Deux questions en une, Nicolas ! Pour répondre à la première, effectivement la chronologie biblique prise à la lettre tomberait en flagrante contradiction avec ce que nous savons de l’âge de la Terre et de l’humanité. Le rédacteur du premier chapitre de la Bible n’avait pas nos connaissances scientifiques, mais son message est vrai, inspiré, pertinent : le monde n’est pas éternel, tout a un commencement (contre la vision païenne, antique, d’un univers statique, d’un temps circulaire…). Rien n’y est donc divin ou sacré, ni lune ni soleil ni étoiles. Ce sont des créatures, comme nous le sommes aussi. Genèse ch.2 compare le monde à un jardin à cultiver et à garder. C’est une image, mais qui n’est pas sans résonance dans nos préoccupations écologiques d’aujourd’hui. Adam et Eve ne sont pas, pour leur part, à identifier à Lucy, à l’australopithèque ou autres hominidés, mais aux humains à qui Dieu s’est révélé, ce qui justement a fondé leur statut d’êtres créés à son image.
Bref, il ne faut pas confondre (ni opposer d’ailleurs) le récit biblique avec un exposé scientifique des débuts de l’univers ou de l’histoire de l’Homme. Ce sont des genres différents, écrits l’un pour décrire, dire le « comment », l’autre expliquer, donner une réponse au « pourquoi la vie ? pourquoi le monde ? » etc.
Il faut garder en tête cette distinction en abordant la question de la mort, et cette mise en garde de Dieu à l’homme en Genèse 2,17 : « le jour où tu mangeras de ce fruit que je t’interdis, tu mourras ». Voici comment nous pouvons la comprendre. L’homme n’a pas été créé comme possédant l’immortalité, dans la mesure où, simple créature, nue et fragile, il ne vit que du souffle de Dieu. Il n’a pas davantage été « programmé » par Dieu pour mourir et retourner au néant. Mais en se séparant de son Créateur, il se sépare de ce qui le fait vivre un peu comme un scaphandrier couperait son tuyau d’alimentation en oxygène. Notez que sitôt mangé le fruit, l’homme et la femme éprouvent la honte de leur nudité, c’est à dire de leur statut de créature limitée, faible. Ils ont voulu se prendre pour des dieux, ils découvrent qu’ils sont poussière. « j’ai eu peur (de toi, dit Adam à Dieu qui le cherche), parce que j’étais nu, et je me suis caché » Genèse 3,10. Il y a mort et mort ! La mort, dans la Bible, ce n’est pas seulement l’arrêt des fonctions biologiques, c’est être privé de la présence de Dieu.