Quand la paranoïa se mord la queue

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L’expérience de Christ est celle du serviteur souffrant et d’un ressuscité puissant. Bien que sans faute qu’on puisse lui imputer, il a été condamné. Et à sa suite, il nous avertit à de nombreuses reprises : « Souvenez-vous de la parole que je vous ai dite : ‘Le serviteur n’est pas plus grand que son maître.’ S’ils m’ont persécuté, ils vous persécuteront aussi ; s’ils ont gardé ma parole, ils garderont aussi la vôtre. » (Jean 15,20). Nous savons donc que nous serons persécutés, mais pire encore Jésus nous avertit que la persécution la pire viendra de l’intérieur, de la synagogue, de l’Eglise (comme expliqué en Luc 12,11).

Nous sommes avertis.

Il est donc légitime d’enseigner les chrétiens sur la difficulté qu’on peut rencontrer dans certaines Eglises. Sur le fait que dans certaines d’entre elles on y persécute vraiment ceux qui essayent de croire en vérité et de s’impliquer dans une théologie du Royaume. Et j’en sais quelque chose pour l’avoir moi-même expérimenté. Cela peut être le cas parce que ce sont de fausses Eglises dont Christ n’est pas le centre, empreintes d’un faux amour. Ou parce que ce sont des Eglises autoritaires, où Dieu n’est pas le Père mais que quelqu’un s’est mis à la place du Père. Soit parce que ce sont des Eglises légalistes où l’Esprit ne peut pas souffler. Nous devons enseigner les chrétiens à discerner comment une assemblée peut être un lieu de vie ou un lieu de mort.

Mais la difficulté, c’est qu’il n’y a pas d’Eglise parfaite. Or si vous avez visité de nombreuses Eglises sans trouver une qui soit à peu près bien pour vous, rappelez vous que l’ensemble des Eglises à qui écrivait Paul avaient des problèmes, et que donc, c’est peut-être qu’il y a un problème… en vous.
Comme il n’y a pas d’Eglise parfaite, les gens vont toujours trouver des choses qui ne vont pas ; et ils ont raison. Et c’est là où s’engouffrent quelques prédicateurs qui produisent un discours anti-Eglises, et anti-pasteurs, avec une radicalité qui est souvent née d’un zèle très beau et pur au premier regard, mais qui devient à force un discours paranoïaque : « Aucune Eglise ne peut apporter quelque chose de bon ; aucun pasteur ne peut être de bon conseil. » C’est là que le bât blesse. Car ces prédicateurs n’appliquent pas cette règle à eux-mêmes. Ils se marketisent sur les réseaux sociaux, ils créent des adeptes, visent des publics influençables, et posent une emprise sur eux. Désormais il faut se méfier de tout le monde. Sauf d’eux. Et si par malheur en tant que pasteur vous voulez alerter un frère ou une soeur entrain de se mettre sous emprise, vous prouvez par là même que vous êtres un pasteur terrible rempli d’un esprit de contrôle, et que donc… il faut faire attention à vous. La boucle paranoïaque est bouclée. Le poisson est harponné.

Alors qu’il y aurait de bonnes raisons d’être prudents car Jésus n’a pas voulu que nous entrions dans le discours paranoïaque. Il a voulu que nous prêchions, en étant libres, en guérissant les malades, en purifiant les lépreux, en ressuscitant les morts et en chassant les démons. Seul Jésus a été fidèle jusqu’au bout. Donc il faut absolument déminer ce discours paranoïaque en invitant les gens à être juste… libres ! S’ils veulent rester, ils restent dans les Eglises. S’ils veulent partir, ils partent. Mais qu’ils ne maudissent pas. Qu’ils montrent avec amour à leur frères les lieux où ils peuvent progresser, mais qu’ils ne proclament pas de discours de condamnation absolue discréditant l’oeuvre de Dieu dans ces lieux. Que ces prédicateurs prennent soin des gens sur le long terme, et pas quel dans des « shoots » de Saint-Esprit ou des expériences aussi fugaces que spectaculaires. Qu’ils arrêtent avec la naïveté de penser que quelqu’un baptisé à la va vite sans enseignement pourra juste s’en sortir avec sa Bible et sa prière seul dans la jungle du monde. Nous avons besoin les uns des autres, et ça s’appelle : l’Eglise…

Prédicateurs, aimez l’Eglise comme Christ l’a aimée. Il a donné sa vie pour elle. Pas pour une institution, évidemment, mais pour un corps vivant. Et donc, prédicateurs, arrêtez de créer des nouvelles institutions, parce que paradoxalement c’est ce que vous faites… Vous créez des mouvements qui vous mettent au centre, qui font que les gens se disent de Paul ou d’Apollos. Pourquoi ? Parce que ce qui se passe quand on produit le discours paranoïaque c’est que, en plus de renforcer des gens qui sont déjà dans une pathologie psychique et spirituelle, on met sur les petits trônes des Eglises de maisons qu’on fonde des Jézabels non enseignées qui deviendront des tyrans bien pire encore que ces médiocres pasteurs que vous dénoncez, comme on en parle dans l’Apocalypse. Elles mettront les gens sous emprise, multiplieront les situations d’abus. Et il y aura beaucoup de dégâts par cette séduction. Beaucoup de souffrance individuelle, et des milliers de rétrogrades, à juste titre dégoûtés par des promesses non tenues.

Donc oui. Discernons. Il y a des lieux de vie et des lieux de mort dans les Eglises, c’est vrai ! Et seul l’Esprit de vie peut les désigner. Mais il les désigne tout à fait à ceux qui le Lui demandent. Et nous n’avons pas à faire des guides ecclésiaux avec des bons-points ou à produire de la haine et du dénigrement.

Bénissez, et ne maudissez pas, comme il est dit en Romains 12,14

Author: Gilles Boucomont

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