Quand on est artiste et chrétien, est-ce qu’on est forcément un « artiste chrétien » ? [Agathe]

Beaucoup d’artistes qui sont aussi chrétiens rechignent à se faire étiqueter comme « artiste chrétien », car ils craignent — souvent à juste titre — que cette appellation soit d’une part négative auprès d’un public non chrétien, mais aussi d’autre part qu’elle les contraigne à ne produire que des œuvres explicitement confessantes, ou édifiantes et pieuses

Nous l’avons bien vu avec l’artiste Lauren Daigle et toutes les polémiques auxquelles elle a fait face, alors qu’elle se voulait être un témoin sincère du Christ dans le monde. Sans se voir imposer des styles et des registres.
Est-ce qu’un chrétien qui est médecin doit absolument se définir comme « médecin chrétien », un boucher comme « boucher chrétien » ?
Tous essayent de témoigner, à leur façon.

Enfin, si l’Eglise veut que tous les artistes se soumettent et que leur art ne soit qu’un ministère, elle va souvent laisser le monde artistique comme une friche trop dangereuse pour les chrétiens, un lieu où elle n’envoie personne en mission. C’est alors qu’elle renoncera à témoigner, en la condamnant à devenir ou rester un terrain de jeu à l’Ennemi du Christ…

Ne parle du Christ qu’à ceux qui t’interrogent.
Mais vis de telle façon qu’on t’interroge !
disait François de Sales

La Saint-Valentin, plutôt oui, ou plutôt non ? [Charlotte]

A la base les protestants sont peu enclins à fêter une fête de Saint Quelquechose. Parce que leur calendrier est marqué par les fêtes qui ont Christ pour centre (à part la fête de la Réformation chez les protestants historiques, qui est assez surprenante de ce point de vue).

Qui plus est, l’attribution d’un jour ou d’une semaine à une célébration particulière peut être à double tranchant :
– la Journée des droits des femmes devient vite la Journée de la femme (par distingo avec les 364 journées de l’homme ?)
– la Semaine de prière pour l’unité des chrétiens devient vite la Semaine de l’unité (par décalage avec les 51 semaines de la division ?)

La fête des amoureux est-elle appelée à créer un différentiel avec les 364 journées de la pesanteur conjugale ?

On ne s’y trompera pas, toutes ces occasions festives qui se répandent au-delà de leur origine (comme Noël fêté par plein de musulman), est surtout une superbe célébration en l’honneur de Mammon, le dieu de l’Argent et du Commerce.

Alors nous vous proposons d’avoir une attention délicate au quotidien pour votre vis-à-vis, plutôt que d’attendre les injonctions des bijoutiers, des restaurateurs ou des fleuristes… de la même façon que la résurrection de Christ vous fait vivre au jour le jour, et pas seulement le dimanche de Pâques.

Doit-on prier pour les nations ? [Cathy]

Certains courants chrétiens prônent de « prier pour les nations ». Mais souvent cette théologie se fonde une erreur théologique due au passage du texte biblique de l’hébreu > grec > français.
Les « nations » en hébreu, ce sont les peuples non-Juifs, les goyim. Quand Dieu bénit les « nations », c’est qu’il bénit les non-Juifs maintenant de la même façon qu’il avait béni les Juifs.

Le mot nation, depuis le 16ème siècle est devenu un référentiel politique : les entités nationales, les Etats nationaux.
Quand nous prions pour Israël, ce n’est pas l’Israël politique refondé en 1948, c’est bien pour le peuple d’Israël, répandu parmi les nations.
Quant à prier pour « La France », c’est un peu étonnant. La France est multiforme, elle a tellement évolué au travers des siècles. La France, c’est avant tout des gens, surtout à l’heure de l’hypermondialisation. Connaissez-vous beaucoup de gens dans la paroisse dont les huit arrière-grands-parents étaient « des vrais français » ?
Bref, cette vision « post-Yalta » (la conférence qui a découpé le monde après la guerre) est une conception théologique tordue, parce qu’elle est un anachronisme : on y prend un mot qui n’avait pas le même sens qu’à l’époque. C’est comme quand Aristote parle de la « Science », il ne parle pas du tout des scientifiques, des labos, des ordis, de la méthode scientifique fondée par des Pascal ou Descartes.

Prions pour les personnes, pour les groupes de personnes.

Est-ce que l’Arche de Noé est le premier confinement de l’Histoire ? [Henry]

C’est exactement ça. Un danger, la mort qui rôde, une solution inspirée, un déploiement humain, beaucoup de pertes humaines, la question du rôle des animaux, la compréhension de la durée, et surtout… la quarantaine !

