Noël, les courses (1/4) : à vos marques !
Noël, la course en Avent
A vos marques !
La Bible, Premier testament – Psaume 62:1-8
Psaume de David, pris dans le livre du chef de chorale.
D’après Yedoutoun.
Oui, auprès de Dieu seul, je connais le repos, mon salut vient de lui.
Lui seul est mon solide rocher, lui seul me sauve.
Il me protège avec puissance, je ne peux pas tomber.
Jusqu’à quand vous jetterez-vous tous ensemble sur un homme ?
Vous voulez donc le renverser comme un mur qui penche, comme une barrière qui tombe ?
Vous pensez seulement à lui faire perdre son honneur, et vous aimez mentir.
Vous dites des paroles de bénédiction, mais votre coeur est rempli de malédictions.
Oui, je dois me reposer près de Dieu seul, c’est lui qui me donne espoir.
Lui seul est mon solide rocher, lui seul me sauve.
Il me protège avec puissance, je ne peux pas tomber.
Mon salut et mon honneur viennent de lui.
Mon protecteur puissant et mon abri, c’est lui.
La Bible, Nouveau testament – 1 Corinthiens 3:8
Les fondations sont déjà là : c’est Jésus-Christ. Personne ne peut en placer d’autres.
Prédication :
Puisque nous sommes quatre dimanches avant la date fatidique du 25 décembre, nous sommes en chemin vers Noël. Ce mois de l’Avent est un temps de préparation, un temps d’attente.
C’est un mois un peu particulier pour nous car il est devenu mécanique, machinal, annuel et répétitif. Nous sommes dans une attente spéciale où il n’y a jamais le moindre doute que ce que nous attendons pourrait ne pas arriver. Mais c’en est ainsi des célébrations régulières.
On joue à l’attente.
Bien des métaphores, bien des images sont utilisées dans le temps de l’Avent. L’image de la grossesse et de ses neuf mois évidemment, l’image du tricot fait et refait maintes fois, comme le fameux débardeur d’Ulysse dans la mythologie grecque, l’image des heures qui précèdent le lever du soleil quand on s’est réveillé un peu trop tôt.
Mais comme pour certains d’entre vous c’est le quatre-vingt dixième Noël qui se prépare, ces métaphores commencent peut-être à s’épuiser quelque peu ; c’est pourquoi je vous propose tout autre chose cette année.
En effet l’attente n’est pas nécessairement passive, comme quand on est dans un aéroport dans un pays lointain et qu’on n’a ni téléphone, ni journal, ni la possibilité de vraiment parler avec qui que ce soit.
L’attente peut être active, elle peut même être un chemin. On peut attendre en marchant vers ce qu’on attend. Et c’est cette image que je vous suggère de creuser tout au long de l’Avent cette année.
On parle souvent des courses de Noël, je vous proposerai donc de relire l’Avent comme une course, comme un 400 m. : quatre fois cent mètres. Nous aurons donc quatre étapes, logiques. Aujourd’hui, à vos marques. Dimanche 5 : prêts. Dimanche 12 : partez. Dimanche 26 : allez allez allez !
Ce n’est pas une nouveauté d’utiliser la métaphore sportive pour parler de la foi, puisque l’apôtre Paul l’a déjà employée pour parler de son apostolat (1 Corinthiens 9:24).
Le peuple d’Israël a vécu
un Avent de plusieurs siècles
Finalement nous pouvons tout à fait vivre l’Avent comme le peuple d’Israël, qui a vécu un Avent de plusieurs siècles, et qui l’a entrepris comme une migration dans l’espace et dans les idées. Il a fallu beaucoup se déplacer, de l’Egypte à Babylone, en traversant rivières et déserts, une course vers le Sauveur, vers un Messie attendu, mais qu’on attend en marchant.
Il est aussi légitime de vivre l’Avent comme Joseph et Marie, obligés à se déplacer, alors que le dernier mois de grossesse est habituellement un mois calme où l’on ne fait pas trop de route, voilà qu’ils doivent changer de lieu pour pouvoir eux aussi accueillir le Messie. L’Avent est une course.
Une course de témoins.
Et aujourd’hui retentit la parole du directeur de course : A vos marques !
C’est le temps de se caler dans les starting blocs. C’est frappant de voir le temps que mettent les athlètes pour caler leurs pieds dans ces plaques métalliques. Sur certaines distances, ce temps de placement des pieds est même plus long que la course en elle-même. C’est que l’essentiel de la course se joue dans le départ, dans la qualité du départ que l’on prend. Et l’invention des starting blocs a permis d’améliorer de beaucoup la course. On va beaucoup plus vite si l’on prend un bon appui, si l’on prend la juste posture, étudiée pour démarrer au mieux.
Comme dans la vie.
Sur quoi est-ce que je fonde la course de ma vie ?
