Qui a créé l’enfer ? [Laura]

C’est pas moi ! Au-delà de cette boutade, je crois que dans sa simplicité apparente, la question que vous posez en soulève beaucoup d’autres, que vous aviez peut-être en tête quand vous vous êtes adressée à 1001 questions. Je vais vous répondre à partir de ce que je crois et de ce que je lis dans la Bible, autant qu’à partir de ce que je vois autour de moi.
Je crois que l’ensemble de la création est le fruit de l’acte créateur du Dieu trois fois saint. Donc, si je considère l’enfer comme un lieu spécifique de la création, je crois que c’est Dieu qui l’a créé. Matthieu 25. 41 : « Ensuite il dira à ceux qui seront à sa gauche: Retirez-vous de moi, maudits; allez dans le feu éternel qui a été préparé pour le diable et pour ses anges. » Ce « feu éternel » peut être compris comme l’enfer, même si on voit bien qu’il y a beaucoup de toute notre imagerie à revoir là-dedans. Et il est clair que ce feu a été préparé… Je ne vois pas par qui d’autre que par Dieu. Cela n’est pas du tout plaisant ni à écrire ni à concevoir, mais je ne peux pas faire autrement que de lire ce que je lis. Dans sa vision de l’Apocalypse, Jean a aussi vu un étang de feu et de soufre où le Satan sera jeté. Le problème, c’est que la Bible parle assez peu de l’enfer, en tout cas selon les représentations que nous en avons. Voilà pour ce que l’on peut peut-être penser quand on envisage l’enfer comme punition. Cela me semble vouloir dire que dans la vraie vie, ce n’est pas comme à l’école des fans (une vieille émission de télé où on faisait chanter des enfants… c’est trop long à expliquer) : tout le monde n’a pas gagné à la fin. Ce que nous vivons sur terre n’est pas indifférent à Dieu.
Reste que sans même de parler de ça, je constate que beaucoup de mes contemporains qui prétendent vivre sans Dieu font déjà un enfer de leur vie. Attention je n’ai pas dit tous ! Mais il y a bien des domaines de la vie où dès à présent, j’ai l’impression de voir évoluer des damnés dans l’enfer de Dante : s’étriper pour un pot de pâte à tartiner au rabais, c’est vivre quelque chose de l’enfer ; vivre sa sexualité soit par la pornographie, soit par la fréquentation de sites des rencontres exclusivement sexuelles, c’est courir le risque de vivre quelque chose de l’enfer ; évoluer dans une entreprise qui détourne la devise républicaine pour mettre « volonté » à la place de « fraternité », c’est courir le risque de vivre quelque chose de l’enfer. Pas besoin d’imaginer que Dieu soit l’auteur de tout ça.

Noé a-t-il sauvé les poissons ou sont-ils restés dans l’eau ? [Jo]

Quelques éléments de réponse personnelle :

1- Que ce soient les poissons, tout autant que les volatiles, les animaux terrestres et les humains présents dans l’arche, ce n’est pas Noé qui les a sauvés mais Dieu. C’est lui qui a donné l’ordre à Noé de construire le refuge flottant où toutes ces espèces pouvaient loger, et c’est lui qui a laissé les eaux détruire tous les autres. Noé a obéit, mais il n’est pas l’auteur du salut.

2- Je ne suis pas de ceux pour qui la validité historique du récit du déluge est déterminante pour en estimer la valeur. On peut trouver cette histoire ridicule, mais il semble bien qu’un événement catastrophique de grande ampleur se soit déroulé, qui a impacté des récits de même facture dans de très nombreuses civilisations. Même si ce récit est à entendre de façon métaphorique, j’y reçois des vérités très interpellantes pour aujourd’hui. Ainsi : Le déluge est provoqué par le mal que commettaient les hommes (Genèse 6. 5) et la violence qui remplissait la terre (6. 11). Que le comportement humain ait des répercussions négatives sur toutes la création, cela ne vous paraît-il pas d’actualité (pollution, réchauffement climatique, etc.) ? Avoir foi en Dieu, croire ce qu’il dit nous fait souvent apparaître pour des idiots auprès de nos contemporains qui ne croient pas, tout autant que si nous nous mettions à construire un bateau gigantesque au beau milieu d’un continent…

3- Le mot aquarium n’existe pas en hébreu biblique. Les premiers aquariums datent du XIXe siècle. Merci d’avoir posé cette question qui m’a permis d’en apprendre davantage sur les aquariums !