Quarante jours et quarante nuits de pluie, mais si vous lisez bien le texte biblique dans la Genèse, vous verrez que ça dure bien plus longtemps que les 6 semaines de rigueur. Ce n’est pas parce qu’il ne pleut plus que tout est réglé, il faudra aussi attendre que le niveau de l’eau redescende avant de pouvoir accoster à une rive ferme et de regagner le plancher des vaches.

Ce que j’en retient, c’est surtout l’issue, la possibilité d’un nouveau démarrage. Des choses ont changé (on peut manger de la viande), mais l’humanité peut essayer d’enclencher une autre démarche que la spirale orgueilleuse du péché qui l’avait conduite à la catastrophe.

Il faudra inventer autre chose.

En bref, c’est quoi les différences entre catholiques et protestants ? [Sidney]

Points communs catholiques / protestants
– D’abord, c’est la mêmê religion, chrétienne. C’est pour cela qu’on ne doit pas dire la religion catholique ou la religion protestante mais bien la religion chrétienne et la confession catholique ou la confession protestante (comme on peut le faire par ailleurs pour différencier sunnites et chiites dans l’Islam).
– Catholiques et protestants croient en un Dieu unique, présent en trois personnes (on dirait plutôt “personalités” aujourd’hui sûrement) appelées le Père (Dieu en tant que Créateur, le même Dieu que les Juifs), le Fils (Dieu en tant que Sauveur, qui s’est présenté à nous comme le Christ, Jésus), et le Saint-Esprit (le Souffle de Dieu). Ce ne sont pas trois “Dieu” mais bien un seul, un peu comme chacun peut être appelé par son prénom, ou bien par un titre, ou bien par son nom de famille.
– Catholiques et protestants croient que Jésus est au centre de l’Histoire et qu’il a contenu en lui-même l’humanité véritable, qu’il a été l’image de Dieu, qu’il a été crucifié, qu’il est mort, mais que Dieu l’a ramené à la vie (on appelle ça la résurrection).

Points différents catholiques / protestants
– Les protestants mettent l’accent sur le fait qu’on ne doit adorer que Dieu (qui est Père, Fils et Saint-Esprit). Prier une personne humaine est interdit (Marie ou les saints), car c’est convoquer l’esprit des morts. De la même façon on ne prie pas pour un mort puisque c’est Dieu qui s’en occupe. Les catholiques acceptent ces pratiques en revanche.
– Si catholiques et protestants partagent dans leurs offices ce qu’on appelle l’eucharistie, ou la Sainte-Cène, ou la communion, les protestants pensent que ce repas, pris en mémoire du dernier repas de Jésus, n’est pas une répétition du repas initial, mais seulement un souvenir. Les catholiques croient – pour simplifier – que l’eucharistie est un sacrifice, pas les protestants.
– Les catholiques insistent beaucoup sur le fait que l’Eglise soit une institution visible. C’est pour cela qu’ils se dotent d’une organisation facile à comprendre avec le pape tout en haut, les évêques, les prêtres et le peuple enfin. Pour les protestants, tout le monde est égal. Les institutions ne peuvent pas reposer sur les épaules d’une seule personne. Ainsi il n’y a pas de pape, souvent pas d’évêques, et les pasteurs n’ont pas de privilèges très particuliers pour la foi. Ces derniers sont seulement mieux instruits des choses de leur religion.

Pourquoi les fêtes reviennent tous les ans de façon répétitive ? [Andrée]

L’Eglise a inventé un temps chrétien cyclique : l’année liturgique
La définition des fêtes est très liée aux cycles de la nature. L’année liturgique, c’est l’irruption de l’histoire dans la nature. Les fêtes chrétiennes doivent être lues à partir des fêtes du judaïsme ancien, dont le christianisme a repris certaines dates ou en tout cas l’articulation. Il en va de même pour certaines fêtes vis-à-vis du paganisme (païens, romains ou grecs). C’est un peu paradoxal d’avoir remis en place des temps liturgiques qui reviennent chaque année parce que le christianisme s’accommoderait normalement d’un temps linéaire (d’un début à une fin, avec un déroulement historique, qui est l’histoire du salut, de la venue de Dieu au monde), plutôt que d’un temps cyclique (l’éternel recommencement est plutôt une idée du paganisme). Les fêtes chrétiennes sont là avant tout pour remettre au centre l’aspect festif et communautaire de la foi.

Le dimanche
S’agit-il du sabbat (7ème jour ; mais, c’est le samedi…) ou 1er jour de la semaine ? Pour un chrétien, chaque dimanche est une Pâques, chaque dimanche impose le mémorial de la résurrection de Jésus, événement fondateur de notre foi, quand le sabbat était mémorial de la création du monde (repos de Dieu) ou de la libération d’Egypte (un esclave ne se repose pas…).