Sur quoi est-ce je fonde ma vie ?
Sur quoi est-ce que je m’appuie dans l’existence ?
Est-ce que je me lance en escarpins sur un dallage de grande surface juste après que la nettoyeuse soit passée ?
Sur quoi est-ce que je me repose pour me lancer ?
L’enjeu est capital : c’est toute la suite qui en dépend. Le psalmiste dit au psaume 71 : « Dès le ventre de ma mère je m’appuie sur toi [Seigneur] ».
C’est aussi important que le pilier central de la crypte de cette Église, solide appui sans lequel nos vies seraient en danger.
Dans la course en Avent qui nous mène à Noël, vers celui qui advient, nous nous appuyons sur les starting-blocs solides de l’Ecriture.
Noël a été attendu pendant non pas quelques semaines mais pendant plusieurs siècles par un peuple assuré de la venue d’un Messie, d’un sauveur, par les promesses de Dieu. Cette espérance s’est façonnée petit à petit dans un processus assez long, pour devenir un solide appui pour les croyants. Suffisamment solide pour se lancer dans la course courageuse de la foi. Cette parole tient fermement et je peux compter sur elle, qui me dit que le Seigneur m’ouvre un avenir.
Et à ce jour encore la parole biblique demeure notre appui le plus solide pour l’existence.
Longtemps j’ai cru que la tâche du chrétien était d’interpréter la bible avec pour critère et pour appui la grille de lecture que nous propose la pensée contemporaine. Je pensais qu’être chrétien, c’était avoir la bible en ligne de mire et la lire avec les lunettes de l’historien, du psychanalyste, du professeur de lettres. Je m’aperçois aujourd’hui que notre tâche de chrétien est en fait exactement l’inverse : il faut prendre la bible comme grille de lecture pour interpréter le monde. C’est beaucoup plus fécond car la bible devient alors un moyen et la vie devient le but. Ce qui est bien plus intéressant et utile.
Ainsi je ne viens plus plaquer mes préoccupations d’homme moderne sur un texte qui va me dérouter par ses questionnements à mille lieues des miens. Mais je vais à l’inverse prendre les réponses que le peuple de Dieu a tenté d’offrir aux questions de son époque pour tenter d’adopter la même posture face aux questions toutes autres de mon époque.
En d’autres termes, est-ce vraiment passionnant pour des gens de nos générations de se préoccuper de la façon dont les hébreux sont traités à Babylone en 589 avant Jésus-Christ ? En soi, non. Mais quand je découvre que c’est en captivité que surgit une espérance à toute épreuve, une confiance radicale en son Dieu, cela m’intéresse car je peux certainement recueillir quelque chose pour devenir capable d’espérer autre chose, en ce jour de ma captivité dans le grand hypermarché mondial.
La parole biblique est mon starting bloc pour me lancer dans la course de l’espérance, dans le bond vers un monde différent, vers cette réalité nouvelle mais si fine et délicate qu’est le Royaume de Dieu.
Vers un lieu désigné
par une étoile
A bien y regarder , il y a deux éléments dans le starting bloc. Les deux cale-pieds sont décalés, un bien en arrière pour le pied gauche, et un en avant pour le pied droit (si on est droitier).
Dans notre course en Avent, ce que l’on peut reconnaître comme notre starting-bloc de gauche, désormais c’est la parole biblique sur laquelle nous pouvons nous caler vers l’arrière pour être bien stables. Et le cale-pied de droite, c’est… en fait c’est l’amour de Dieu qui est la seule chose solide sur laquelle on puisse s’appuyer significativement pour faire face à toutes les échéances de l’existence. C’est sur celui-ci que allons pouvoir faire reposer notre dynamisme pour nous lancer. C’est lui qui est très important car c’est sur lui que tout le poids de l’accélération va se placer. C’est lui qui résiste encore plus à la pression que nous faisons au moment de nous lancer. C’est vraiment la certitude de me savoir aimé de Dieu qui me fait avancer dans la vie. La certitude que son amour m’invite à me lancer vers une rencontre, vers le lieu du rendez-vous, que, dans ce temps de Noël, nous appelons : Bethléem. C’est à cause de l’amour de Dieu que Joseph, Marie, les bergers, les mages, et la foule des anges célestes vont avoir le désir de se lancer dans cette aventure qui les fait courir vers l’étable.
Alors, à vous marques…
Prenez bien le temps qu’il faut pour caler votre pied vers l’arrière sur l’espérance biblique, et l’autre pied vers l’avant sur l’amour du Père.
A vos marques pour la course de Noël.
Non plus la course aux marques dans les courses de Noël, dans l’ivresse titubante du consumérisme ambiant, mais à vos marques pour une belle trajectoire qui doit nous mener vers un lieu désigné par une étoile.
Amen.