Pourquoi certains chrétiens ne regardent que les questions morales dans leur choix pré-électoral ? [Caro]

Effectivement, une partie des électeurs chrétiens accordent beaucoup d’importance à des critères comportementaux, moraux ou éthiques pour choisir pour qui ils voteront. Et les candidats le savent bien : se positionner contre l’avortement, contre le mariage gay, contre la polygamie de certains, a un fort potentiel de séduction à l’égard de certains chrétiens, qui font de ces sujets des enjeux premiers.

C’est assez étonnant quand le ministère de Jésus proposait une toute autre posture, aider une femme (en Jean 8) à sortir de sa logique d’adultère plutôt que de la condamner, contribuer à réintégrer des exclus (en Luc 17) plutôt que de les stigmatiser, choisir le pardon plutôt que la condamnation (Jean 3,16-17).

Ce sont sur d’autres sujets éthiques que Jésus s’est fortement positionné. A la suite du Premier Testament, il plaçait la question de l’équité et de la justice au tout premier plan, à la fois côté politique, mais aussi en matière de justice économique. Sa préoccupation pour la liberté, la justice des jugements rendus, ou le soin aux plus petits était bien plus forte que ses préoccupations strictement morales.

Bref pour Jésus, la justice, le droit des plus faibles et l’équité économique étaient des sujets plus essentiels pour faire des choix que les questions comportementales ou de morale personnelle.

Si, suite à un accident, quelqu’un est branché à des machines pour la maintenir en vie mais que sans celles-ci, la personne meurt : est-ce que débrancher revient à une forme de meurtre ? [Chiara]

Votre question touche à un grand problème d’ordre éthique difficile à traiter en quelques lignes ! Il se pose, parfois de façon aiguë, à la conscience des médecins, des proches du malade qui est dans la situation que vous indiquez. Faut-il le maintenir artificiellement en vie, à tout prix ? A-t-on le droit de laisser quelqu’un dans un état végétatif ? Etc.

Difficile d’établir des règles générales, car chaque situation est spécifique. A ceux qui avaient une réponse trop facile, telle que : « oui, il faut tout faire pour maintenir la vie, car mettre un terme à la vie de quelqu’un, débrancher le respirateur, c’est prendre la place de Dieu », un médecin célèbre répondait : « je me mets déjà à la place de Dieu lorsque je le branche ».

Au risque de simplifier, on distingue deux grands types de réponse à votre question. D’abord, celle des partisans de l’euthanasie. Selon eux, il ne faut pas hésiter à abréger la vie d’un patient, et lui permettre de mourir dignement lorsqu’il souffre trop, physiquement ou moralement, ou lorsqu’il n’est plus en mesure de communiquer avec son entourage. Mais qui peut juger, et selon quels critères, qu’une vie est « digne » ou « indigne » de subsister ? Le malade lui-même ? Mais bien souvent, derrière le « je veux mourir », il faut entendre : « j’ai besoin d’aide ». Et qui est censé poser l’acte qui va mettre fin activement à ses jours ?

Une autre réponse est celle des soins palliatifs : elle consiste à refuser à la fois l’euthanasie et toute forme d’acharnement déraisonnable pour maintenir en vie le malade, donc dans les deux cas à se rendre maître de sa vie. Elle admet qu’il n’est plus possible de guérir le malade, et met plutôt l’accent sur le soulagement de sa souffrance. Elle vise à accompagner la vie jusqu’à son terme, sans chercher ni à retarder, ni à hâter celui-ci. Entre les deux positions, vous devinez où va ma préférence…