Au nom de Dieu- des chrétiens se sont engagés dans des mouvements nationalistes comme l’Action française tandis que des prêtres ouvriers adhéraient à la CGT… Dieu est-il de droite ou de gauche ? [Josh]

Les deux, mon général ! Quand, en tant que chrétien, j’essaie d’accompagner une femme qui refuse d’avorter, en l’aidant à trouver des moyens pour accueillir son enfant, même si elle ne souhaitait pas au départ en avoir, j’adopte un comportement que certains qualifieront de droite. Quand, toujours en tant que chrétien, j’accueille des migrants, j’adopte un comportement que certains qualifieront de gauche. Quand j’entre dans un parti nationaliste, qui fonde son raisonnement sur la désignation des « étrangers » comme source des problèmes de mon pays, je n’adopte pas un comportement chrétien, mais une attitude idolâtre, qui place la nation au-dessus de Dieu. Quand j’adhère à un syndicat, si celui-ci a pour principal moteur le concept de lutte des classes et considère a priori que le dialogue avec le patronat est à refuser au profit d’un rapport de force, je n’adopte pas un comportement chrétien, mais une attitude idéologique. Les concepts de « droite » ou de « gauche » sont hérités de la Révolution française, et comme tous ces concepts humains, ils fluctuent au regard de l’histoire. La révélation de Dieu en Jésus-Christ ne passe pas par ces catégories.

« La cabane » (livre et film) est-il un bon outil pédagogique pour parler du Dieu véritable avec d’autres (qui ne le connaissent pas encore/souhaitent apprendre à le connaître) ? [P]

J’ai vu le film mais n’ai pas lu le livre. Mon opinion est donc sans doute incomplète. J’ai trouvé que ce film était un bon moyen de secouer notre représentation de Dieu (par exemple, à un moment du film, Dieu le Père se montre sous les traits d’un vieil indien… pour la culture américaine, cela fait pas mal réfléchir…). Il pose également une question très importante, pas seulement pour le christianisme, à savoir la possibilité et les conditions du pardon. Il me semble donc que ce n’est peut-être pas le film le plus indiqué pour quelqu’un qui ne connaît pas encore le Dieu véritable, car il vient avant tout remettre en question des manières de se représenter Dieu.

« Devenu comme l’un de nous ». « Faisons l’homme à notre image ». Que signifie nous quand Dieu parle ? [Joyce]

Question très intéressante mais épineuse ! Les deux citations que vous utilisez se trouvent dans les chapitres 1 et 3 de la Genèse (« Devenu comme l’un de nous » : Genèse 3. 22 ; « Faisons l’homme à notre image » : Genèse 1. 26). Genèse 1 désigne Dieu sous le vocable « Élohim » qui est un pluriel, mais tout le temps conjugué au singulier, sauf là ! Genèse 3 utilise deux noms conjoints : Élohim, précédé du tétragramme imprononçable « YHWH » que l’on traduit par « Le Seigneur » ou « L’Éternel ». Pour les chrétiens, très vite, on a compris ce « nous » comme exprimant la Trinité (Dieu Père, Fils et Saint-Esprit). Ce n’est bien sûr pas écrit en toute lettre, mais cela a le mérite de nous faire comprendre qu’un élément essentiel de la nature humaine, à l’image de Dieu, est d’être relationnelle : l’être humain est homme et femme, et au sein du couple, c’est dans cette altérité là que l’image de Dieu se vit et se comprend.

