Pourquoi Jésus dit-il que ce sont les violents qui s’emparent du Royaume de Dieu ? [Daniel]

L’affirmation à laquelle vous faites référence se trouve dans l’évangile de Matthieu, chapitre 11, verset 12 : « Depuis l’époque de Jean-Baptiste jusqu’à présent, le royaume des cieux est assailli avec force, et des violents s’en emparent. » Elle a un parallèle en Luc 16.16 : «  La loi et les prophètes ont subsisté jusqu’à Jean; depuis lors, la bonne nouvelle du royaume de Dieu est annoncée et chacun cherche avec force à y entrer. » Le verset de Matthieu pose un gros problème de traduction, car le mot traduit en français par « violent » (en grec, « biastès ») ne se trouve que là… dans toute la littérature grecque classique ! C’est dire que nous n’avons que ce passage pour comprendre ce qu’il peut vouloir dire. Le verbe auquel il se rattache, et qui est traduit dans Matthieu 11 par « est assailli avec force » (en grec « biazomai ») peut vouloir dire « user de violence », « violenter », mais aussi « entrer/sortir de force » « écarter par la force » ou encore « contraindre », ce qui n’est pas la même chose… Je pense que le mot de Matthieu renvoie à la même idée que ce qui est dit dans Luc. Plutôt que des violents, je crois qu’il désigne ceux qui sont conscients que le Royaume n’est pas une réalité toute simple et « naturelle », dont l’entrée serait dans l’ordre des choses. Si c’était le cas, Jésus-Christ n’aurait pas dû aller jusqu’à la Croix pour le manifester. Ils savent que le Royaume ne procède pas de nos logiques, de nos raisonnements, qu’il faut « se faire violence » comme on dit, pour entrer dans le pardon, la miséricorde, la gratuité qui sont les marques de l’Évangile. L’action du Saint-Esprit, qui nous permet de nous ouvrir au royaume, est souvent quelque chose qui « secoue », même intérieurement.

En Matthieu 12-32 Jésus dit que celui qui pèche contre l’Esprit-Saint- le pardon ne lui sera accordé ni dans ce monde ni dans l’autre. Comment interpréter ce passage ? [Samdinho]

Pour comprendre ce que peut signifier « parler contre le Saint-Esprit », il est nécessaire d’être attentif au passage qui précède ce verset. Ainsi, les versets 14 à 21 du chapitre 12 de Matthieu nous montrent Dieu à l’oeuvre en Jésus, par des guérisons et des délivrances. Le texte nous dit que ces miracles correspondent à l’oeuvre de Dieu, par l’Esprit, l’accomplissement de ce qui a été annoncé dans l’Ancien Testament, selon les versets 18 à 20. Verset 24, on voit les pharisiens refuser cette oeuvre de l’Esprit en Jésus en l’attribuant au diable, ce que Jésus dément ensuite. Nous pouvons déduire que cette parole de Jésus s’adresse aux pharisiens de notre histoire et qu’elle désigne donc ceux qui rejettent l’oeuvre de l’Esprit.

Bien que la sanction de « non pardon » puisse nous sembler effrayante, elle est logique. En effet, c’est l’Esprit qui nous convainc de péché, nous conduit dans la repentance, nous pardonne et change nos cœurs. Ainsi, celui qui parle contre l’Esprit ne fait rien d’autre que de refuser son oeuvre de pardon : il n’est pas étonnant qu’elle ne puisse alors pas s’accomplir ! Tâchons donc de nous attendre à l’oeuvre de l’Esprit, tâchons de le laisser faire de nous de bons arbres, qui donnent de bons fruits ! (Matthieu 12,33-34s).

Dans Ézéchiel 44 / 25 : « Un sacrificateur n’ira pas vers un mort, de peur de se rendre impur. » Pourquoi assiste-t-on à un culte avant l’enterrement ? [Marc]

Plusieurs remarques pour répondre à votre question.

Tout d’abord, l’Ancien Testament est ancien ! Non pas à cause de sa date d’édition, mais parce qu’il est dépassé par le Nouveau qu’il annonçait. Dans le Nouveau, il n’y a plus de sacrificateurs, ni d’impureté rituelle (cf. Actes 10). Le Christ est le seul sacrificateur et l’unique victime expiatoire (cf. l’épître aux Hébreux). Il n’y a d’ailleurs plus de Temple non plus depuis 1.950 ans… Pasteurs et chrétiens ne sont pas des prêtres, sinon par la prière pour les autres, l’intercession, et pour ce faire ils le sont tous de par leur baptême, quelles que soient les circonstances.

