La « gouvernance partagée » est un principe de management des entités humaines, avec pour fondement l’idée d’un système maléable et fortement réformable, un fonctionnement par cercles de travail, avec un accent sur le consentement et la redevabilité, et enfin des outils comme l’élection sans candidat. Il s’agit de managements très souples, mais très codifiés où il s’agit de toujours argumenter les décision, et renforcer des redevabilités horizontales, d’égal à égal, pour quitter à tout prix le pharaonisme des systèmes pyramidaux, où pour ne plus être esclave la seule solution serait de devenir maître.
Il y a donc dans cette proposition managériale plusieurs registres qui plaisent au pasteur réformé qui vous répond, car ils semblent bibliques et font droit à des démarches hyper collaboratives et participatives, non hiérarchiques.
J’y vois pourtant plusieurs limites :
– la nécessité d’avoir des personnes hyper formées, avec une haute compréhension de la méthode, pour que ça marche,
– la tentation de glisser du « semper reformanda » à la révolution permanente, en changeant tout le temps les cercles de structuration,
– un risque de dilution des objectifs dans la fascination pour le moyen,
– un manque de simplicité biblique dans le fait de trouver une inspiration vraiment extérieure au groupe, qui pourra aboutir à l’éviction du Saint-Esprit, et d’autres outils comme la prière, la référence biblique, etc.
– incidemment aux deux points précédents, une accentuation exponentielle de la fascination pour l’Eglise, plutôt que du centrement sur Christ.
Je lui préfère le fonctionnement prébytérien-synodal, auquel j’ajouterai le principe conciliaire. J’explique les enjeux en précisant les termes (tout en essayant de faire court) :
– le presbytéral : un collège d’ancien est très utile pour prendre des décisions dans un système qui est différent d’une entreprise (où chacun peut avoir le même niveau d’implication en termes de temps, et où il n’y a pas la lutte des classes entre permanents et bénévoles, laïcs et clercs).
– le synodal : la mise en commun des ressources permet de penser « l’au-delà de soi-même », et le fait que l’Eglise est un cercle dont le centre n’est pas au milieu d’elle-même. Tout ce qui peut être mutualisé est facteur d’ouverture d’esprit, d’économies d’échelle, et d’humilité locale, de régulation consentie.
– le conciliaire : le système presbytérien-synodal ne peut fonctionner à mon sens que s’il est confessant, fondé sur une foi en l’activité du Saint-Esprit, l’autorité des Ecritures, et donc une méthode qui en découle : nous débattrons et prierons jusqu’à pouvoir dire : « Le Saint Esprit et nous avons décidé… » (Actes 15,28).
Ce système ne cherche pas à diluer l’autorité, la responsabilité ou la redevabilité. Il ne dénie pas la nécessité de combiner le participatif avec parfois aussi une autorité réelle, si possible jamais unipersonnelle, mais quand même incarnée dans un système de ministères (plutôt que sacerdoce), où le risque de l’abus de pouvoir est très limité.
C’est pour cela qu’il a ma préférence.