Je suis chrétienne et j’aime un homme qui en aime une autre. Est-ce mal de demander au Seigneur de me faire épouse de cet homme? De lui demander de tourner son cœur vers moi ? [Winnie]

Je ne suis pas à l’aise pour vous dire si c’est « bien » ou « mal ». Déjà, vous vous orientez dans la prière, et ça ça me paraît important. À partir de ce moment, je crois qu’il faut toujours se poser la même question : Pourquoi est-ce que je prie ? Est-ce que c’est pour demander à Dieu qu’Il fasse ce que je veux ou pour ouvrir mon cœur à Sa volonté, et de m’aider à ce que Sa volonté devienne la mienne ? Si le Seigneur a pour projet de vous voir en couple marié avec cet homme, il fera en sorte que cela se réalise. Mais si ce n’est pas le cas, votre prière ne fera alors que vous faire du mal, car vous vous enfermerez dans un désir qui est le vôtre, mais pas celui de Dieu. Ce n’est donc pas « mal », mais cela pourrait vous faire du mal. Pour ma part, je m’efforce de demander à Dieu qu’Il me rende conforme à ce qu’Il veut et qu’Il m’aide à accueillir Sa volonté dans ma vie. Et il arrive bien des fois que Sa volonté coïncide avec ce que je souhaite ! Dieu ne veut pas forcément me contrarier…

Comment parler de Dieu le Père à ceux qui ont une relation conflictuelle (conflit- absence- traumatisme-…) avec leur père terrestre ? [Philippe]

D’abord en les écoutant, pour entendre où se situe chez eux le problème dans leur relation avec leur père terrestre, et en quoi cela peut affecter pour eux la notion de Dieu comme Père.

Ensuite, je crois qu’il ne faut pas forcer le dialogue dans le sens de : « Si tu ne crois pas à Dieu le Père, ou si tu ne pries pas Dieu le Père, tu n’es pas un bon chrétien… » Après tout, si Dieu est venu jusqu’à nous en Jésus-Christ, le Fils, c’est aussi pour inviter les humains à une rencontre à un autre niveau que seulement la relation Père-enfants.

Dieu n’est pas que Père. Il est aussi Fils, (et donc, pour nous chrétiens, en quelque sorte, frère en Jésus) et Esprit (en hébreu, le mot traduit par Esprit, rouah, est féminin) ; Dieu peut être ému aux entrailles quand il voit ses enfants souffrir. Or cette manière de parler de lui relève de la féminité plus que de la masculinité. La tendresse de Dieu est infinie, comme sa patience. Si quelqu’un a du mal avec la notion de Père, pas de souci, donc.

Pourquoi Dieu a-t-il choisi Israël comme peuple élu ? [Marianne]

« Élu » signifie « choisi ». Dieu n’a pas choisi Israël parmi tous les peuples « disponibles » ! Mais Dieu, qui avait tenté de faire alliance avec toute l’humanité qu’il avait créée, puis sauvée du Déluge, a finalement fait alliance avec un homme, Abraham, afin qu’ « en sa descendance toutes les familles de la terre soient bénies » (Genèse 12 / 3 etc., cité par Actes 3 / 25). Les descendants d’Abraham, d’Isaac et de Jacob (surnommé Israël) sont donc les agents de cette bénédiction, héritiers d’une promesse faite à leurs ancêtres.

C’est à ce titre que le peuple d’Israël est le « peuple élu », c’est-à-dire choisi par Dieu pour cette mission. Celle-ci devait s’accomplir à travers la fidélité du peuple, de ses chefs et de ses membres, à la Loi que Dieu avait donnée par Moïse. Tout l’Ancien Testament montre qu’il n’en a rien été : l’infidélité d’Israël lui a été reprochée par Dieu via ses prophètes, et sanctionnée par l’Exil à Babylone. La bénédiction de toute l’humanité ne pouvait donc pas passer par l’obéissance d’Israël ; mais à travers sa désobéissance, c’est par un seul des descendants d’Abraham : Jésus, seul juste, que des gens de toute nation seront amenés vers le Père (Galates 3 / 16).

