Il semble que les premiers huguenots s’opposaient au théâtre et aux romans de fiction. Pourquoi ? [Le sage]

Le protestantisme notamment réformé, dont les huguenots sont la version française, traîne avec lui une réputation souvent justifiée de sobriété, pour ne pas dire d’austérité, de sévérité dans les mœurs comme dans les goûts. En partie par opposition au catholicisme et à ses excès jugés « païens » (la pompe liturgique, l’exubérance des fêtes religieuses, l’abondance des images dans les édifices du culte…).

Cette réserve de certains protestants, dans les siècles passés, vis à vis des divertissements, comme assister à des pièces de théâtre ou lire des ouvrages « profanes » a un autre motif. Ces activités étaient jugées futiles voire dangereuses parce qu’elles pouvaient éloigner de plus sain(t)es occupations, comme la vie de prière, la méditation de la Bible ou la fréquentation des assemblées de l’Église !

Qu’en penser ? Ne pas laisser distractions et loisirs prendre trop de place dans notre temps libre, garder un esprit critique et ne pas avaler n’importe quoi, que ce soit en regardant un film, en assistant à du théâtre ou en lisant un roman, semble sage. Mépriser l’art, comme tout ce qui peut procurer joies et plaisirs, par contre, ne l’est pas du tout. D’autant plus que l’art est un formidable vecteur non seulement d’émotions (ce qui est beau nous touche), mais aussi de réflexion, voire de spiritualité (ce que démontrent des artistes chrétiens et même protestants comme Rembrandt, Van Gogh, Bach et tant d’autres !). C’est vrai aussi pour le théâtre depuis les tragédies de l’Antiquité grecque, comme pour le roman et autres genres littéraires. N’oublions pas enfin que la Bible contient aussi de la poésie, des récits, des fictions…

Les huguenots étaient-ils les mêmes que les puritains anglais ? Y avait-il des différences ? [Frédéric]

Oui et non. Oui, parce que les idées qui portent les deux groupes sont les mêmes, ce sont celles des réformateurs ayant initié tous les courants du protestantisme au XVI° siècle. Les deux courants sont contemporains, à la fin du XVI° / début du XVII° et se sont tous deux développés dans un contexte conflictuel. Et non, parce que l’incarnation d’idées semblables a été différente car il s’agit de deux contextes fondamentalement différents : les puritains anglais sont nés d’une réaction à l’organisation de l’Église anglicane mise en place par Elizabeth 1ere et jugée par eux trop proche d’une conception catholique de l’Église, ce qui les pousse à s’y opposer et à développer une pensée théologique propre qui aboutira à la création de des Eglises presbytériennes. Le mot huguenot désigne les protestants français et le contexte des guerres de religion, en particulier en France; avant d’être un courant théologique ce mot désigne une histoire faite de persécutions, de résistances et d’exils.

Mon ancêtre était un réfugié huguenot pendant la révocation. Si je visite la France en tant que touriste- y a-t-il quelque chose que je dois savoir avant d’assister à un service d’Eglise EPUdf ? [Jack]

Tout dépend de votre habitude ecclésiale dans le pays où vous habitez, parce que l’on mesure toujours les différence par rapport à un point de repère… Si votre repère est celui de la pratique des huguenots au moment du refuge alors il est important que vous sachiez que la plupart des personnes que vous pourrez dans rencontrer dans l’EPUdF n’ont pas cette histoire ni cet héritage; les églises locales sont en général de petite taille, fraternelles, et composées d’individus aux parcours spirituels et culturels extrêmement variés; selon les lieux et les cultes vous pouvez donc y trouver une très grande diversité (et créativité) liturgique et théologique.

Pourquoi Dieu a-t-il permis que les huguenots soient si persécutés ? Comment cela faisait-il partie de son plan ? [Dennis]

Difficile à dire… ce que la Bible dit c’est que souffrir pour la justice (1Pierre 3,14) n’a rien d’étonnant pour les disciples (Matthieu 10,23-24), que de telles épreuves peuvent être un aspect du jugement de Dieu (qui commence par Sa maison, voir 1Pierre 4,17), et que l’attitude face la persécution peut avoir grande valeur de témoignage (1Pierre 3,16).

Avec le recul de l’histoire, on peut dire que la persécution des Huguenots en France, particulièrement vive à la fin du XVIIe et au XVIIIe siècle, a suscité d’importantes migrations qui ont plutôt réjoui les pays d’accueil, que le témoignage des huguenots persécutés continue à porter la foi de leurs descendants et que les excès de l’Etat français à cette époque ont favorisé d’importantes remises en question à la fin du XVIIIe siècle.

Mais restons prudents : les voies du Seigneur sont impénétrables (Romains 11,33-36)… Pour le croyants, l’essentiel est je crois de garder en tête que « tout concourt au bien de ceux qui aiment Dieu » (Romains 8,28), dans cette vie ou dans la perspective de l’éternité.