Le OUI de Dieu
Prédication du dimanche 7 janvier 2007
Matthieu 5 :37 – Que votre Oui soit Oui
2Cor 1 :17b-22 – Le Oui de Dieu
Après un séjour de sept ans en Normandie, j’ai vu que les gens de cette région sont souvent caricaturés comme étant des gens prudents dans leurs relations, économes en audace, et tenaces en affaires. Et ils sont célèbres dans la France entière pour leur fameuse formule : « Pt’être bien qu’oui, pt’être bien qu’non » qui est au normand ce que « Inch’Allah » est au musulman. Mais c’est le français en général, qui est indécis : « On ne sait jamais ; des fois, il arrive de ces choses… On ne peut jurer de rien. Avec l’OMC, la PAC, les OGM, la SNCF, la CSG et le SRAS, y’a plus de saisons, et puis les affaires ne sont plus ce qu’elles étaient. Le temps est instable. Et puis la planète se réchauffe… ».
Le normand connaît le caractère facétieux des nuages dans le ciel incertain. Son esprit fonctionne comme son climat. Il sait qu’il peut faire beau ou bien pleuvoir dans la prochaine demi-heure. Il sait que la vie est comme le ciel, c’est-à-dire qu’elle est faite de retournements soudains. D’où le « Pt’être bien qu’oui, pt’être bien qu’non ». C’est l’alternative comme credo. C’est l’indécision comme mode de vie.
C’est pour ça qu’il ne nous est pas facile à nous, français, de suivre le Christ. Car Jésus demande que notre Oui soit Oui et que notre Non soit Non. Tandis que le français veut que son Oui soit pt’être et que son Non soit pt’être.
Il en va de notre liberté que de pouvoir choisir entre le oui et le non. Tout le monde est d’accord avec ça : être libre, c’est avoir le choix de dire oui plutôt que non, ou de dire non plutôt que oui. Tout le monde est d’accord avec ça, sauf… le nouveau testament. Aïe.
Je suis persuadé que 90 % des chrétiens pensent que Dieu nous donne un rendez-vous qui consiste à choisir entre « suivre Jésus » et « ne pas le suivre ». Ce que Dieu désire dans sa parole, c’est que nous le suivions. Un point c’est tout. Nous ne pouvons pas dire à Dieu : « Je suis content, tu m’as donné la liberté d’aller loin de toi, donc je te rends grâce que tu m’aies donné la possibilité de ne pas suivre Jésus, de fuir ta bénédiction, de ne pas être croyant ».
Malgré la prédication de toute une génération de chrétiens, la liberté biblique ne consiste pas à être face à l’alternative entre un oui à Dieu et un non à Dieu, entre la foi et le doute. Dieu nous offre la foi. Point, à la ligne.
Comprenez bien le processus.
Imaginez que vous êtes sur un chemin, le chemin de vie. Et voici que le chemin que vous suivez, de façon simple et lisible, arrive à un carrefour. Vous avez désormais la possibilité de suivre deux routes. Il y a une route qui mène vers un parcours miné et semé d’embûches et l’autre qui reste un sentier carrossable. Alors, quel est votre choix ? Vous pouvez choisir de marcher sur le premier chemin que j’ai décrit, celui qui est miné. Ça peut être votre choix. Mais honnêtement, vous êtes fou si vous choisissez ça. Vous allez y risquer votre vie au premier pas.
Si vous êtes dans cette situation-là, pouvez-vous encore affirmer, avec aplomb, que votre liberté consiste à choisir de marcher tout de suite sur une mine anti-personnel ? Drôle de conception de la liberté que de choisir de mourir sans s’ouvrir à la liberté du lendemain !