Le cycle de Pâques
Pâques est supérieur à Noël, même si les gens attachent beaucoup d’importance à Noël. Une année liturgique où l’on sauterait Noël ne serait pas trop grave ; manquer Pâques ferait perdre tout son sens à cette année. A la Réforme, Calvin a essayé de recentrer la vie liturgique sur Pâques, coeur de la foi chrétienne comme la Pâque était le coeur de la foi juive. Il y a continuité avec le judaïsme (la fête capitale est souvenir d’un événement fondateur dans l’histoire du salut) et il y a en même temps radicale nouveauté (de Moïse à Jésus). Coïncidence avec la nature, Pâques se trouve au moment où le jour commence à gagner sur la nuit (équinoxe de printemps) pour dire la victoire de la lumière sur la ténèbre. Le cycle de Pâques commémore le temps de la Passion (partage du pain et de la coupe, la croix et la résurrection au centre de la foi). La date de Pâques est variable, basée sur le calendrier lunaire et non sur le calendrier solaire. Carême (la préparation), Rameaux (l’entrée à Jérusalem), Jeudi-saint (le partage du dernier repas), Vendredi-saint (la crucifixion et la mort), Pâques (la résurrection), Ascension (la montée au ciel), Pentecôte (le don de l’Esprit saint).

Le cycle de Noël
Noël repose sur une conviction et non un anniversaire, car on est sûr que Jésus n’est pas né un 25 décembre. La fête de Noël est la reprise d’une fête païenne (la fête de Mithra, la fête de la lumière et du soleil), et elle arrive assez tard (plus de 100 ans après Jésus). La coïncidence avec la nature est vraie là encore, c’est le moment où le jour est le plus court et la nuit la plus longue mais où le jour va pouvoir commencer à croître, jusqu’à Pâques, et jusqu’à l’été. Noël célèbre l’incarnation de Dieu, qui quitte les sphères céleste pour habiter parmi nous, et son abaissement (il ne naît pas dans un palais mais dans une mangeoire). Le cycle de Noël est un mélange d’humilité et de gloire, comme Pâques l’est avec la croix et la résurrection). L’Avent nous prépare à Noël. Dans l’Eglise d’Orient, on articule plus fortement que chez nous Noël et l’épiphanie (qui est soit la venue des rois-mages, soit le mémorial du baptême de Jésus, moment de sa “nouvelle naissance”).

La Réformation
C’est la seule fête non-chrétienne en ce sens qu’elle ne fait pas référence directement à un événement de la vie de Jésus, mais à l’événement de la Réforme, et plus particulièrement l’affichage des 95 thèses de Luther. Les protestants historiques la fêtent le dernier week-end d’octobre.

Pourquoi certains protestants baptisent les bébés ? [John]

Les Eglises historiques de la Réforme sont ouvertes au baptême des bébés. Mais il y a de plus en plus de gens qui pratiquent la présentation.

L’idée est que les réformés, majoritairement, accentuent plus sur l’aspect de la grâce que sur l’aspect de la repentance. Ils justifient cela de la façon suivante :
– le baptême est le signe visible d’une grâce invisible. Être conscient pour y répondre n’est pas le critère ultime, puisque de toute façon la grâce de Dieu nous dépasse, nous précède et ne peut pas être “réalisée” même par quelqu’un de conscient et d’adulte ;
– le baptême de Jésus est autre que celui du baptême de Jean-Baptiste. Ce dernier ne prêchait que la repentance, accentuant sur une “baptême de mort du vieil homme, du péché” plus que comme un “baptême de naissance nouvelle”, comme l’a fait Jésus ;
– il y a trois histoires qui disent que des gens ont été baptisés avec toute leur famille (Ac 16:15 – Ac 18:8 – 1Co 1:16) ce qui sous-entend que tout le monde y passait à partir du moment où le chef de famille le décidait.

Outre les raisons classiques des baptistes et évangéliques, voilà comment je milite ou plutôt j’exprime le fait de ne pas souhaiter baptiser de bébés dans la mesure du possible : je pense qu’on peut comprendre que dans une société qui se croyait (!) entièrement chrétienne, le baptême avait une fonction d’état-civil. Depuis 1787 puis sous Napoléon il y a un Etat-civil. Depuis 1945 on est sorti de ce qu’on appelle la “chrétienté”, c’est-à-dire d’une société qui se comprend comme entièrement (ou presque) chrétienne. Si on est sorti de ça, ça implique qu’il n’y a plus de transmission linéaire de génération en génération, qu’on ne peut même plus défendre l’idée qu’on est chrétien parce que nos parents le sont. Ce qui fait qu’on revient à la situation du Christ : on est chrétien par adhésion. Et c’est plus facile à prêcher aujourd’hui qu’au XIXème siècle.

