corps n’est qu’un agrégat d’atomes que la mort disloque, et qu’un cadavre ne peut plus rien éprouver.

Mais la mort nous fait mal en nous séparant des êtres que nous aimons, qu’il s’agisse de notre propre trépas ou du leur. La mort fait mal, elle est un mal en ce sens qu’elle n’est pas le projet de Dieu pour sa création. En effet, selon la Genèse, l’être humain n’a été créé ni mortel ni immortel en soi, mais appelé à vivre par le souffle du Dieu vivant. La mort est notre ennemie. Je conteste ce texte parfois lu aux enterrements : « la mort n’est rien, je suis seulement passé dans la pièce à côté »… C’est un mensonge. La mort, ce n’est pas rien ! Le Christ a confié à ses proches sa tristesse à l’idée de devoir mourir, il a pleuré sur la tombe de son ami Lazare.

Face à ce mal qui nous menace tous, la seule espérance ne consiste pas à l’atténuer, à le relativiser, mais à le savoir vaincu par la résurrection de Jésus-Christ, gage et promesse de la nôtre. La mort n’a pas le dernier mot.

Si les prières restent parfois sans réponse même lorsque nous demandons de bonnes choses au nom du Christ- quelle assurance avons-nous que Dieu pardonne nos péchés lorsque nous le lui demandons ? [Jacques]

Cette assurance s’appelle Jésus-Christ. Il est venu, il a enseigné, il est mort et ressuscité pour assurer de la miséricorde et du pardon de Dieu à celles et ceux qui mettent leur foi en Lui. Il n’est pas venu pour répondre à toutes nos prières, quand bien même elles sont les mieux intentionnées. Pour citer un moine du mont Athos : « Si Dieu ne nous aimait pas, il exaucerait toutes nos prières ».

Mon père vient de mourir. Beaucoup de chrétiens sincères priaient pour lui. Comment pouvons-nous comprendre Matt 18:19 quand il y a échec ? [DL] ?

La question que vous posez est particulièrement délicate, car des situations comme celles que vous décrivez peuvent être de nature à mettre en cause notre foi. Je partagerai donc avec vous simplement ma lecture personnelle du passage biblique que vous citez. Depuis le verset 15 du chapitre 18 de l’évangile de Matthieu, Jésus parle de la réconciliation en cas de conflit. Cela me paraît essentiel à rappeler, car le verset que vous citez est souvent sorti de son contexte, ce qui ne permet pas de l’entendre pour ce qu’il dit. On en parle pour s’encourager quand on n’est pas nombreux lors d’un culte, ou pour affirmer que Dieu exécutera forcément ce que des personnes se mettent juste d’accord pour Lui demander. Cette question du pardon et de la réconciliation est pourtant essentielle dans la vie spirituelle : « Si vous pardonnez aux hommes leurs fautes, votre Père céleste vous pardonnera aussi ; mais si vous ne pardonnez pas aux hommes, votre Père ne vous pardonnera pas non plus vos fautes. » (Matthieu 6. 14-15). Je ne veux bien sûr pas dire que la prière que vous avez adressée n’a pas été exaucée parce que vous auriez des conflits que vous n’avez pas réglé (je n’en sais rien en fait), mais que l’expérience difficile que vous avez traversé ne vient pas remettre en cause cette parole du Christ.

On m’a enseigné que bénir c’est « dire le bien ». Donc maudire c’est dire du mal ? [Ludo]

L’étymologie même de bénir, c’est « dire le bien » : bénédiction vient de bene (bien) et dicere (dire).
Maintenant vue la difficulté de comprendre ce qui est vraiment bien et ce qui est vraiment mal dans pas mal de situations, parfois c’est compliqué de trancher en mode tout-blanc-tout-noir.