Quant au texte que vous citez, la réponse en est bien sûr l’histoire du « bon Samaritain » (Luc 10 / 30-37), où le sacrificateur et le lévite appliquent ce verset, tandis que le Samaritain (Jésus ?) s’approche, lui, du blessé qui est peut-être mort (moi ?). C’est Jésus qui accomplit l’Ancien Testament en rendant caduques ses ordonnances rituelles, par sa propre mort et sa résurrection, gage de la mienne.

La question du culte à l’occasion d’un enterrement ou d’une crémation est très différente, en protestantisme. Il ne s’agit pas de s’approcher du mort (le culte peut avoir lieu sans la présence du cercueil, d’ailleurs), mais d’une famille en deuil, pour prier avec elle (les « condoléances » au sens propre), et écouter ensemble la Parole que Dieu lui adresse, témoignage justement de cette résurrection pour le défunt comme pour chacune des personnes présentes. Ce culte n’est donc pas nécessaire (pour éviter toute idolâtrie, les Réformés d’autrefois s’en passaient), mais il est à la fois l’expression de la fraternité chrétienne (soutenir des frères et sœurs dans la peine) et la mission de l’Église (annoncer l’Évangile en toute circonstance).

Pourquoi faut-il prier en langue ? J’ai l’impression de répéter tout le temps la même chose. Qu’est-ce que cela m’apporte de prier en langue ? Cela vient-il de l’Esprit ? Est-ce le bon ? [Carmen]

« La prière exauce Dieu », avais-je lu un jour. Le but de la prière n’est pas, absolument pas, que « cela vous apporte quelque chose » ! Quelle que soit la forme de cette prière… La prière est un moment d’intimité avec Dieu, elle est portée par le Saint-Esprit, qu’elle soit en français, en langues, en silence, en chant, en tout ce qui vous vient à ce moment-là.

« Et vous n’avez pas reçu un esprit de servitude, pour être encore dans la crainte, mais vous avez reçu un Esprit d’adoption, par lequel nous crions : « Abba » – “Père !” L’Esprit lui-même rend témoignage à notre esprit que nous sommes enfants de Dieu. » (Romains 8 / 15-16) « L’Esprit vient au secours de notre faiblesse, car nous ne savons pas ce qu’il convient de demander dans nos prières. Mais l’Esprit lui-même intercède par des soupirs inexprimables ; et celui qui sonde les cœurs connaît quelle est l’intention de l’Esprit : c’est selon Dieu qu’il intercède en faveur des saints. » (ibid. 26-27)

Lorsque la prière est tellement centrée sur celui qui prie que le partenaire (Dieu) ne compte plus, alors ce n’est plus une prière, mais du narcissisme ! Même lorsqu’elle se fait « en langues ». Pourtant, la glossolalie est normalement un don de Dieu, celui qui prie ainsi se laisse porter par une expression qui, justement, ne vient pas de lui, qu’il ne maîtrise pas, qui le libère pour un instant de lui-même et de ses facilités ou difficultés à s’exprimer par son intelligence. On ne peut donc pas se dire « je vais prier en langues », ni « il faut prier en langues » ; mais seulement être reconnaissant lorsque cela se passe, et vivre cette prière dans la liberté des enfants de Dieu s’adressant à leur Père. Si, pour vous, la glossolalie est un handicap, ne la pratiquez pas : vous êtes libre !

Comment expliquer la réussite des méchants dont on se plaint dans les psaumes ? [Daniel]

Un certain nombre de psaumes déplorent effectivement la réussite des méchants (le 73 par exemple), mais aussi le malheur des justes (le 69). D’autres toutefois soulignent le malheur des méchants (le 91), et la réussite de justes (le 112).

Dans leur logique, les Ecritures affirment que Dieu est au commencement et à la fin du monde, qu’Il gouverne le monde (Psaume 9). Mais tout n’est pas encore soumis à Dieu et son Messie (1Corinthiens 15, 20-28). Dans l’attente du temps où Dieu sera tout en tous, l’injustice continue de sévir sous l’influence du « dieu de ce monde » (2Corinthiens 4,2),… Mais même l’injustice, qui est, mystérieusement, sous le contrôle de Dieu (Psaume 2), est appelée à servir et révéler, finalement, le plan de Dieu et Sa gloire, sachant que Dieu rendra la justice (Psaume 75, voir aussi Psaume 62, 13). Comme le dit Paul « Tout concourt au bien de ceux qui aiment Dieu » (Romains 8, 28).

A la fin de sa vie terrestre Jésus dit : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? ». Quel connexion avec le psaume 22 ? [Nathan]

Il semble qu’alors qu’il expirait Jésus a effectivement récité le psaume 22, comme le ferait tout bon Juif reprenant des paroles bibliques pour rythmer les étapes majeures de son existence.

Relisez tout le psaume en imaginant Jésus sur la croix prononçant non seulement cette parole mais l’ensemble du psaume. C’est étonnant !