La présentation chez les réformés n’est pas une “présentation au Seigneur” car ce serait une confusion avec un rituel Juif (qu’a vécu Jésus à l’âge de huit jours) qui avait pour fonction de racheter les premiers-nés et de circoncire les garçons. Donc on ne substitue pas un rite qui évoque la circoncision pour se substituer au baptême des bébés, ça serait pire encore, un retour en arrière qui ferait frémir l’apôtre Paul !!! C’est une “présentation à la communauté”, où il est dit que l’Eglise constitue une famille d’adoption, qui accueille le désir des parents d’élever chrétiennement leur enfant, et d’espérer le conduire, si Dieu le veut, à la décision d’être baptisé quand il sera grand.

Pourquoi c’est le bazar dans les numéros des psaumes suivant les Bibles ? [Eva]

Pourquoi y a-t-il une différence de numérotation des psaumes suivant les bibles catholiques et protestantes ?

Les versions catholiques réunissent les psaumes 9 et 10 en un seul ; donc elles sont sur les versions protestantes en arrière de un numéro depuis le psaume 10.
Les psaumes 114 et 115, version protestante, sont réunis. Dans la version catholique, ils sont en un seul (113), plaçant celles-ci sont en retard de deux numéros depuis le psaume 113.
Le psaume 116, version protestante, est, au contraire, partagé en deux (114 et 115) dans la version catholiques ; ce qui rétablit la différence en arrière de un numéro depuis le psaume 115.
Le psaume 147, version protestante est de nouveau partagé (version catholique 146 et 147) ; ce qui fait que les différentes versions se raccordent à partir du psaume 148.

Comment gérer le « Père Noël » dans une famille chrétienne ? [Emma]

Je crois qu’il faut être radical.
Sinon vous risquez, le jour où votre enfant apprendra que « le Père Noël n’existe pas », de faire face à un « et Jésus aussi, c’est un mensonge » ?
Laissez-moi vous l’expliquer en montrant que faire croire au Père Noël à son enfant est une désobéissance à six des dix commandements.
Rien que ça…

1er. « Tu n’auras pas d’autre dieu » – ce personnage soi-disant bénissant répond à nos prières et nos demandes avec automatisme, hors de toute grâce et il récompense seulement nos bonnes oeuvres.
2ème. « Tu ne te feras pas d’image » – tout l’imaginaire du Père Noël est faussé, c’est une idole du capitalisme et de la surconsommation.
3ème. « Tu n’emploieras pas le nom de Dieu en vain » — le Père Noël est un faux « père qui est dans les cieux ». Et Jésus nous demande justement d’appeler Dieu « Notre Père »
8ème. « Tu ne voleras pas » – nous savons bien que l’hyperconsommation est la base même des injustices les plus profondes entre Nord et Sud.
9ème. « Tu ne feras pas de faux témoignage » – parce que mentir à nos enfants je peux jamais être édifiant.
10ème. « Tu ne convoiteras pas » – et nous savons que si nos enfants veulent ces jouets, c’est parce que des tiers les leurs imposent, souvent : la télé, la pub, les groupes d’amis… qui les poussent à vouloir ce qu’ont les autres.

Alors ? Père Noël ou pas Père Noël ?

A Noël, un enfant nous est né, son nom est Jésus, Emmanuel (Esaïe 7,14) et Dieu le Père ouvre pour nous la bénédiction d’une vie sauvée de la mort et du péché.

La Bible ne promettrait pas le bonheur ? Tout au plus elle permettrait la joie ? Je lis beaucoup de choses contradictoire à ce sujet… [Alexis]

Effectivement, la dureté de la vie semble être un paramètre quelque peu inévitable, un peu comme les accidents climatiques, les rhumes hivernaux, et autres contrariétés plus graves.

Peut-être nous faut-il relire les versets 7 à 9 du psaume 4 :

Beaucoup demandent : « Qui nous fera voir le bonheur ? » Sur nous, Seigneur, que s’illumine ton visage ! Tu mets dans mon coeur plus de joie que toutes leurs vendanges et leurs moissons. Dans la paix moi aussi, je me couche et je dors, car tu me donnes d’habiter, Seigneur, seul, dans la confiance.
Psaume 4,7-9

Dans ce texte, c’est bien bonheur et joie qui sont articulés.
Pour moi le bonheur est quelque chose de psychique, de ressenti, tandis que la joie est quelque chose de plus spirituel, moins émotionnel, plus profond dans notre être.

Dans l’âme (psychique), il y a des allers et venues des larmes au rire, de l’angoisse à la confiance, etc. Dans l’esprit, il peut y avoir un positionnement de l’ordre du choix, un peu comme David dans les psaume, qui choisit de ne pas larmoyer quand il dit au psaume 103 : « Mon âme [maintenant], bénis l’Eternel ! ». Bref, par la foi nous choisissons la joie de l’esprit, tandis que bonheur et malheur sont plus subis dans notre âme.