Eh bien la liberté biblique est bien celle-ci : elle consiste à s’apercevoir qu’en apparence on a un choix à faire mais qu’en fait, ce n’en est pas un. Est-ce que j’ai le choix entre la vie et la mort ? Pas tant que ça. Parce que dès que je suis mort je ne suis plus libre, je ne peux même plus faire des choix. Mon seul choix c’est la vie. C’est ce que dit très bien Moïse dans le Deutéronome : « J’ai mis devant toi la vie et la mort, choisis la vie. » J’ai mis devant toi la bénédiction et la malédiction, choisis la bénédiction. Ce n’est même pas un choix quand on sait ce qu’il faut choisir à tout prix. « Je vous propose de choisir entre deux semaines à Tahiti et cinq ans en prison. Réfléchissez bien ! Faites votre choix, c’est votre liberté, alors, que préférez-vous ? »
La vraie liberté de l’humain ne consiste donc pas dans une alternative pour dire Oui ou pour dire Non à Dieu, et encore moins pour dire peut-être. Croyez-vous une seconde que quand on a dit Non à Dieu, on puisse vivre libre ? On vit sous l’escarcelle de tas de maîtres, de petits dieux portatifs et sans-fil. On vit sous le règne du désir débridé, on vit au royaume des caprices et des tempêtes. On est tout sauf décontracté. On est seul, mais on n’est pas libre.
La découverte de Moïse, de Jésus, de Paul et de Luther, c’est la garantie que notre liberté ne se trouve pas dans notre choix, mais qu’elle se trouve dans notre Dieu. L’unique solution viable, c’est notre Oui à Dieu.
Bien sûr, nous sommes toujours devant des choix : fromage ou dessert, vélo ou voiture, ciné ou télé… mais pour ce qui est des registres fondamentaux et vitaux de notre existence — tout ce qui va être de l’ordre du vital ou du mortel — notre seul vrai choix, c’est celui de marcher à la suite du Christ dans le chemin de la vie. En somme, nous n’avons pas vraiment le choix.
Cette vérité est scandaleuse, elle est folle, elle est inaudible pour les français. En effet ils sont ce peuple, qui, dans le concert des nations, a choisi la liberté comme idole. Le pays de la liberté et des droits de l’homme, comme nous avons plaisir à nous nommer, ce pays a du mal à supporter l’idée que notre liberté a des limites, et que vivre sans Dieu n’est pas vivre libre.
Ce n’est pourtant que dans la mesure où notre vie colle au projet de Dieu pour nous que nous pouvons nous découvrir véritablement libres, libérés de tous les esclavages et de toutes les dominations qui nous aliènent.
Avez-vous le choix, quand quelqu’un vous aime, de lui dire : « Je t’interdis de m’aimer, respecte ma liberté, je ne veux pas que tu m’aimes » ? L’amour d’un autre fait partie de ces réalités que nous subissons. Et quand bien même nous essayerions de nous agiter de toutes nos forces pour être le moins « aimables » possible, Celui qui nous aime vraiment continuera à nous aimer, comme nous sommes. Autant vous êtes libres d’aimer, autant vous n’avez aucune prise sur l’amour reçu. Vous vous bouchez les oreilles pour ne pas entendre, vous cachez vos yeux pour ne pas voir ? Est-ce que cela change quelque chose à la réalité qui est devant vous ? Vous êtes tout de même aimé.
Votre liberté devant Dieu consiste seulement à réaliser combien Dieu vous aime. Que ça vous fasse plaisir ou non, il vous aime. Que vous l’aimiez vous-même ou que vous ne l’aimiez pas, il vous aime. Vous n’avez pas le choix ; c’est un état de fait. Que vous croyiez ou pas en Dieu, Dieu, lui, croit en vous, et vous ne l’empêcherez pas de sitôt d’y croire.
J’ai mis devant toi le oui et le non. Choisis le oui. Tu n’as pas le choix.
C’est Jésus que l’on appelle dans la bible le Oui de Dieu, l’Amen. C’est lui le Oui de Dieu envers l’humanité, et c’est lui le Oui de l’humanité envers Dieu. C’est le seul à avoir pu concentrer en lui-même non seulement le désir qu’avait le Père d’aimer toutes ses créatures, mais aussi le désir plus incertain de l’humanité de reconnaître Dieu comme son Père.
C’est dans notre Oui à Dieu, c’est dans notre Oui à sa volonté et à ses projets que se joue notre vraie liberté. C’est quand nous disons « Oui, Jésus-Christ est le Seigneur » que notre liberté prend toute son ampleur, que nos écailles sur les yeux tombent et que les chaînes à nos pieds tombent. C’est, comme cela était rappelé dimanche dernier, quand notre servitude devient service que nous prenons notre essor. Alors, que notre Oui à Dieu soit l’écho du Oui de Dieu pour nous, e