La Bible dit que nous sommes mis à part dès le sein de notre mère, choisis par Dieu comme Israël, et d’autre part que le salut est offert à tous en J.-C. Quelle est notre part dans tout ça ? [Manu]

C’est une question qui depuis toujours divise le christianisme. Pélage, comme le judaïsme avant lui, insistait sur la part de l’être humain dans son salut. Le catholicisme souligne qu’avec l’aide de Dieu, l’être humain peut faire ce qu’il faut. Au sein-même du protestantisme, alors que les Réformateurs insistaient, eux, sur la prédestination des croyants, le méthodisme (et à sa suite la majorité du courant évangélique, notamment le pentecôtisme), a réintroduit la nécessité du choix.

Pourquoi donc faudrait-il que nous y ayons notre part, dans notre salut ? Nous en sommes indignes, et « incapables par nous-mêmes d’aucun bien » (cf. la confession des péchés de Calvin et Bèze). C’est un pur cadeau. Je ne puis qu’en être reconnaissant, dès que j’ai conscience de l’avoir reçu, et le mettre en œuvre dans ma vie et autour de moi avec l’aide du Saint-Esprit, comme témoignage rendu à Jésus-Christ.

Mais le salut n’est-il pas offert à tous en Jésus-Christ, comme vous l’écrivez ? Certes ! C’est bien pour ça que le témoignage évangélique est nécessaire, et qu’un chrétien ou une Église ne peut pas justifier n’importe quoi… Pour saisir ce salut, il faut bien que l’être humain ait d’abord une conscience aiguë de son indignité, de son péché, pour recevoir joyeusement le fait que Christ l’a pris sur lui et l’en a libéré par sa mort et sa résurrection. « Vous êtes sauvés par grâce, par le moyen de la foi. Cela ne vient pas de vous, c’est le don de Dieu. » (Éphésiens 2 / 8)

Comment les deux s’articulent-ils pour les autres ? C’est dans la main de Dieu, pas dans la mienne ! À moins que ce ne soit une question de regard. J’ai lu une fois (sous une plume pentecôtiste), que celui qui était à l’extérieur semblait avoir le choix d’entrer ou non, pour s’apercevoir une fois dedans qu’il y était attendu et qu’il n’aurait pas pu faire autrement… Quant à moi qui sais être dedans, je ne puis que rendre grâces humblement.

Jean 19,30 : « Jésus rendit l’esprit ». Quelle différence avec l’expression « rendre l’âme » ? [Joël]

L’expression « rendre l’âme » est rare dans la Bible (Genèse 35,18), « rendre l’esprit » également. Que se passe-t-il quand on meurt ? Dans la manière biblique et hébraïque de dire les choses, on dit que l’âme périt, ou qu’elle descend au séjour des morts, alors que le corps a disparu. C’est que l’esprit ne souffle plus, s’en est allé. L’expression « rendre l’esprit » semble donc plus conforme à cette manière-là de dire les choses : le souffle donné par Dieu à toute âme, toute vie (Psaume 104,29-30), s’en retourne à lui.

Dans l’expression utilisée pour Jésus, il y a aussi un autre sens : lui qui vivait totalement de l’Esprit de Dieu, il rend cet Esprit (qui est une personne) disponible pour d’autres, pour ses disciples (Jean 14 / 16-17, 28). « Rendre l’Esprit » à son Père, c’est dire ultimement sa confiance. Ressuscité, il est en communion parfaite avec le Père et avec cet Esprit. « C’est pourquoi il est écrit : Le premier homme, Adam, devint une âme vivante. Le dernier Adam est devenu un esprit vivifiant. » (1 Corinthiens 15,45)

Si Satan est une créature de Dieu, devons nous l’aimer comme toutes les autres ? Que serait un rapport sain à sa personne ? [Simon]

Dieu nous commande, dans le Lévitique (19,18), d’aimer notre prochain comme nous-mêmes. Dans l’Évangile (Jean 13,34), Jésus commande à ses disciples de s’aimer les uns les autres.

Il n’est écrit nulle part d’aimer toutes les créatures. Devrions-nous aimer les rochers, les étoiles, les plantes, les araignées, etc. ? Ça n’a pas de sens. L’amour est un attribut de Dieu, il concerne celles de ses créatures qui sont son image : les humains.

Un rapport sain au satan (est-il une personne ?) est le rapport que Dieu lui-même a désormais avec lui à notre égard : ne plus l’écouter, l’envoyer balader, et se préoccuper seulement de l’amour que Dieu nous a manifesté en Jésus-Christ, et de ce qu’il nous offre à vivre à travers sa Parole. C’est ainsi que notre liberté s’exercera à l’encontre des démons et autres puissances qui prétendent dominer sur nous alors qu’elles devraient nous être soumises, à nous comme à Christ (Colossiens 2,15 ; 1 Pierre 3,2 ; etc.).