Ceci dit, la promesse de Dieu demeure : Israël (comme peuple croyant, pas comme État !) a reçu à travers la Bible tout ce qu’il lui faut pour reconnaître le Christ et adhérer à lui (Romains 9 / 3-4 et le chapitre 11). Il est et reste témoin de l’amour de Dieu pour l’humanité, amour qui a pris corps en Jésus-Christ, fils d’Israël quant à son humanité.

Pouvez-vous m’expliquer pourquoi Dieu dans le Premier Testament a tué autant de personnes (+ de 3.000) par rapport au diable (10 environ) ? [Christophe]

Je peux vous dire que Dieu a fait vivre plusieurs milliards de personnes, le diable aucune !

Car le diable ne peut faire vivre personne, ni d’ailleurs de sa propre autorité faire mourir qui que ce soit. Dans le livre de Job, le satan agit avec la permission de Dieu. Car Dieu seul est celui « qui fait mourir et qui fait vivre » (1 Samuel 2 / 6) : « Voyez que c’est moi, moi seul qui suis Dieu, et qu’il n’y a point d’autres dieux près de moi ; moi je fais vivre et je fais mourir, je blesse et je guéris, et personne ne délivre de ma main. » (Deutéronome 32 / 39).

Dès lors qu’on a bien vu qu’aucun parallèle n’est possible entre Dieu et diable, le second n’étant pas une personne divine, la question se pose de ce qui fait mourir. La réponse constante de la Bible, c’est que la rupture avec Dieu équivaut à la mort et entraîne la mort. « Le salaire du péché, c’est la mort ; mais le don gratuit de Dieu, c’est la vie éternelle en Christ Jésus notre Seigneur. » (Romains 6 / 23) La Bible chrétienne (les deux Testaments) pose donc ce nouveau faux parallèle, bien plus éclairant : tous ceux qui meurent (y compris vous et moi) le méritent, tandis que ceux qui vivent l’ont reçu en cadeau, à plus forte raison ceux qui vivront éternellement en Jésus-Christ !

Les textes que vous évoquez dans l’Ancien Testament sont des illustrations, sous forme de récits, de cette réalité. S’y ajoute l’amour de Dieu pour son peuple, un amour forcément partial : Dieu prend la défense de ceux qui lui appartiennent – et cela peut faire mal à leurs adversaires…

Un récent responsable religieux a affirmé que le diable n’était qu’un symbole. Est-ce une interprétation correcte de la Bible ? [Jacques]

Je ne sais pas ce que ce responsable religieux entend par symbole, mais pour ma part, parler du diable en utilisant ce mot est aussi inexact bibliquement que le décrire comme un personnage avec des cornes, des dents pointues et une fourche dans les mains… Quand Jésus (Matthieu 4. 2-3) passe quarante jours au désert tenté par le Satan (un autre nom utilisé pour le diable) j’ai du mal a comprendre si je prends le Satan pour un symbole… Quand il dit à Pierre : « Simon, Simon, Satan vous a réclamés pour vous passer au crible comme le blé. » (Luc 22. 31) je n’imagine pas Pierre secoué en profondeur dans tout son être par un « symbole », une « façon de parler ». Reste qu’il est bien sûr difficile et même dangereux de donner une image à ce qui est à l’origine de tout ce qui tente de nous détourner de Dieu, de nous isoler de son amour, de nous séparer de sa présence. Il ne vaut mieux pas chercher à trop définir ce qui cherche à nous diviser intérieurement (c’est le sens du mot grec « diabolos » : diviseur). Mieux vaut toujours se tourner vers Dieu, prier et demander le secours de la prière des autres, plutôt que de se faire des nœuds dans la tête pour savoir si c’est un symbole, un phantasme, ou un type qui marche avec des sabots de bouc… Car au fond, ce sont des tentatives pour essayer de le maîtriser, alors que le seul qui est vraiment plus fort que lui, c’est le Seigneur.