Le suicide condamne-t-il systématiquement à l’enfer ? [Anna]

Le seul péché qui ne sera pas pardonné, d’après la Bible, est le fameux « péché contre le Saint-Esprit », selon une parole de Jésus que l’on trouve dans l’Evangile selon Marc ch. 3,8-29 et ses parallèles (Matthieu et Luc). Jésus y parle d’un blasphème contre l’Esprit Saint, c’est à dire d’un refus conscient, voulu de la grâce de Dieu et de son Esprit d’amour et de miséricorde.  Voir aussi Hébreux 6,4-6 à ce sujet.

Le suicide est une expression de désespoir, seul moyen trouvé pour échapper à une vie devenue insupportable. Acte terrible, y compris par la culpabilité que le suicidaire, par son geste, fait peser consciemment ou pas, sur ses proches. Mais cela ne permet pas de dire qu’il pourrait séparer celui ou celle qui y cède de l’amour de Dieu et du Salut éternel qui nous est accordé en Jésus-Christ. Dans ces puissances et ces profondeurs dont parle Paul, parmi la longue liste de tout ce qui ne peut pas nous séparer de cet amour (Romains 8,39), il y a la puissance (pourquoi pas aussi celle du désespoir), la profondeur (y compris d’un désarroi, d’un état dépressif qui peut pousser même un chrétien à mettre fin à ses jours).

C’est un acte que nous n’avons pas à juger. Ce qui  compte avant tout est de prendre soin les uns des autres, de rester attentifs aux appels à l’aide, parfois discrets, que celui ou celle qui souffre nous envoie. Et si un proche met fin à ses jours, de refuser au nom de Jésus-Christ toute attaque de Satan, l’accusateur qui voudrait lier nos consciences.

Que devrions-nous faire quand la vie semble parfois inutile ? [Ulrich]

Quand je suis soumis à une tentation de cette sorte, je me réfugie dans la prière. Je me « cache dans le manteau de Jésus » si vous me permettez cette expression un peu simple. Ce n’est en tout cas ni par une réflexion philosophique, ni par un divertissement, médiatique ou autre, que j’ai trouvé l’apaisement. Je sais aussi que j’ai souvent besoin de m’entourer de personnes que j’apprécie et en qui j’ai confiance, car leur contact peut m’aider à changer mon point de vue sur la vie.

J’ai bien connu une personne qui avait toujours été élevée dans la religion et qui a mis fin à ses jours de manière brutale. Va-t-elle ou est-elle en enfer ? [Alexandre]

Cette idée est répandue. Je me souviens qu’une famille qui m’avait appelé à célébrer les obsèques d’un de ses membres m’avait caché qu’il s’était suicidé, par peur d’essuyer un refus de ma part, et pensant probablement que la présence d’un pasteur assurerait automatiquement le départ du défunt vers le ciel.. Double erreur !

La Bible nous relate quelques suicides : celui de Judas bien sûr, pris de remords après avoir trahi Jésus. Ou d’Ahitophel, conseiller d’Absalom, parce qu’il n’avait pas été écouté et qu’il craignait sans doute de voir son maître perdre la partie contre David (2 Samuel 17,23). Celui qui met fin à ses jours ne supporte plus de vivre parce que tout ce qui fondait, justifiait à ses yeux son existence s’effondre sans recours. Ce qui distingue Judas de Pierre (qui a pourtant aussi trahi Jésus en le reniant), ce sont les larmes de repentir que ce dernier a versées. Pierre a accepté de ne pouvoir se justifier lui-même et de s’ouvrir au pardon du Seigneur.

Mais gardons-nous bien de décider du sort éternel de celui ou celle qui ne supportait plus de vivre et qui  a succombé au désespoir, même s’il a été « élevé dans la religion » (la religion ne protège de rien, ce qui sauve c’est la foi !). Gardons-nous du jugement. La Bible nous rappelle que le dernier mot sur toute vie et tout être appartient à Dieu. L’enfer, pour celui qui s’est suicidé, c’était d’abord sa vie de souffrance, ses questions sans réponse, sa solitude, sa dépression, ses impasses, que sais-je encore. Et même un croyant sincère peut succomber au désespoir. L’enfer pour ceux qui restent, les proches, c’est la culpabilisation qu’entraîne un tel geste « Si j’avais pu l’écouter, l’aider, comprendre sa souffrance »… Mais de tous ces enfers, le Seigneur peut nous sortir, comme il a fait sortir son fils du séjour des morts.

Jésus est venu accomplir la loi. La loi dit « Tu ne tueras pas ». Personne ne prend la vie de Jésus- mais il la donne… et donc- logiquement- il se suicide. En quoi Jésus accomplit-il alors la Loi ? [Munch]

Le commandement appelant à ne pas tuer, (Exode 20, Deutéronome 5), use d’un mot hébreu qui parle du meurtre prémédité d’une autre personne et donc pas de suicide. Si le suicide est considéré comme une triste chose par les chrétiens, c’est une question de logique. En effet, si Dieu nous donne la vie et une espérance en Jésus-Christ, le suicide est le rejet de ce que Dieu donne.

La question est différente en ce qui concerne le sacrifice de Jésus-Christ, qui accueille, bien au contraire, la vie et la mission que le Père lui a donné, pour le salut des humains. Il accomplit alors la loi en aimant jusqu’au bout les humains dans l’obéissance au Père (Jean 15/13, Hébreux 5/7-9), pour que la vie triomphe (Romains 5/7-9).

Il a agi ainsi afin que nous puissions, dans les bons et les mauvais moment de la vie, compter sur lui et espérer toujours.