Le livre de la Genèse nous raconte en son troisième chapitre que l’humain a voulu manger du fruit de l’arbre qui « permet de connaître ce qui est bien et ce qui est mal ». C’était le nom de cet arbre.
Ce désir de maîtriser le bien et le mal a été stimulé par le serpent, figure diabolique, afin d’éloigner l’humain de Dieu. La Genèse nous exprime donc que la recherche obsessionnelle de ce qui est bien et mal est la condition de l’humain sans Dieu, l’humain qui s’est éloigné de Dieu, qui a voulu être intelligent avec le serpent plutôt que vigilant avec Dieu.

Maudire, c’est donc « dire du mal », mais plus précisément encore, c’est « mal dire ». Cela signifie que l’on dit les choses autrement que comme Dieu (seul capable de dire les choses de façon parfaitement juste). C’est donc plus fin que juste prononcer des paroles mauvaises, ça concerne aussi les paroles imprécises, ambiguës, ambivalentes, approximatives, au sens où elle ne sont pas ajustées avec la parole qui sort de la bouche de Dieu.

Pourquoi certains chrétiens ne regardent que les questions morales dans leur choix pré-électoral ? [Caro]

Effectivement, une partie des électeurs chrétiens accordent beaucoup d’importance à des critères comportementaux, moraux ou éthiques pour choisir pour qui ils voteront. Et les candidats le savent bien : se positionner contre l’avortement, contre le mariage gay, contre la polygamie de certains, a un fort potentiel de séduction à l’égard de certains chrétiens, qui font de ces sujets des enjeux premiers.

C’est assez étonnant quand le ministère de Jésus proposait une toute autre posture, aider une femme (en Jean 8) à sortir de sa logique d’adultère plutôt que de la condamner, contribuer à réintégrer des exclus (en Luc 17) plutôt que de les stigmatiser, choisir le pardon plutôt que la condamnation (Jean 3,16-17).

Ce sont sur d’autres sujets éthiques que Jésus s’est fortement positionné. A la suite du Premier Testament, il plaçait la question de l’équité et de la justice au tout premier plan, à la fois côté politique, mais aussi en matière de justice économique. Sa préoccupation pour la liberté, la justice des jugements rendus, ou le soin aux plus petits était bien plus forte que ses préoccupations strictement morales.

Bref pour Jésus, la justice, le droit des plus faibles et l’équité économique étaient des sujets plus essentiels pour faire des choix que les questions comportementales ou de morale personnelle.

Dieu a-t-il envoyé son Fils en connaissance du fait qu’il allait être crucifié ? Autrement dit Jésus était-il prédestiné à la croix ? [Jed]

Cher Jed, merci pour cette question très importante. Je vous propose de relire ce petit passage de la lettre aux Colossiens, 1. 15-20, dans lequel je glisse quelques commentaires :

« Le Fils (Jésus-Christ, donc) est l’image du Dieu invisible, le premier-né de toute la création. 16 En effet, c’est en lui que tout a été créé dans le ciel et sur la terre, le visible et l’invisible, trônes, souverainetés, dominations, autorités. Tout a été créé par lui et pour lui. (Donc le Fils, comme le Père et ‘Esprit Saint, existent de toute éternité) 17 Il existe avant toutes choses et tout subsiste en lui. 18 Il est la tête du corps qu’est l’Église; il est le commencement, le premier-né d’entre les morts, afin d’être en tout le premier. 19 En effet, Dieu (le Père) a voulu que toute sa plénitude habite en lui. 20 Il a voulu par Christ tout réconcilier avec lui-même, aussi bien ce qui est sur la terre que ce qui est dans le ciel, en faisant la paix à travers lui, par son sang versé sur la croix. »

Cette dernière phrase, en tenant compte de ce qui est écrit précédemment, me semble clairement dire que le Fils était prédestiné à la croix. Cette prédestination n’a rien d’arbitraire, c’est par amour que le monde a été créé et par amour que le salut offert en Jésus-Christ devait passer par la croix pour se réaliser.