Christ & collecte
Le confinement 2.0 a déjà promu comme palliatif à la fermeture générale la pratique du « click and collect ». Une fois dépassé l’agacement de l’expression anglaise, ce qui frappe c’est le primat du consumérisme qui se dégage de cette « solution » donnée à la société pour préserver la vie matérielle des consommateurs que nous sommes, quand bien même nous aurions envie d’être bien plus que des consommateurs…
En Eglise nous vivons la pratique du Christ & collecte.
Comme nous n’avons rien à vendre mais tout à recevoir, c’est Christ et la communion fraternelle que nous recherchons. Nous cliquons sur Youtube, Livestream ou Facebook pour retrouver notre culte habituel, ou aller papillonner dans les prés d’à côté où l’herbe est plus verte et les eaux plus paisibles. La grosse question, c’est notre capacité à vivre vraiment ensemble, bien que l’expression — française — de « faire Eglise » soit elle aussi assez pénible.
Le gros enjeu ce sont les finances. Si on a des bâtiments, ils sont toujours là et il faut les entretenir même si on réduira la facture de chauffage. Mais si nous voulons garder via internet nos brebis pour le monde d’après, il faut s’équiper d’un compte Zoom pro, d’une caméra et d’un module BlackMagic (Seigneur, pardon…), etc. Tout cela coûte de l’argent. Alors comment continuer à exister financièrement ? Plus difficile encore est la mendicité de l’Eglise qui va chercher des fonds. Faut-il prêcher sur la dîme ? Avoir un module de don à la fin de la vidéo ? Espérer que les gens vont rester fidèles dans leur offrande par virement ?
Soyons clairs : parce que le bien que nous partageons n’est pas matériel il est jugé non-essentiel. Ce qui montre que ceux qui font la loi n’ont pas une vie spirituelle très dense. Mais comme nous ne vendons rien, nous avons du mal à faire rentrer de l’argent, en tout cas avec les outils marketing qui s’offrent à nous. Le monde matériel pousse assez loin la dématérialisation du clic, mais c’est pour consommer plus de matériel. Il n’est pas prêt à ce que le spirituel soit plus valorisé, financé, etc.
Quoi qu’il ne soit je crois que si nous nous contentons de prêcher, les gens vont se douter que tout cela a un coût, et ils demanderont à nous financer. Prêcher Christ, la surabondance de la grâce, l’Amour sans mesure, la bénédiction sans frontières, c’est marcher sur l’eau et faire le pari qu’on ne manquera de rien.
Gilles Boucomont, Paris 16 novembre 2020